Présidentielle en RDC : Adolphe Muzito va-t-il faire cavalier seul ?

Candidat à la présidentielle du 20 décembre, l’ancien Premier ministre de Joseph Kabila n’écarte pas la possibilité d’une alliance « avec l’un ou l’autre des candidats ». Mais son cœur penchera-t-il du côté de Félix Tshisekedi ou de ses adversaires ?

Adolphe Muzito, à Paris, le 10 mai 2018. © Vincent Fournier/JA

Adolphe Muzito, à Paris, le 10 mai 2018. © Vincent Fournier/JA

Publié le 25 octobre 2023 Lecture : 4 minutes.

Sans doute n’y avait-il, dans le cas d’Adolphe Muzito, que peu de doutes, mais la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a bien validé, le 20 octobre, sa candidature à l’élection présidentielle du 20 décembre.

Exister médiatiquement

L’ancien Premier ministre de Joseph Kabila sait que le plus dur est à venir, et qu’il lui faut désormais exister médiatiquement au milieu des poids lourds de l’opposition que sont Moïse Katumbi, Martin Fayulu, Matata Ponyo Mapon ou Denis Mukwege, qui a rejoint in extremis la course à la magistrature suprême. Mais il sait aussi qu’il peut avoir une carte à jouer alors que les grandes manœuvres ont commencé avant même que la Cour constitutionnelle ait validé l’ensemble des 24 candidatures déposées.

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Ces derniers mois, Adolphe Muzito semble s’être tenu à distance de ses autres camarades de l’opposition, sans que l’on sache si cette distance était de son fait ou s’il la subissait. Au début du mois d’avril, il n’a certes pas signé la charte de l’Union sacrée, qui s’est formée autour de Félix Tshisekedi, mais il ne s’est pas non plus joint à ceux qui se sont réunis moins de dix jours plus tard à Lubumbashi (il n’avait pas été convié, selon nos informations). Il n’avait pas non plus appelé à manifester contre le pouvoir le 20 mai dernier – manifestation qui a été durement réprimée par la police –, et il s’est brouillé avec Martin Fayulu, avec qui il partageait la présidence de la coalition Lamuka.

Va-t-il continuer à faire cavalier seul ? Contacté par Jeune Afrique, Adolphe Muzito, qui séjournait à Paris mi-octobre, explique qu’il n’écarte pas la possibilité d’une alliance « avec l’un ou l’autre des candidats à la présidence de la République ». Une formule suffisamment vague pour qu’elle ne lui ferme aucune porte. « À condition qu’avant ou à la veille des élections, une convergence des politiques soit possible, précise-t-il toutefois. À condition aussi qu’il soit possible de constituer une majorité parlementaire. »

Proche de Tshisekedi ?

Au sein même de l’opposition, Adolphe Muzito, 66 ans, occupe une place un peu à part, régulièrement soupçonné de s’être rapproché du chef de l’État congolais. Lorsqu’on lui demande si une alliance avec Félix Tshisekedi est possible, il ne se cabre d’ailleurs pas. « Je n’écarte a priori aucun candidat », se contente-t-il de répondre.

Il y a quelques mois déjà, il avait affirmé ne voir dans l’opposition qu’un « ensemble vide, sans idée ni vision ». Une position qu’il ne nie pas. « Je les avais appelés ainsi parce qu’ils n’avaient pas de programme qui puisse servir de base à des discussions pour une alliance, explique-t-il à Jeune Afrique. C’était vrai à l’époque et ça l’est encore aujourd’hui. »

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Il se dit prêt à participer à des négociations pour une candidature commune, à la manière de ce qui avait été fait en 2018, à Genève, quand les adversaires de Joseph Kabila avaient choisi de s’unir derrière Martin Fayulu, mais il met en garde : « Il ne suffit pas d’avoir un candidat commun et de gagner la présidentielle, affirme-t-il. Il faut aussi gagner les élections parlementaires en dégageant un programme commun pour espérer gouverner dans les conditions républicaines. Car c’est le gouvernement qui gère la République. » En 2018, nous avait-il confié en avril dernier, l’objectif avait surtout été de se « débarrasser » du système Kabila, plus que de s’unir autour d’un programme commun.

Un mur entre la RDC et le Rwanda

Lui-même n’a pas encore publié l’intégralité de son programme, mais on en connaît les grandes lignes depuis que le congrès du parti qui porte sa candidature, Nouvel Élan, s’est tenu, à la fin du mois de septembre. Il comporte des « différences » et même des « divergences » avec ceux de Matata Ponyo Mapon ou de Delly Sesanga, insiste Adolphe Muzito. « Ce n’est pas la même chose au niveau des politiques publiques, des priorités, de leur chiffrage et de leurs modes de financement », indique-t-il. L’une de ses propositions a en tout cas déjà fait couler beaucoup d’encre : il s’agit de ce mur de 8 mètres de hauteur qu’il promet d’ériger entre la RDC et le Rwanda s’il est élu.

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Contrairement aux autres leaders de l’opposition, le président de Nouvel Élan s’est gardé, ces derniers mois, d’être trop virulent à l’égard de la Ceni et du processus électoral. Et son plaidoyer pour que l’élection puisse avoir lieu dans les territoires de Rutshuru, de Masisi et de Kwamouth aura beau ne pas avoir été entendu, il n’a pas réclamé de report des scrutins, appelant au contraire au respect du calendrier électoral – position qu’il a réitérée mi-octobre devant les membres d’une mission de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC, en anglais) de passage à Kinshasa.

« Au-delà de la question électorale, il y a celle de la souveraineté de l’État dans ces territoires. Le défi va au-delà de la Ceni. Il faut y mettre en place les mécanismes de restauration de la souveraineté de l’État », insiste-t-il néanmoins.

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