Présidentielle en Centrafrique : Sylvain Patassé, le fils qui veut incarner le changement

Le fils de l’ancien président centrafricain Ange-Félix Patassé espère créer la surprise lors de la présidentielle centrafricaine, à laquelle il se porte candidat pour la seconde fois.

Sylvain Patassé, le 10 février 2014. © Vincent Fournier/JA

Sylvain Patassé, le 10 février 2014. © Vincent Fournier/JA

Publié le 18 novembre 2020 Lecture : 4 minutes.

Dans le salon de la résidence huppée de la capitale Bangui qu’il occupe depuis la mort de son père, en 2011, Sylvain Patassé a installé en bonne place une photo de celui qui fut le président de la Centrafrique de 1993 à 2003, avant d’être renversé par François Bozizé. Et le cliché choisi est à forte teneur symbolique : on y voit Ange-Félix Patassé prêter serment lors de son investiture, en 1993.

C’est ici que Sylvain Patassé reçoit ses invités, et en particulier les personnalités politiques avec lesquelles le fils de l’ancien président s’entretient ces dernières semaines dans la perspective de la campagne présidentielle. Mardi, c’est avec un autre fils d’ancien président centrafricain qu’il a devisé ici même sous le regard de l’illustre figure paternelle : Désiré Kolingba, fils d’André Kolingba, le général qui a tenu le pays d’une main de fer de 1981 à 1993 après avoir déposé son prédécesseur David Dacko.

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Les espoirs d’un fils

Pour la seconde fois, Sylvain Patassé est en effet candidat à la magistrature suprême. Paradoxalement, s’il dit être conscient que le nom qu’il porte compte parmi les éléments déterminants qui pourraient, comme il l’espère, lui ouvrir les portes du Palais de la Renaissance, il se présente aujourd’hui comme le « candidat du changement ».

« La présidentielle, c’est une rencontre entre un homme politique et son peuple. Rien n’est joué d’avance. Ma chance, c’est que les Centrafricains souhaitent un changement profond pour le pays », affirme Sylvain Patassé, qui sait être engagé dans une compétition dans laquelle il lui sera difficile d’exister.

Outre le président sortant Faustin Archange Touadéra, les adversaires de Sylvain Patassé dans la course à la présidence sont des poids lourds politiques de longue date. Il y a, bien sûr, celui qui a chassé son père du pouvoir, l’ex-chef de l’État François Bozizé. Il y a également les anciens Premiers ministres de son père Martin Ziguélé et Anicet-Georges Dologuélé.

Il veut pourtant croire en ses chances. C’est même dans la perspective de la présidentielle de 2016 qu’il avait créé son propre parti politique, le Centrafrique nouvel élan (CA-NE). Cette fois, il aussi décidé de se présenter aux législatives qui se dérouleront le 27 décembre, en même temps que la présidentielle. Et c’est dans la circonscription de Nana Bakassa, qui fut l’un des fiefs d’Ange-Félix Patassé, qu’il a décidé de se présenter. C’est d’ailleurs dans ces régions du Nord et du Nord-Ouest du pays que devrait se dérouler l’une des plus belles batailles de l’élection, tant elles sont disputées.

Chacun possède son propre charisme et sa personnalité. Ça ne se transmet pas

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Dans l’Ouham-Pendé, il sait en revanche qu’il n’a que peu de chances face à Anicet-Georges Dologuélé et Martin Ziguélé. D’autant que ce dernier a hérité de la tête du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC), où l’on s’amuse de la candidature du fils de l’ex-président. Et l’on n’hésite pas à rappeler que Sylvain Patassé lors de sa précédente tentative, en 2015-2016, avait recueilli tout juste 2 % des voix. « Lors du dernier scrutin, le nom de son père n’avait pas influencé l’électorat. Chacun possède son propre charisme et sa personnalité. Ça ne se transmet pas », assène Jean Dominique Ndarata, conseiller politique de Martin Ziguélé.

Sylvain Patassé, lui, préfère jouer la carte de l’humilité. « Je respecte les anciens Premiers ministres de mon père. On entretient des relations quasi fraternelles », assure-t-il dans un sourire.

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Apprendre de son échec

Pour se tester, il a organisé des meetings dans la ville de Nana Bakassa, début novembre, ou encore dans le quartier musulman du PK5, où il espère faire de bons scores. « Le résultat a été atteint, affirme un membre de son équipe de campagne. La foule était venue l’accueillir et l’écouter. »

Son cuisant échec lors de la présidentielle de 2015-2016, Sylvain Patassé assure en avoir fait une force. « C’était une belle expérience. Cela m’a poussé à voir les choses autrement », fait-il valoir. Depuis, il assure avoir peaufiné ses stratégies et s’être « créé des opportunités » dans la sous-région, notamment en tissant des liens avec des conseillers des présidents tchadien Idriss Déby Itno et équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, qu’il appelle affectueusement « mon père ».

« Il a des entrées dans certains palais de l’Afrique centrale », confirme à Jeune Afrique un diplomate africain en poste à Bangui, pour qui ces privilèges sont liés à son histoire familiale. « Son père avait des liens avec des doyens comme Idriss Déby Itno, Denis Sassou Nguesso ou encore Obiang Nguema. Cela pourrait lui être utile », juge le diplomate.

À l’en croire, des représentants du  Kwa na Kwa (KNK), le parti de François Bozizé, et du Mouvement coeurs unis (MCU), de Faustin Archange Touadéra, l’auraient sollicité  en vue de constituer des alliances politiques. En vain. « Mon objectif est de faire oublier la vieille classe politique et prôner un changement complet du système », assure Sylvain Patassé, qui doit cependant, avant de se mesurer au verdict des urnes, obtenir la validation de sa candidature par la Cour constitutionnelle. Selon le calendrier électoral, cette étape ne devrait pas arriver avant le 3 décembre.

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