Luc Atrokpo, l’homme qui rêve de transformer Cotonou

Chantre de l’écocitoyenneté, le nouveau maire de Cotonou a beaucoup promis à ses administrés. Une grande partie des compétences et des moyens restent dans le giron de l’État, mais il entend jouer un rôle dans la transformation de la ville.

Le nouveau maire de Cotonou, Luc Atropko, a pris les commandes de la ville le 6 juin 2020. Il succède à Léhady Soglo. © CHARLES PLACIDE TOSSOU

Le nouveau maire de Cotonou, Luc Atropko, a pris les commandes de la ville le 6 juin 2020. Il succède à Léhady Soglo. © CHARLES PLACIDE TOSSOU

MATTHIEU-MILLECAMP_2024 Fiacre Vidjingninou

Publié le 19 octobre 2020 Lecture : 4 minutes.

Élu à la tête de la municipalité de Cotonou le 6 juin, Luc Sètondji Atrokpo (47 ans) bouillonne d’idées et multiplie les plans pour transfigurer la capitale économique béninoise, une métropole aujourd’hui bondée, engoncée entre le lac Nokoué et l’océan Atlantique, et confrontée aux sempiternels problèmes d’inondations et d’assainissement.

Cotonou, c’est mon marigot !

Le nouvel édile a beau être un « parachuté », il l’affirme haut et fort : son élection à la tête de la mairie de Cotonou, il la doit avant tout à ses électeurs. « Cotonou, c’est mon marigot ! » insiste Luc Atrokpo. Il est vrai qu’il est devenu le premier magistrat de la capitale économique à l’issue des élections communales du 17 mai… après avoir été, pendant quinze ans, le maire de Bohicon, ville de 180 000 habitants située dans le Zou, à 120 km au nord de Cotonou.

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S’il avait les faveurs du président, Patrice Talon, et le soutien actif de la direction de l’Union progressiste (UP), l’un des deux partis de la mouvance présidentielle, ce chrétien catholique fervent a cependant dû batailler ferme pour finir par s’imposer. Avant même le début de la campagne, un jeune militant de l’opposition avait saisi la Cour suprême pour remettre en question sa candidature, qui a finalement été validée.

Ensuite, c’est de son propre camp que sont venus les coups. Gatien Sèdami Adjagboni a en effet mené une campagne de candidat au poste de maire, affichant son propre « plan pour Cotonou ». Quant au maire sortant, Isidore Gnonlonfoun – qui avait accédé à la fonction après l’éviction de l’ancien maire, Léhady Soglo, en 2017 –, il ne cachait pas son envie de rester dans le fauteuil qu’on lui demandait de quitter.

Ville verte

Finalement, le 6 juin, le conseil municipal a tranché, et Luc Atrokpo a été installé. Son expérience à la présidence de l’Association nationale des communes du Bénin (ANCB), où il a pu renforcer son réseau auprès des élus locaux, lui a sans aucun doute servi à convaincre. « Il est normal que des ambitions s’expriment lors des campagnes. Désormais, nous allons tous dans le même sens, assure Luc Atrokpo. Nous avons le devoir et l’obligation de réussir. »

De retour à Cotonou le 20 septembre, après avoir dû s’absenter du pays pour recevoir des soins en France, Luc Atrokpo promet de mettre les bouchées doubles. C’est aussi un militant infatigable du mandat local. Plusieurs fois élu député, il lui est arrivé de refuser de siéger au Parlement afin de pouvoir se consacrer à sa municipalité. « C’est à la base que se posent les problèmes. C’est là où l’action publique a du sens », justifie-t-il.

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Et, à Cotonou, les défis sont de taille. Les premiers à relever sont ceux de la sécurité et de la salubrité. Situé au cœur d’une plaine littorale, dont la nappe phréatique est si peu profonde qu’elle affleure parfois, Cotonou est très vulnérable aux inondations, qui provoquent chaque année des dégâts considérables. Une situation d’autant plus critique que la prise en charge des 1 000 tonnes de déchets produites chaque jour à Cotonou est encore loin d’être optimale.

« Le défi est à notre portée, a cependant martelé Luc Sètondji Atrokpo tout au long de sa campagne pour la municipalité, en début d’année, se faisant le chantre de l’écocitoyenneté. Nous ne voulons pas seulement faire de Cotonou l’une des villes les plus modernes du continent, mais surtout l’une des plus vertes. »

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Le nouveau maire entend également mettre l’accent sur l’amélioration des services municipaux – 1 200 agents, tous corps de métier confondus – et vient d’ailleurs de lancer un audit sur leur fonctionnement. « Nous avons la quantité, il faut désormais être sûr d’avoir la qualité », insiste-t-il.

Conformément au discours programme de l’UP, Luc Atrokpo et son équipe municipale travaillent aussi à la mise en place d’une direction de l’économie locale et de l’emploi, des services cruciaux encore trop souvent considérés comme le parent pauvre de l’investissement des communes au Bénin.

Transparence et de redevabilité

Enfin, celui qui a fait gagner à Bohicon le premier prix du concours de la meilleure commune du Bénin en matière de reddition des comptes en 2018 entend « mettre en place des mécanismes de transparence et de redevabilité », afin de redorer le blason d’une ville dont l’image a été écornée par plusieurs scandales financiers. « Lorsque nous rendrons compte aux citoyens de Cotonou et que notre gestion sera transparente, le défi de la mobilisation des ressources propres sera relevé », estime le maire.

La métropole bénéficie de son statut de vitrine du pays

Mais si ses administrés l’attendent de pied ferme sur plusieurs de ses promesses, Luc Atrokpo sait aussi qu’il ne pourra rien faire sans l’État. Avec un budget annuel de moins de 20 milliards de F CFA (environ 30,5 millions d’euros) – 17,9 milliards en 2020 –, la mairie de Cotonou est incapable d’assumer seule les grands travaux dont la ville a besoin. Elle peut cependant compter sur l’appui du gouvernement, qui a lancé plusieurs projets d’envergure dans la capitale économique et dans l’agglomération du Grand Nokoué.

Entre le projet d’aménagement et d’assainissement urbains (« Asphaltage ») et le programme d’assainissement pluvial de Cotonou, la construction de logements économiques ou la lutte contre l’érosion côtière, la métropole bénéficie de son statut de vitrine du pays et concentre une part importante des investissements du Programme d’actions du gouvernement (PAG) 2016-2021.

Réputé bon communicant – ce qui lui est parfois reproché par ses détracteurs, qui l’accusent de « privilégier le dire au faire » –, Luc Atrokpo cumule de nombreuses casquettes. Toujours président de l’ANCB, il conserve ses fonctions de premier vice-président du Conseil des collectivités territoriales de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Le maire entend cependant trouver le temps de mener à bien son plan sur cinq ans pour Cotonou et en promet la publication dans le courant du mois de novembre.

Cet article fait partie de notre dossier « Cotonou », à paraître dans JA N° 3094, en kiosque le 2 novembre.

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