Assassinat de Laurent-Désiré Kabila : les vérités de Nono Lutula, ancien conseiller sécurité du « Mzee »

Condamné à la peine capitale en janvier 2003 dans le procès de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila, il a été gracié par Félix Tshisekedi le 1er janvier. L’ancien conseiller sécurité de « Mzee » raconte sa détention et livre sa version des événements du 16 janvier 2001.

Constantin Nono Lutula, après sa sortie de prison, à Kinshasa, début janvier 2021. © DR

Constantin Nono Lutula, après sa sortie de prison, à Kinshasa, début janvier 2021. © DR

ROMAIN-GRAS_2024

Publié le 16 janvier 2021 Lecture : 9 minutes.

Sa voix tremble légèrement mais ses souvenirs semblent intacts. Une semaine après sa sortie de la prison de Makala, où il a passé vingt ans aux côtés du colonel Eddy Kapend, de Georges Leta et des autres condamnés dans le procès de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila, Constantin Nono Lutula savoure ses premiers jours d’homme libre.

Graciés au soir de la Saint Sylvestre à la suite d’une série d’ordonnances du président Félix Tshisekedi, l’ancien conseiller sécurité de celui qu’il appelle encore le « Mzee » peine encore à croire à sa libération.

Installé à Kinshasa, dans un lieu qu’il ne souhaite pas dévoiler, l’homme de 75 ans rumine encore ce jugement, prononcé le 7 janvier 2003 par un tribunal militaire, qu’il qualifie de « règlement de compte » et qui a régulièrement été dénoncé par les organisations des droits de l’homme.

Vingt ans après, le mystère reste entier. Si Rachidi Kasereka, garde du corps de Kabila, est bien celui qui a tiré à bout portant sur le président congolais, qui a commandité l’assassinat ? Plusieurs théories ont été évoquées au cours des deux dernières décennies, dessinant les contours de ce qui s’apparente à un complot aux ramifications multiples.

En attendant une hypothétique réouverture de l’instruction par la justice congolaise, Nono Lutula livre à Jeune Afrique sa version des faits et évoque ce 16 janvier 2001, quand un simple « kadogo » a tué le président congolais. Il revient sur les jours et les semaines qui ont suivi ce qui reste comme l’une des plus grandes énigmes de l’histoire récente du Congo, ainsi que sa longue détention dans le pavillon 1 de la plus célèbre des prisons congolaises.

Jeune Afrique : Comment avez-vous appris l’annonce de votre grâce présidentielle ?

la suite après cette publicité

Nono Lutula : Nous étions à la prison centrale de Makala. Il y avait de plus en plus de rumeurs à l’approche du Nouvel An mais, au départ, nous n’y avons pas cru. Les radios ont commencé à en parler. RFI, la RTNC, Voice of America… Tout le monde semblait le confirmer. Nous étions contents, soulagés.

C’est une histoire qui dure depuis très longtemps et nous avons été déçus à plusieurs reprises. Dès 2003 un décret présidentiel d’amnistie avait été signé par Joseph Kabila, mais nous n’en avons pas bénéficié alors que nous remplissions les conditions.

Joseph Kabila s’est opposé à ce qu’on nous exécute, je lui reconnais ça

la suite après cette publicité

Avec Eddy Kapend et consort, nous avons été accusés d’atteinte à la sécurité de l’État, une infraction politique par définition. En vertu du droit pénal congolais nous étions concernés, mais nous avons été séquestrés.

Par la suite, nous avons bénéficié d’une loi de la chambre basse, dirigée à l’époque par Olivier Kamitatu, qui concernait spécifiquement les condamnés dans l’assassinat du Mzee. La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a aussi statué en notre faveur pour qu’on nous relaxe. Elle n’a jamais reconnu la régularité du jugement prononcé par la Cour d’ordre militaire. Mais nous avons encore été séquestrés.

Bien s’informer, mieux décider

Abonnez-vous pour lire la suite et accéder à tous nos articles

Image
Découvrez nos abonnements
la suite après cette publicité

La rédaction vous recommande

Contenus partenaires