Tunisie : l’État en conflit avec les habitants d’une oasis pour des dattes

Un bras de fer oppose l’État tunisien à une association locale, autour d’une exploitation de dattes à Jemna (sud). Au cœur de l’affaire, un juteux marché de plusieurs centaines de milliers d’euros par an.

Les dattes sont au cœur d’un désaccord à Jemna, dans le sud de la Tunisie. © Jackmac34/CC/Pixabay

Les dattes sont au cœur d’un désaccord à Jemna, dans le sud de la Tunisie. © Jackmac34/CC/Pixabay

Publié le 11 octobre 2016 Lecture : 2 minutes.

Légalement, les terres, d’une superficie de 361 hectares, appartiennent depuis l’indépendance à l’État, qui sous-traitait de longue date l’exploitation à des sociétés privées. Depuis la révolution de 2011, l’association de la protection des oasis de Jemna exploite toutefois la ferme, de son propre chef.

Une vente aux enchères contestée

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Dimanche, malgré les mises en garde du gouvernement qui cherche à reprendre la main, une nouvelle vente aux enchères des dattes a été organisée par l’association. La récolte 2016 de l’exploitation des terres Henchir Moamar a été adjugée pour la somme de 1,7 million de dinars, soit près de 700 000 euros, a indiqué à l’AFP Belgacem Chayeb, le vice-président de l’association.

Cette initiative a entraîné lundi une nouvelle protestation du gouvernement de Youssef Chahed. « L’État continuera à accomplir son devoir de protection des biens publics et à récupérer ce qui a été saisi », a-t-il indiqué dans un communiqué.

Le secrétaire d’État aux domaines de l’État et aux Affaires foncières, Mabrouk Kourchid, a quant à lui réaffirmé sa volonté de mettre un terme à cette exploitation « illégale » selon lui. « Nous allons appliquer les procédures légales nécessaires pour protéger les biens de l’État », a-t-il prévenu.

Débat national

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Pour sa défense, l’association de Jemna, issue d’une antenne locale de la Ligue de protection de la révolution (une ex-milice pro-islamiste) a affirmé être dans son bon droit. « Historiquement, ces terres nous appartiennent. Elles ont été prises de force par les Français sous le Protectorat. Nous faisons partie des habitants de Jemna et nous avons un attachement sentimental à nos terres. Nous n’allons pas céder », a clamé Belgacem Chayeb.

L’affaire a également suscité la polémique sur les réseaux sociaux, les « pro-Jemna » arguant que l’argent des récoltes est régulièrement utilisé pour des investissements et pour aider les habitants en difficulté. Des députés, parmi lesquels Abdellatif Mekki (Ennahdha), Samia Abbou (Courant démocratique) et Hamma Hammani ( Front populaire) étaient sur place dimanche pour soutenir les habitants et saluer ce modèle économique local.

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Quant aux « anti », ils ont dénoncé « une action illégale » portant atteinte au « prestige » de l’État.

Selon des chiffres officiels, la Tunisie a produit entre octobre 2015 et septembre 2016 quelque 246 000 tonnes de dattes dont 110 000 tonnes destinées à l’export pour un chiffre d’affaires de 473,7 millions de dinars (environ 192 millions d’euros).

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