Côte d’Ivoire – 12e congrès du PDCI : ils veulent mettre Bédié à la retraite

La plus vieille formation politique de Côte d’Ivoire, le PDCI-RDA, tient son 12e Congrès, ce jeudi, à Abidjan. Henri Konan Bédié y remet en jeu son statut de président, farouchement contesté par trois candidats à sa succession. Portraits.

Henri Konan Bédié (en h. à g.) et ses trois challengers : Djédjé Mady, Kouassi et KKB. © AFP/DR/Montage J.A.

Henri Konan Bédié (en h. à g.) et ses trois challengers : Djédjé Mady, Kouassi et KKB. © AFP/DR/Montage J.A.

Publié le 2 octobre 2013 Lecture : 4 minutes.

Le congrès du Parti démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) qui se tient les 3 et 4 octobre à Abidjan a pour thème "Le PDCI-RDA face aux nouveaux défis : renouveau, rajeunissement et renaissance" et réunit entre 4 000 et 5 000 militants. Son enjeu ? La présidence du parti, essentiellement. Henri Konan Bédié, 79 ans, à la tête du PDCI depuis vingt ans, se présente à sa propre succession. Certes, en théorie, les statuts du parti le lui interdisent, à cause d’une limite d’âge fixée à 75 ans… Il faudrait donc les modifier lors du fameux congrès.

Face à Bédié, trois candidats sont d’ores et déjà déclarés : Alphonse Djédjé Mady, secrétaire général du parti, Yao Kouassi, ancien secrétaire général de la présidence de la République (1993-1999) et Bertin Konan Kouadio, dit KKB, président de la Jeunesse du PDCI. Mais à quelques heures de l’ouverture du congrès, la tension est montée d’un cran au sein du parti, à coup de mini-polémiques et de petites phrases… Mardi, 18 militants ont annoncé lors d’une conférence de presse avoir entamé une action en justice contre Henri Konan Bédié et ont dénoncé des "irrégularités" dans l’organisation du congrès. Alphonse Djédjé Mady a même demandé un report de l’événement. Retour sur les profils des quatre candidats à la présidence du PDCI.

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Le Sphinx de Daoukro (son village natal) n’a pas hérité de ce surnom par hasard… Voilà des décennies qu’il est au cœur de la vie politique ivoirienne : ambassadeur, ministre des Finances, président de l’Assemblée nationale… En 1993, il succède à Felix Houphouët Boigny à la tête de l’État (où il reste jusqu’en 1999), et très vite à celle du PDCI. Il connaît les rouages du parti, bénéficie de la confiance d’une majorité des cadres qui lui doivent très souvent leur carrière et leur position actuelle. Pour beaucoup Bédié représente la continuité et une probabilité plus forte d’avoir, à la prochaine élection présidentielle de 2015, une candidature unique du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), l’alliance avec le Rassemblement des républicains (RDR) de Alassane Dramane Ouattara (ADO) qui a permis à ce dernier de s’imposer en 2010 face à Gbagbo.

ADO ayant déjà annoncé qu’il briguerait un second mandat, une candidature séparée du PDCI serait dans ce scénario peu envisageable. D’autant qu’Henri Konan Bédié a 79 ans… et que pour certains militants, l’heure de la retraite et du passage de témoin a enfin sonné. Sa défaite dès le premier tour de la dernière présidentielle, et la campagne électorale qui l’a précédée, ont-elles aussi laissé un goût amer chez nombre de militants.

>> Lire l’interview de Bédié : "KKB est un soldat perdu du PDCI"

Le secrétaire général actuel du PDCI-RDA a 68 ans et affiche au compteur 48 ans de militantisme au sein du parti. Ce qui lui a permis de créer des liens… Lors de l’annonce de sa candidature, en août dernier, par exemple, plusieurs figures du PDCI-RDA étaient présentes, dont Georges Ouégnin, ancien directeur du protocole d’État et Jean Konan Banny, frère de l’ancien premier ministre, Charles Konan Banny. Comme beaucoup, l’engagement politique de Mady a débuté dès l’université, où il dirige un temps le Mouvement des étudiants et élèves de Côte d’Ivoire (MEECI). Il sera ensuite plusieurs fois ministre de la Santé sous Houphouët. Mais son nom reste aussi très lié à la défaite du PDCI en 2010, où il jouait un rôle de premier rang : directeur de campagne de Bédié…

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>> Lire l’interview de Djédjé Mady : "Henri Konan Bédié doit passer la main"

À bientôt 45 ans, KKB est le plus jeune des candidats. Il dirige d’ailleurs la Jeunesse du PDCI, depuis 2003. Ambitieux, audacieux, considéré pendant de nombreuses années comme l’un des "chouchous" de Bédié, il est aussi l’un des premiers à avoir osé le défier en interne, dès juin dernier. Un "affront" pour certains qui le taxent d’ "ingratitude"… Il mène depuis une campagne médiatique et de terrain – à l’étranger et en Côte d’Ivoire – pour rallier des soutiens. Mais pour quel résultat ? C’est la grande inconnue. Lui, qui n’était pas vraiment "pris au sérieux", il y a à peine un an au sein du parti, a-t-il réussi son opération séduction ? Réponse lors du congrès.

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>> Lire l’interview de KKB : "Changeons une équipe qui ne gagne pas"

  • Yao Kouassi, le gardien du temple

C’est le moins médiatique. Sa candidature à la tête du parti date pourtant déjà de janvier 2013. Membre du bureau politique du PDCI depuis 23 ans, il est aujourd’hui, à 64 ans, considéré comme une figure du parti, connue mais discrète. Son crédo ? Le respect des textes et des statuts du parti. Il a par ailleurs été secrétaire général de la présidence de la République sous Houphouët (1990-1993) et Bédié (1993-1999).

  • L’argent, invité surprise

Tous les candidats devront, depuis la décision du bureau politique du parti du 19 septembre dernier, s’acquitter de 18 millions de FCFA, soit près de 27 000 euros, pour pouvoir concourir. Une participation non-remboursable. Cette décision du bureau politique avait provoqué la colère des trois adversaires de Bédié qui dénonçaient une tentative pour les dissuader de se présenter.

"C’est une décision hallucinante…Une attitude méprisable, qui n’arrêtera cependant aucun candidat" avait déclaré Djédjé Mady à Jeune Afrique. Les trois adversaires de Bédié arriveront-il à réunir cette somme ? Du côté de KKB, on assure que c’est déjà fait. Les deux autres devraient aussi y parvenir… À moins qu’ils ne se décident tous les trois à présenter une candidature unique. À la question "l’un de vous pourrait-il se retirer de la course au profit d’un autre ?", Alphonse Djédjé Mady répond pour sa part : "Nous verrons bien. Ce n’est pas impossible."

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