Au Tchad, les jalons de la nouvelle République

À quelques jours du référendum constitutionnel prévu à la mi-décembre, Jean-Bernard Padaré, ancien conseiller à la présidence tchadienne, appelle ses compatriotes à voter massivement en faveur d’un État unitaire fortement décentralisé.

Le centre d’art et de musique lors de la cérémonie de clôture du « Dialogue national inclusif et souverain ». © Denis Sassou Gueipeur/AFP

Le centre d’art et de musique lors de la cérémonie de clôture du « Dialogue national inclusif et souverain ». © Denis Sassou Gueipeur/AFP

Jean-Bernard Padaré © DR
  • Jean-Bernard Padaré

    Ancien ministre d’État, conseiller à la présidence du Tchad, secrétaire général, deuxième adjoint et porte-parole du Mouvement patriotique du salut (MPS).

Publié le 10 décembre 2023 Lecture : 3 minutes.

Le 17 décembre 2023, le Tchad a rendez-vous avec son passé, son présent et son avenir. Son passé, pour en tirer les enseignements à partir desquels, dans les temps présents, nous répondrons aux défis auxquels nous sommes confrontés et poserons les jalons de l’avenir pour les générations présentes et futures.

Le choix citoyen attendu de chaque Tchadienne, de chaque Tchadien, dans les prochains jours, est capital en raison du contexte dans lequel sont sollicités leurs suffrages.

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En effet, nous devons avoir à l’esprit que nous sortons à peine d’une séquence historique au cours de laquelle le président Idriss Déby Itno a trouvé la mort, en avril 2021. Il aura fallu un sursaut patriotique des citoyens, dans leur diversité et dans leur complémentarité, pour conjurer le pire.

Crises, malentendus et crispations

Depuis lors, au-delà de nos appartenances politiques et de nos chapelles d’idées, nous avons fait le constat de la nécessité de bâtir un nouveau contrat social qui nous rendrait plus forts, d’une part face aux tentatives de déstabilisation extérieures, d’autre part en renforçant, à l’intérieur du pays, notre cohésion sociale et en donnant plus de vigueur à nos institutions, ainsi que par la mise en place de politiques publiques plus inclusives et plus redistributives.

C’est dans cette perspective que se sont tenues les assises du Dialogue national inclusif et souverain (DNIS), du 20 août au 8 octobre 2022 à N’Djamena. Parmi les résolutions majeures prises à l’issue de cette large concertation nationale figurait l’élaboration d’une nouvelle Constitution, soumise dans les prochains jours à référendum au peuple souverain. Nous y sommes !

Mais force est de reconnaître que le chemin qui nous a menés jusqu’à l’échéance de la prochaine consultation référendaire ne fut pas un long fleuve tranquille. Il fut jalonné de crises, de malentendus et de crispations que nous avons largement surmontés. Parce que le dialogue a prévalu, comme nous l’avons toujours appelé de nos vœux, au sein Mouvement patriotique du salut (MPS).

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Les autorités de la transition, sous la houlette du chef de l’État, Mahamat Idriss Déby Itno, n’ont guère ménagé leurs efforts en ce sens. Il en a d’ailleurs pris l’engagement dans son discours de clôture des assises du DNIS, en maintenant la main tendue à tous les Tchadiens de bonne volonté qui ont à cœur d’apporter leur pierre à la construction permanente de notre pays, un chantier pour lequel aucune contribution citoyenne n’est et ne sera jamais de trop. C’est pourquoi nous saluons la signature, le 31 octobre à Kinshasa, d’un ac­cord entre le gouvernement tchadien et le parti Les Transformateurs.

En quête de cohésion

Nous voici donc désormais à l’heure de l’adoption de ce nouveau contrat social, cette nouvelle Constitution qui sera la clé de voûte de nos futures institutions. Des divergences d’idées, certes légitimes, subsistent et se font entendre, çà et là, notamment sur la forme de l’État. Certains souhaitent voir le Tchad effectuer un saut quantique vers un État fédéral en lieu et place d’un État unitaire et décentralisé. C’est le lieu de rappeler à mes concitoyens cette sagesse de l’éminent constitutionnaliste français, Guy Carcassonne : « Une bonne constitution ne peut suffire à faire le bonheur d’une nation. Une mauvaise peut suffire à faire son malheur. »

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L’histoire des institutions nous enseigne qu’elles ne sont jamais figées et peuvent être réajustées au regard des conjonctures historiques. Une constitution répond à une préoccupation collective en un lieu et à un moment précis. Elle doit être révisée sans passion, avec tact et délicatesse, en s’arrimant à la conjoncture et aux réalités socioculturelles qui prévalent dans un État.

Le Tchad, comme nous l’évoquions précédemment, demeure un pays en quête de cohésion et du rassemblement optimal de ses énergies. Est-ce le moment de prioriser les forces centrifuges au détriment des forces centripètes ? Au Mouvement patriotique du salut, nous estimons que l’heure est davantage à la mobilisation des forces convergentes, qui n’ont pas forcément besoin d’être d’accord sur tout, car nous avons conscience que « c’est du frottement des cervelles que jaillit l’étincelle de lumière ».

Rassemblons-nous massivement autour de notre nouvelle Constitution avec, pour armature, un État unitaire fortement décentralisé, aussi bien par notre forte participation que par notre adhésion à notre nouvelle Loi fondamentale. Les institutions qui découleront du plébiscite de notre nouveau contrat social n’en tireront que plus de force et plus de légitimité, notamment lorsque viendra le moment des propositions et de la confrontation des projets de société. Vivement.

La Matinale.

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