Sénégal : Xuman et Keyti, à l’école du JT rappé

Lancé en avril par deux stars de la scène musicale locale, le Journal télévisé rappé a conquis téléspectateurs et internautes, et pourrait faire des émules dans les pays voisins.

Xuman bouscule les habitudes. © DR

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Publié le 7 décembre 2013 Lecture : 3 minutes.

Sénégal : à la recherche d’un second souffle
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Sénégal : à la recherche d’un second souffle

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"Bienvenue, installez-vous, on a des nouvelles pour vous. Il y en a des bonnes, il y en a des mauvaises, mais on a des nouvelles pour vous." C’est le lancement scandé par le rappeur Xuman, 39 ans, arborant dreadlocks et costume sombre. Quelques minutes plus tard, son comparse Keyti, 40 ans, qui assure la présentation en langue wolof, prend le relais. Depuis avril, les deux stars du rap tiennent en haleine les téléspectateurs. Pendant cinq minutes chacun, les nouveaux MC ("maîtres de cérémonie") de l’information épluchent les faits marquants de l’actualité politique, sociale et internationale, remastérisés avec une bonne dose d’humour, de flow et de musique. "Dakar est au ralenti, parce qu’il n’y a pas d’eau. On mange peu, on ne boit pas beaucoup, parce qu’il n’y a pas d’eau. Beaucoup de riz, pas de sauce, parce qu’il n’y a pas d’eau. Monsieur et Madame ne se touchent pas…" Voilà, par exemple, ce que Xuman déclamait, en septembre, commentant les coupures d’eau qui ont paralysé la capitale.

Huit jours à peine après sa naissance sur les réseaux sociaux, ce JT décalé et impertinent a séduit les responsables de la chaîne privée 2STV, qui lui ont très rapidement dégagé un temps d’antenne. "J’ai sauté sur l’occasion quand on me l’a proposé. C’est un projet novateur, original et plein d’humour", estime Jean-Louis Kahoury, le responsable des programmes de la chaîne, pour laquelle l’opération a été bénéfique en termes d’audience et d’image. Aïssata Sow, la soixantaine, mère de famille à la retraite, conquise, a suivi toutes les semaines la version en wolof présentée par Keyti : "C’est drôle et, pour moi, c’est aussi une source d’information, explique-t-elle. Car, même s’il n’entre pas dans le fond des sujets, ce journal me permet d’avoir une idée de ce qui s’est passé dans la semaine."

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Diffusé sur 2STV chaque vendredi soir après le journal traditionnel, et disponible le lendemain sur YouTube, le Journal télévisé rappé (JTR) de Xuman et Keyti attire un très large public, avec des dizaines de milliers de téléspectateurs, des internautes postant en continu sur Facebook et tweetant des commentaires sur les thèmes abordés dans les précédentes éditions.


Keyti, le présentateur partenaire de Xuman. © DR

Le 14 novembre était diffusé le 26e épisode, qui marque la fin de la première saison du JTR, mais Xuman et Keyti ne comptent pas s’arrêter là. Les deux rappeurs ont atteint leur objectif principal, qui était "d’intéresser les jeunes et les Sénégalais en général à l’actualité, en leur proposant un traitement de l’information plus ciblé". Ils ont désormais pour ambition de créer un JTR africain, "c’est-à-dire, de faire en sorte qu’il y ait un JTR dans plusieurs pays du continent", explique Xuman, assurant que beaucoup de rappeurs d’autres pays ont déjà manifesté leur intention d’y participer. "C’est un créneau que nous comptons exploiter", ajoute-t-il. Pour la fin de la première saison, le Guinéen Mister X et le Mauritanien Tibou se sont déjà invités dans le JTR. Dans la peau de journalistes correspondants, les deux rappeurs ont décortiqué l’actualité de leurs pays respectifs, des événements politiques aux faits divers.

Le 14 novembre était diffusé le 26e épisode, qui marque la fin de la première saison du JTR, mais Xuman et Keyti ne comptent pas s’arrêter là.

En attendant de trouver des sponsors, qui tardent encore à se manifester, Xuman et Keyti envisagent de faire du JTR un véritable modèle économique en constituant une petite rédaction, composée de techniciens, caméramans et de journalistes-MC à plein temps. On peut être impertinent et… ambitieux.

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