Golfe de Guinée : la sûreté maritime est aussi une question terrestre

Depuis plusieurs années, les menaces observées dans les eaux du golfe de Guinée se sont concentrées autour des phénomènes de piraterie, de vols à main armée, de trafics en tout genre ou de pêche illégale.

Les actes de piraterie se sont accrus de 76% dans le golfe de Guinée en 2016. © Mate 2nd Class Michael Sandberg / U.S. Navy photo Public Domain

Les actes de piraterie se sont accrus de 76% dans le golfe de Guinée en 2016. © Mate 2nd Class Michael Sandberg / U.S. Navy photo Public Domain

HAROPA – Alain LECLERE
  • Alain Leclère

    Directeur du cabinet de conseil en sûreté Surteo, consultant auprès de l’Organisation maritime internationale

Publié le 6 décembre 2017 Lecture : 3 minutes.

Deux Marocains devant le port Tanger Med après son inauguration en 2007. (photo d’illustration) © Abdeljalil Bounhar/AP/SIPA
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Ce sont 36 attaques que le Bureau maritime international a recensées pour 2017. Un chiffre en diminution par rapport à 2016, qui place néanmoins le golfe de Guinée parmi les régions maritimes les moins sûres du globe.

Les pays riverains se sont très tôt organisés pour lutter conjointement contre ces phénomènes qui pénalisent leurs économies. Cette coopération régionale s’est notamment caractérisée à travers le Code de conduite de Yaoundé, adopté en 2013 par vingt-cinq États d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale.

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Cet accord visait à promouvoir et à organiser la coopération régionale en matière de prévention et de répression des actes illicites commis en mer dans le golfe. Malgré certaines réalisations concrètes, comme l’implantation du Centre interrégional de coordination à Yaoundé ou les centres régionaux de sécurité maritime d’Abidjan ou de Pointe-Noire, des difficultés persistent du fait, par exemple, du déficit de législation spécifique à de nombreux États de la région en matière maritime.

Interventions militaires

D’autres difficultés, liées aux frontières maritimes, au droit de poursuite en mer dans les eaux des États voisins ou encore au manque de moyens, n’ont pas permis d’endiguer de manière aussi importante que souhaité les menaces existantes.

Cependant, un certain nombre d’initiatives internationales se sont développées, comme des programmes annuels d’assistance de l’Organisation maritime internationale. Des exercices entre les marines occidentales (États-Unis, France…) et celles des États du golfe de Guinée sont régulièrement organisés afin de développer, au-delà des missions de surveillance et d’intervention sur le plan d’eau par les marines étrangères, les compétences des forces locales ou une meilleure coordination.

De nombreux navires préfèrent attendre au large de Lomé avant de se diriger vers les ports devant les servir

Les autorités de certains pays comme le Cameroun ou le Togo se sont davantage impliquées en considérant ces phénomènes comme prioritaires. Les actions menées ont ainsi rendu particulièrement sûres les eaux nationales togolaises qui ont ainsi vu leur fréquentation augmenter sensiblement. De nombreux navires préfèrent attendre au mouillage au large de Lomé avant de se diriger vers les ports devant les servir.

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Surveillance terrestre

Pour autant, la seule approche maritime ne saurait suffire pour lutter durablement contre les différentes menaces auxquelles sont confrontés les États. Ces actes de piraterie ou de vol servent des intérêts criminels qui naissent et se développent à terre.

La sûreté maritime se défend en mer mais ne trouvera une réponse que si elle est envisagée de façon globale, c’est-à-dire en prenant en compte non seulement les dimensions portuaires, mais aussi celles du transport terrestre. C’est parce que les États seront en mesure de maîtriser leurs espaces à terre (lutte contre les réseaux criminels, politiques de développement…) que les actes de malveillance diminueront en mer. Sans cette prise en compte terrestre, la lutte ne se focalisera que sur les conséquences et non sur les causes.

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Mettre la sécurité au cœur des préoccupations

Il convient donc de dépasser le strict cadre des réglementations existantes pour intégrer la sûreté maritime dans une stratégie globale de sûreté de la chaîne logistique.

La sûreté des emprises portuaires doit être un axe du développement des pays du golfe de Guinée

Ces solutions ne peuvent se limiter au seul renforcement des moyens. Si ces derniers sont évidemment indispensables dans la résolution des problèmes rencontrés, il convient également de considérer la sûreté comme un axe à part entière dans les stratégies globales des acteurs portuaires et maritimes, au même titre que la qualité ou les efforts environnementaux.

La sûreté des emprises portuaires, véritables poumons économiques des pays du golfe de Guinée, doit être un axe de leur développement. L’attractivité et la fiabilité des ports passent immanquablement par une approche sécuritaire dynamique, constamment adaptée à l’évolution de la menace, transformant ainsi une contrainte en atout et faisant de la sûreté un élément de la qualité de service attendue par les acteurs maritimes.

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