Défense : Euronaval 2014, vers la marine africaine du futur

L’édition 2014 du salon de la défense navale, Euronaval, s’est tenue au Bourget du 27 au 31 octobre. Compte-rendu par Laurent Touchard*.

L’édition 2012 du salon de la défense navale, Euronaval, au Bourget. © Joel Saget AFP/AFP

L’édition 2012 du salon de la défense navale, Euronaval, au Bourget. © Joel Saget AFP/AFP

Publié le 12 novembre 2014 Lecture : 4 minutes.

*Laurent Touchard travaille depuis de nombreuses années sur le terrorisme et l’histoire militaire. Il a collaboré à plusieurs ouvrages et certains de ses travaux sont utilisés par l’université Johns-Hopkins, aux États-Unis.

Riche en présentations de navires, armes et équipements développés depuis le précédent opus en 2012, Euronaval 2014 s’est tenu au Bourget, près de Paris du 27 au 31 octobre. Il a vu les industriels du secteur naval militaire et les marines présenter leurs projets les plus aboutis, les matériels entrés en service récemment ou ceux qui sont sur le point d’être adoptés y compris au sein de forces africaines.

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Défis sur mer

Fort logiquement pour une manifestation de ce genre, les innovations technologiques ont été mises en valeur. Cependant, le salon ne se résume pas à cela. Loin s’en faut. Ainsi, la problématique de l’adaptation aux nouveaux enjeux de sécurité et les solutions économiques de modularité pour des marines aux budgets souvent limités constituaient d’autres aspects de cette manifestation. En témoigne la présentation du nouveau système d’armes Sea Cat de 20 mm de la famille Hitrole, par Finmeccanica – OTO Melara.

Modeste, la présence africaine n’en était pas pour autant anecdotique. De fait, l’amiral Bara Cissoko, chef de la marine sénégalaise, s’est illustré au cours d’une table ronde sur les "enjeux de la sécurité et de la défense en mer à l’horizon 2025". L’amiral y a judicieusement rappelé le vaste spectre des menaces maritimes qui pèsent sur l’Afrique et, par extension, les défis auxquels sont – ou pourraient être – confrontés les pays du continent.

Ces défis se déclinent en lutte contre les trafics divers, et en sécurisation des voies commerciales tout spécialement contre la piraterie. Ils impliquent le contrôle légitime des ressources naturelles qui peuvent susciter des tensions interétatiques. Des dangers immédiats qui appellent une grande souplesse dans leur appréhension en terme de doctrines stratégiques et opératives ainsi qu’en termes d’acquisition de matériel ; qui exigent aussi des capacités d’anticipation face aux périls susceptibles d’émerger dans le futur.

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Cohérence algérienne

Dans la foulée du salon, l’Algérie a signé un contrat pour la fabrication de neuf MCMV (mine countermeasures vessel – dragueurs de mines) italiens. Ces bâtiments permettent de repérer et de neutraliser les mines navales. Bien utilisées, celles-ci sont redoutables pour les activités commerciales maritimes. En outre, elles peuvent bloquer la sortie des sous-marins et des navires militaires de leur base.

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A quoi bon disposer d’une marine musclée si elle est neutralisée de facto par quelques mines bon marché ? L’achat de MCMV est donc judicieux, s’inscrivant dans le processus de montée en puissance de la marine algérienne (navire d’opérations amphibies Kalaat Béni Abbès, deux frégates allemandes Meko A200, corvettes chinoises C28A modifiées avec des équipements occidentaux, et possiblement deux sous-marins Kilo supplémentaires…).

Contrats et perspectives

L’idée de "guerre froide" n’est pas "politiquement correcte". Il n’en reste pas moins qu’une impalpable défiance régnait autour des emplacements russes au Bourget, excentrés et finalement relativement peu visités en dépit d’intéressants modèles exposés. Figurait en particulier une maquette de submersible de la classe Projet 677 Lada connu dans sa version d’exportation en tant que classe Amur 1650. Ce dernier a été suggéré au Maroc par la Russie tandis que le Projet 677 dispose de tous les atouts pour attirer l’attention des autorités algériennes ou égyptiennes. Tout comme les petits et discrets sous-marins côtiers Piranha (même classe que ceux aperçus récemment sur les côtes suédoises) ou Piranha-T.

Le climat de refroidissement des relations Occident – Russie n’a pas empêché le responsable de la délégation russe, Anatoly Punchuk, d’évoquer des travaux communs avec le Brésil, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. Des discussions sont en cours entre les deux pays tandis que Moscou a été invité par Pretoria à répondre à un appel d’offre quant à un navire de surveillance pour la marine sud-africaine. Enfin, l’Angola, le Mozambique et le Congo portent de l’intérêt aux patrouilleurs et missiles russes réputés moins onéreux (les corvettes Tigr ou Tornado et leur armement puissant). Toutefois, d’autres pays à l’instar de Singapour, de la Corée du Sud ou encore de l’Inde offrent des alternatives intéressantes, idem pour l’Europe, à commencer par la France.

Citons le patrouilleur OPV 70 de Raidco pour la marine marocaine ou l’OPV 45 du Sénégal après l’acquisition d’un RPB 33. Séries à succès puisque le Togo a, pour sa part, acheté deux RPB 33 et un OPV 45 et que Raidco, via les chantiers navals STX proposent tout un panel de choix aux marines "à petit budget". Mais surtout, citons le futuriste trimaran de patrouille Ocean Eagle 43 des Constructions Mécaniques de Normandie (CMN), dont le Mozambique a commandé trois exemplaires qui seront livrés en 2015 (sur un total de 30 bateaux divers pour un coût de 200 millions de dollars). Il s’agit-là de moyens indispensables pour lutter contre la piraterie le long des côtes mozambicaines, capables d’embarquer un drone aérien.

L’Afrique se dote elle aussi de flottes du futur…

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>> Retrouver tous les articles du blog défense de Laurent Touchard sur J.A. 

>> Pour en savoir plus : consulter le blog "CONOPS" de Laurent Touchard

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