« Centres de débarquement » : le Maghreb dit « non » à l’Europe
Algérie, Maroc et Tunisie ont fait savoir qu’ils refusaient d’accueillir les « plateformes régionales de débarquement » préconisées par les pays membres de l’Union européenne.
« Nous n’avons pas encore été démarchés, mais pour nous, c’est non », souffle un cadre du ministère tunisien des Affaires étrangères à propos des « centres de débarquement » que l’Union européenne souhaiterait créer hors de son territoire. À quelques jours d’écart, Maroc, Algérie et Tunisie viennent de refuser l’idée d’accueillir de tels lieux sur leur territoire.
Des refus en amont
Réunis à Bruxelles, les membres de l’Union européenne (UE) ont adopté dans la nuit du 28 au 29 juin un accord qui appelle à « explorer rapidement » l’idée – aux contours encore flous – de « plateformes régionales de débarquement » hors d’Europe. Leur idée serait d’y placer des migrants secourus en mer. Avant même l’adoption du texte, deux pays ont indiqué qu’il était hors de question pour eux d’accueil de tels centres : l’Algérie et le Maroc.
« Cela ne correspond pas aux pratiques tunisiennes et il serait étonnant que les États européens ne le sachent pas », continue notre source tunisienne. Une source à Bruxelles a indiqué à l’Agence France-Presse que la Tunisie faisait partie des lieux envisagés, tout comme la Libye, toujours en proie à des troubles sécuritaires. Notre source tunisienne assure enfin « qu’aucune concertation n’a eu lieu avec les autres pays du Maghreb pour ces refus de principe ».
Des ministres clairs
Personne, au ministère marocain des Affaires étrangères, ne souhaite pour l’heure préciser si le royaume a reçu des demandes européennes explicites. Mais le ministre Nasser Bourita s’est fait clair et précis sur la question, le 28 juin, devant son homologue espagnol Josep Borrell, en visite à Rabat, dénonçant des « solutions faciles » et des « mécanismes contre-productifs. »
Abdelkader Messahel, le chef de la diplomatie algérienne, a quant à lui exclu devant la presse étrangère l’ouverture « d’une quelconque zone de rétention ». « Nous sommes déjà confrontés au même problème, expliquait le ministre des Affaires étrangères. Nous procédons à des reconductions mais nous le faisons selon des arrangements que nous avons avec nos pays voisins ».
Le même considère que le problème doit être traité de façon bilatérale ou, à défaut, dans le cadre onusien : « Je ne m’intéresse pas directement à ce que les Européens peuvent faire, c’est leur affaire. Je crois que les Européens ont suffisamment de capacités, de moyens et d’imagination pour gérer ce genre de situation. »
Mais les 28 états européens ne font pas seulement face à un refus maghrébin. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a estimé ce 29 juin que les centres de gestion des demandeurs d’asile devaient être situés en Europe, et non à l’étranger. Pour l’OIM, l’idée d’ouvrir des plateformes de débarquement en Libye représenterait un gros risque, compte tenu de la situation sécuritaire. Par le passé, les Nations Unies ont déjà directement dénoncé la coopération entre l’UE et la Libye en matière de politique migratoire.
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