« Pays de merde » : merci Monsieur Trump !

L’excentrisme comportemental, la mégalomanie offensante et la rhétorique triviale de l’actuel locataire de la « Maison Blanche » outrepassent les principes traditionnels du politiquement correct.

Le président américain Donald Trump à l’entrée de Air Force One, le 12 janvier 2018. © Andrew Harnik/AP/SIPA

Le président américain Donald Trump à l’entrée de Air Force One, le 12 janvier 2018. © Andrew Harnik/AP/SIPA

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  • Aboubacar Zerbo

    Aboubacar Zerbo est spécialiste en management de l’achat international et en ingénierie logistique, diplômé de l’École de Management de Bordeaux (BEM/Bordeaux) et de l’ESTIA (École Supérieure des Technologies Industrielles Avancées) de Bayonne.

Publié le 29 janvier 2018 Lecture : 3 minutes.

[TRIBUNE] Ils dérogent aux règles protocolaires élémentaires de la diplomatie, démystifient et démythifient l’auguste fonction présidentielle, à laquelle sont fortement inhérentes les nobles notions de sérénité, respect et maîtrise de soi, bienveillance dans le propos et élégance dans la gestuelle. Impulsif et imprévisible, le président Trump fruste ses interlocuteurs, indigne la majorité de ses compatriotes, et suscite l’ire de certaines populations, notamment celles du continent, qui virent leurs États qualifiés de « pays de merde » par le détenteur du « bureau ovale ».

Sans occulter le caractère pervers de cette allégation, sans faire fi de l’arrière goût amer et ignoble de cette expression injurieuse pour les tympans non seulement des Africains mais aussi, de tous les défenseurs des droits de l’Homme, cette affirmation se révèle pertinente, pédagogique et révélatrice de l’image que certains mortels nourrissent à l’égard du berceau de l’humanité.

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De prime abord, le président Trump n’a fait que dire « tout haut ce que beaucoup en ce monde pensent tout bas ». En effet, la majorité de ceux qui ne connaissent l’Afrique qu’à travers leur petit écran, et qui y visionnent les sempiternelles scènes de famines, de guerres, de misères, d’épidémies et d’enfants rachitiques suçant le sein de leurs mères faméliques, conçoivent l’Afrique comme un continent constitué de « pays de merde ». Monsieur Trump est le parangon parfait et le porte-parole autoproclamé de cette catégorie du commun des mortels qui, incultes et ignares en histoire, géographie et géopolitique, bornent la planète terre aux frontières de leur chétive nation.

Le mot ‘Tiens’, à force d’être ressassé, finit toujours par lasser celui qui le dit

Ensuite, en aspirant avec opiniâtreté rejoindre le Nouveau monde et le Vieux continent ; en exhibant leur dénuement, en brandissant leur pauvreté comme un étendard afin de susciter la pitié des Occidentaux, certains Africains noirs, sans même le savoir, leur instruisent implicitement et leur montrent tacitement qu’ils sont natifs d’une terre où les pays sont des « pays de merde », d’où leur obstination à s’exiler. Sinon, pourquoi tant risquer sa vie ? Enfin, un adage du « Pays des hommes intègres » dit ceci : « Le mot ‘Tiens’, à force d’être ressassé, finit toujours par lasser celui qui le dit ». À ce propos, à force de toujours dire à des pays indépendants depuis 60 ans : « Tiens ça comme aide public au développement » ; ou « Tiens ça pour organiser tes élections » ; ou encore « Tiens ça pour ta défense et ta sécurité », les éternels pays donateurs finissent par se lasser des éternels pays assistés. Et, un beau jour, un des dirigeants des pays bienfaiteurs, lassé d’être toujours sollicité par ces pays nécessiteux, traitera ces derniers de « pays de merde ». Et c’est ce qui arriva avec Monsieur Trump.

Un autre proverbe burkinabè affirme ceci : « Mieux vaut un ennemi qui te dit clairement que tu as une mauvaise haleine, qu’un bon ami qui te conseille gentiment de fermer ta bouche ». Alors, remercions Monsieur Trump pour sa franchise et son courage de dire aux pays d’Afrique ce qu’il pense réellement d’eux, surtout que pendant longtemps, l’Afrique a été la proie facile de dirigeants laudateurs et autres personnalités thuriféraires de tout acabit dont le seul objectif visé derrière leurs discours louangeurs étaient de l’aguicher afin de lui spolier ses richesses. Que l’Afrique se mette au travail, qu’elle mette son capital humain et ses ressources naturelles, minières et énergétiques au service de son développement et du bien-être de ses populations. Qu’elle arrête surtout instinctivement et machinalement de toujours tendre la main, et qu’elle discute avec le monde occidental, « non pas comme un mendiant, mais comme un partenaire ».

C’est à ce seul prix que le « beau berceau de l’humanité » retrouvera alors sa dignité et sa fierté, et plus jamais, personne ne traitera ses États de « pays de merde ».

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Vive l’Afrique.

Que Dieu bénisse l’Afrique !

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