À Brazzaville, le festival du rire tuSeo veut « redonner le sourire aux Congolais »

Vivier de jeunes humoristes, la 15e édition du festival international du rire de Brazzaville, tuSeo, se déroulera du 24 au 26 octobre 2019 à l’Institut français du Congo (IFC) et au Centre culturel russe. Comédiens, musiciens, plasticiens ou danseurs, ce rendez-vous international accueillera des artistes venus de plus de quinze pays.

Bikouta Laureathe, directrice du Festival tuSéo, et la présentatrice. © Baudouin MOUANDA

Bikouta Laureathe, directrice du Festival tuSéo, et la présentatrice. © Baudouin MOUANDA

Publié le 23 octobre 2019 Lecture : 4 minutes.

TuSeo signifie « éclats de rire » en lari (langue du sud du Congo). C’est aussi le surnom que l’on donne traditionnellement à une femme joviale dans les régions du sud, à l’image de la fondatrice de ce rendez-vous culturel, Lauryathe Bikouta. La comédienne, qui a créé le festival en 2004 « pour redonner le sourire aux Congolais », se plaît à souligner que « tuseo veut aussi dire “Rassemblons-nous, réunissons-nous” ».

De fait, chaque année, en octobre, le festival international du rire de Brazzaville donne l’occasion à des milliers de ses compatriotes, petits et grands, venus en famille pour la plupart, de se réunir pour rire et sourire. Devenu un tremplin pour de nombreux humoristes du continent, tuSeo a permis à plusieurs talents congolais d’émerger, comme le Ponténégrin Gaëtan Donald Titus Makosso Taty – alias Titus Kosmas –, qui a fait ses premières armes sur scène lors de l’édition de 2012. À tel point qu’aujourd’hui des dizaines de jeunes comédiens espèrent embrasser la même carrière.

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Comédiens, musiciens, danseurs…

Lorsqu’elle a décidé d’organiser la première session de tuSeo pour donner un espace d’expression aux humoristes, Lauryathe Bikouta a, dès le départ, pris le parti de créer un festival multidisciplinaire, multi-art, donnant une place centrale au rire, mais aussi un rendez-vous international avec, notamment, la participation d’humoristes de la République démocratique du Congo (RDC) voisine. Désormais, l’événement accueille des artistes venus de plus de quinze pays, des humoristes mais aussi des comédiens de théâtre, des plasticiens, des musiciens, des danseurs…

Déplacer les foules et les faire venir dans une salle pour rire, c’est quelque chose de nouveau

L’image et le rôle des humoristes ont par ailleurs beaucoup évolué. « Auparavant, ils étaient assimilés aux artistes de rue, déguisés et grimés avec de la poudre blanche, rappelle Lauryathe Bikouta. Et pendant longtemps, ils ne servaient qu’à divertir le public en attendant que le rideau se lève sur des spectacles musicaux, des pièces de théâtre… Aujourd’hui, c’est le contraire. Ce sont les musiciens qui négocient un passage au Festival tuSeo. »

Stand-up

Le type d’humour s’est également transformé, prenant le plus souvent la forme du stand-up, et les organisateurs se montrent de plus en plus exigeants sur les textes, les thèmes abordés et la qualité des spectacles. Car, en quinze ans, le public a lui aussi changé. « Déplacer les foules et les faire venir dans une salle pour rire, c’est quelque chose de nouveau », souligne Lauryathe Bikouta. Une évolution appréciée des jeunes artistes qui, le reste de l’année, doivent le plus souvent négocier des passages avec des promoteurs de scène ou d’événements culturels informels pour pouvoir jouer… « L’adhésion du public est massive, reconnaît le comédien Nazaire Kiouari. Ces trois dernières années, on a joué à guichets fermés. Et le public fait de plus en plus confiance aux humoristes locaux. »

Du 24 au 26 octobre, tuSeo se déroulera à l’Institut français du Congo (IFC) et au Centre culturel russe, avec pour invités d’honneur deux icônes congolaises du théâtre, Germaine Ololo et Kaba Ndudi, et une pléiade d’artistes venus de pays d’Afrique centrale, d’Afrique de l’Ouest (Guinée, Bénin, Togo), de Mauritanie, d’Espagne et de France.

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Pendant trois jours vont s’enchaîner les spectacles, les master class, les ateliers de stand-up, les sessions d’improvisation, les conférences, les expositions d’arts plastiques, les projections, sans oublier les ateliers techniques. Qui rappellent que le festival a suscité les vocations d’une génération de techniciens des régies son et lumière, si utiles aux différents métiers du spectacle. Un rendez-vous brazzavillois où l’humour n’a vraiment rien d’un art qui ne sert à rien.

Naz-R, subtil et décapant

Nazaire Kiaouri,le 28 juillet. © Baudouin Mouanda pour JA

Nazaire Kiaouri,le 28 juillet. © Baudouin Mouanda pour JA

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Celui qui faisait rire sa famille, ses camarades d’école et ses collègues s’est finalement décidé à faire de son talent naturel son métier. Nazaire Kiouari a suivi des études de journalisme à l’université Marien-Ngouabi de Brazza et de communication d’entreprise à l’Escom de Dakar avant d’embrasser une carrière de journaliste radio et « mojo » (« journaliste mobile »).

C’est après avoir participé à un atelier de comédie, animé par l’humoriste camerounais Valéry Ndongo lors du Festival tuSeo de 2014 – qui l’a sacré « révélation de l’année » –, qu’il choisit de poursuivre son aventure sur les planches en prenant pour nom de scène Naz-R, tout en continuant à travailler en tant que journaliste polyvalent pour radio Mucodec.

C’est dans un style à la fois subtil et décapant que ce grand admirateur de Titus Kosmas (repéré quelques années avant lui grâce au même festival), fin observateur, revient sur les aléas des transports en commun, dépeint les charmes de la vie de couple ou compare les us et coutumes des militaires congolais et français – un sketch que le public lui réclame à chaque représentation.

Bluetooth, drôle de dame

Stéphanie Divine Poumou alias Bluetooth © Mercier Classpro

Stéphanie Divine Poumou alias Bluetooth © Mercier Classpro

La jeune comédienne Stéphanie Divine Poumou, alias Bluetooth, s’est tournée vers la carrière d’humoriste à la fin de 2016, à la suite de sa participation à l’émission « Comedy Battle Revelation », un concours diffusé sur la chaîne locale Digitale radio et télévision (DRTV). La drôle de dame se met alors au stand-up et rejoint la troupe du Brazza Comedy Show – le BCS, un collectif d’une cinquantaine d’humoristes et de comédiens formés il y a cinq ans, à l’image du Jamel Comedy Club – avant de faire ses premières scènes en solo.

Ses sketches sur la vie quotidienne des Brazzavillois et son sens de l’autodérision font mouche

Ses sketches sur la vie quotidienne des Brazzavillois et son sens de l’autodérision font mouche. Habituée ces deux dernières années à assurer les premières parties, l’étoile montante Bluetooth, tout juste 18 ans, prend de la hauteur. Elle a présenté son one-woman-show le 14 septembre à Brazzaville et elle sera ce mois-ci au Festival tuSeo avant d’aller jouer, en novembre, à l’Africa Stand Up Festival, autre incontournable rendez-vous de l’humour en Afrique centrale, lancé à Douala par l’humoriste camerounais Valéry Ndongo.

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