En pleine répression, la Gambie célèbre ses cinquante ans d’indépendance dans la terreur

« Jammin with Jammeh » ? Pas vraiment… Le dictateur gambien et les membres de son régime sont bien les seuls à célébrer, ce mercredi 18 février, les cinquante ans d’indépendance de la Gambie et leurs vingt ans au pouvoir. Terrifiés par des arrestations et détentions arbitraires qui se multiplient depuis le coup d’État manqué du 30 décembre 2014, les Gambiens n’ont pas vraiment le cœur à la fête.

Yahya Jammeh dirige la Gambie d’une main de fer depuis le coup d’État de 1994. © AFP

Yahya Jammeh dirige la Gambie d’une main de fer depuis le coup d’État de 1994. © AFP

Publié le 18 février 2015 Lecture : 2 minutes.

Les organisations des droits de l’Homme l’avaient prévu. Fidèle à sa réputation, Yahya Jammeh l’a fait. Plus d’un mois après le putsch avorté du 30 décembre, les Gambiens vivent toujours dans la peur des représailles du pouvoir. Le président-dictateur-guérisseur, qui accuse les puissances étrangères d’avoir commandité le coup d’État, cherche désormais d’éventuels complices au sein de l’armée et de la population civile : amis et parents des personnes soupçonnées d’être impliquées dans l’affaire ainsi que des officiers sont victimes d’arrestations et de détentions "arbitraires", selon les ONG de défense des droits de l’homme.

Au total, Amnesty International dénombrait déjà à la mi-janvier, "une trentaine de personnes arrêtées et maintenues en prison sans inculpation." Puis "quelques unes ont été relâchées mais, indique François Patuel, chargé de campagne de l’ONG, il y a eu d’autres arrestations par la suite." Selon ce chercheur, au moins six membres des forces armées gambiennes sont également en détention. "On ignore depuis quand ils sont détenus et dans quelles conditions", ajoute-t-il.

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>> Lire aussi : les détails du putsch manqué selon le FBI américain

Pas de justice équitable

La presse gambienne rapporte que ces soldats, pour la plupart des officiers, sont traduits discrètement devant une Cour martiale depuis le mardi 10 février. Parmi eux, Modou Njie, ancien soldat de l’armée gambienne, capturé lors du coup d’État. Quels risques encourent ces hommes ? "La prison, mais surtout la condamnation à mort pour trahison", répond Oumar Diallo, directeur exécutif de la Société internationale pour les droits de l’Homme/Sénégal. Pour lui, on ne peut espérer une justice équitable en Gambie : "Les détenus ne peuvent pas accéder à un avocat et les magistrats sont en majorité des étrangers (ghanéens, sierra léonais) sous contrat et à la solde de Jammeh", dénonce-t-il.

De Dakar à Banjul, plus personne ne doute de la brutalité du président Jammeh, au pouvoir depuis un coup d’État en 1994. N’a-t-il pas fait fusiller, par exemple, neuf condamnés à mort sur 47 – dont deux Sénégalais – dans la nuit du 23 au 24 août 2012 ? Quant aux parents des victimes du putsch, ils n’ont pas pu faire leur deuil. D’après le secrétaire général de la Raddho, Aboubacry Mbodj, Jammeh refuse toujours "de livrer la dépouille des personnes tuées" lors des combats du 30 décembre. Les chefs d’État mauritanien, guinéen, bissau-guinéen, et sénégalais, conviés à la célébration des 50 ans de l’indépendance de la Gambie, le 18 février, pourront-ils faire revenir Jammeh à la raison ? Encore faudrait-il qu’ils honorent leur invitation.

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Yakhya Massaly
 

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