Présidentielle Algérie 2019
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2020, une année pour réinventer l’Afrique

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Politique

Ces Africains qui vont faire 2020

De la politique à l’économie en passant par la culture et le monde des médias, « The Africa Report », la publication anglophone du groupe Jeune Afrique, a sélectionné 28 personnalités africaines influentes à suivre en 2020 dans les cinq grandes régions du continent.

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Par - avec The Africa Report
Mis à jour le 10 janvier 2020 à 17:31

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AFRIQUE DU NORD

• Égypte : Mohamed Ali, un entrepreneur en politique

Mohamed Ali, un entrepreneur du BTP réfugié en Espagne. © Felipe Dana/AP/SIPA

Mohamed Ali, un entrepreneur du BTP réfugié en Espagne. © Felipe Dana/AP/SIPA

Avec en toile de fond la domination du président Abdel Fattah al-Sissi, en grande partie non contestée par une opposition écrasée et divisée par le parti au pouvoir, l’entrepreneur en construction basé en Espagne Mohamed Ali a émergé en 2019 comme une figure de protestation contre la corruption et les dépenses du gouvernement concernant de vastes projets non destinés à améliorer les conditions de vie des Égyptiens.

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En réponse, Sissi a défendu la construction de palais présidentiels dans un contexte de crise économique et son gouvernement a arrêté plus de 2 000 personnes. L’année 2020 montrera si Ali et d’autres peuvent profiter de l’élan de contestation pour faire pression sur l’administration du Caire afin qu’elle soit plus à l’écoute des besoins réels du peuple égyptien.

• Maroc : Mostafa Terrab, une croissance tous azimuts

L’année 2020 sera une grande année pour le patron de l’Office chérifiens des phosphates (OCP) qui fêtera son centenaire en août tout en poursuivant un plan majeur d’expansion africaine avec des projets en Éthiopie et au Ghana, entre autres. Mostafa Terrab fait également partie d’une commission gouvernementale chargée de plancher sur un nouveau modèle de développement pour le pays.

Mostafa Terrab PDG de L'Office Chérifien des Phosphates (OCP) © Alexandre Dupeyron pour JA ;

Mostafa Terrab PDG de L'Office Chérifien des Phosphates (OCP) © Alexandre Dupeyron pour JA ;

Sur le front de l’agro-industrie, il a pris la direction de l’Association internationale des engrais à la mi-2019, devenant ainsi le premier Africain à occuper ce poste. Il supervise également un investissement de 1,5 milliard de dollars prévu au Nigeria, ce qui aidera l’OCP à surmonter la menace que fait peser sur ses activités l’interdiction par le gouvernement de Muhammadu Buhari d’importer des engrais chimiques NPK.

• Tunisie : Noureddine Taboubi, l’allié des travailleurs

Noureddine Taboubi au siège du syndicat. © MOHAMED HAMMI/SIPA

Noureddine Taboubi au siège du syndicat. © MOHAMED HAMMI/SIPA

Le secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) jouera un rôle crucial dans les négociations pour redresser l’économie en 2020 sous la présidence de Kaïs Saïed, nouvellement élu. L’UGTT continue de peser dans les débats politiques importants, et son rôle après la chute de Zine el-Abidine Ben Ali en 2011 lui a valu un prix Nobel de la paix dans le cadre du Quartet, un groupe d’acteurs qui ont aidé le pays à éviter une catastrophe.

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Taboubi lutte contre la corruption et protège les intérêts des travailleurs, tandis que Tunis travaille avec le Fonds monétaire international pour réduire le déficit. Des grèves massives pourraient être à l’ordre du jour si l’UGTT estime que le Tunisien lambda doit faire des sacrifices importants pour le redressement de l’économie.

• Soudan : Oussama Daoud Abdellatif, argent et médiation

Le président du conglomérat DAL Group est l’un des hommes les plus riches du pays. Il se sert de sa position pour faciliter la transition qui a commencé avec la destitution du président de l’époque, Omar el-Béchir, en avril 2019. Abdellatif a fait partie de l’équipe de médiation qui a convaincu le Conseil militaire de transition d’accepter les demandes de la coalition civile d’opposition des Forces de liberté et de changement, laquelle dirige actuellement le gouvernement de transition qui espère organiser des élections.

Avec des réformes difficiles à l’horizon, le nouveau gouvernement devrait se tourner vers Abdellatif pour qu’il utilise ses réseaux internationaux afin d’aider à maintenir l’économie à flot. Mais certains dans l’opposition avertissent que Khartoum devrait se méfier de sa proximité avec des hommes d’affaires qui ont leurs propres intérêts économiques à protéger.

• Algérie : Riyad Mahrez, un renard dans la City

Riyad Mahrez sous les couleurs de Manchester City, évoluant dans la Premier League anglaise. Ici le 21 décembre 2019 contre Leicester © Rui Vieira/AP/SIPA

Riyad Mahrez sous les couleurs de Manchester City, évoluant dans la Premier League anglaise. Ici le 21 décembre 2019 contre Leicester © Rui Vieira/AP/SIPA

La star algérienne de football, capitaine de sa sélection et joueur de Manchester City, s’est illustré en remportant la Coupe d’Afrique des Nations 2019 avec les Verts. S’il n’a pas remporté le prix de meilleur joueur africain de l’année remis par la CAF, attribué au Sénégalais Sadio Mané, il lorgne désormais la Ligue des champions depuis qu’il a mis fin à son parcours à Leicester.

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Il a déménagé à Manchester City en 2018 pour ce qui était alors un record de transfert pour le club à 60 millions de livres sterling. Après un léger passage à vide, le milieu de terrain est en train de reprendre confiance en lui et a encore sans doute beaucoup d’avenir au plus haut niveau européen.

AFRIQUE DE L’OUEST

• Côte d’Ivoire : Guillaume Soro, objectif 2020

Guillaume Soro, ex-président de l'Assemblée nationale ivoirienne, à Abidjan, le 21 novembre 2018. © Issam Zelji/TRUTHBIRD MEDIAS pour JA

Guillaume Soro, ex-président de l'Assemblée nationale ivoirienne, à Abidjan, le 21 novembre 2018. © Issam Zelji/TRUTHBIRD MEDIAS pour JA

Ancien président de l’Assemblée nationale et chef rebelle des Forces Nouvelles, Guillaume Soro a rompu avec ses anciens alliés du gouvernement et se présente seul à la présidentielle de 2020. Alors que les années de guerre civile sont encore dans tous les esprits, il a déclaré en novembre : « Mon pays, la Côte d’Ivoire, risque de brûler à nouveau ».

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En cause, selon lui : les manœuvres du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix, parti du président ivoirien Alassane Ouattara, pour garder le pouvoir. Aucun des principaux partis n’ayant toutes les chances d’obtenir la majorité des voix au premier tour, la capacité à former une alliance devrait être déterminante pour déterminer qui dirigera le pays au cours des cinq prochaines années.

Fin décembre, la justice ivoirienne a émis un mandat d’arrêt international contre Guillaume Soro pour « tentative de déstabilisation » et « détournement de deniers publics ». Après son retour avorté en Côte d’Ivoire, l’ancien président de l’Assemblée nationale a promis « d’organiser la résistance » au président Alassane Ouattara depuis Paris.

• Liberia : Jewel Howard Taylor, une partenaire problématique

La vice-présidente et ancienne épouse du seigneur de guerre Charles Taylor est sur la sellette, en particulier après l’annonce surprise du président George Weah, en septembre 2019, de son soutien à une commission de vérité et de réconciliation et à un tribunal pour crimes de guerre et économiques. De nombreux membres du National Patriotic Party (NPP) d’Howard Taylor, qui a été le parti au pouvoir pendant une grande partie de la guerre civile, seront pris pour cible.

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Jewel Howard Taylor a aidé Weah à remporter l’élection présidentielle de 2017 grâce au soutien du NPP, mais le parti a critiqué l’entourage du nouveau président et elle a eu des problèmes avec les tribunaux pour des abus administratifs. Et à Monrovia, certains affirment que Weah la soupçonne d’être impliquée dans les manifestations de juin 2019 ayant pour slogan « Save the State », qui l’accusaient de corruption et de négligence envers les pauvres qui avaient voté pour lui.

• Ghana : Ken Ofori-Atta, toutes les cartes main…

Alors que le pays se prépare pour les élections de 2020, le ministre des Finances Ken Ofori-Atta devra faire face à des demandes de dépenses sans précédent. Tiendra-t-il les robinets fermés ou débloquera-t-il les budgets pour aider le président Nana Akufo Addo à gagner en popularité et à se faire réélire ?

Le gouvernement d’Accra n’a que récemment mis fin au programme du FMI qui l’a aidé à surmonter les problèmes causés par un précédent cycle de dépenses laxistes, et il a maintenant en perspective des années de croissance soutenue par le pétrole et l’or. Dans l’intervalle, Ofori-Atta travaille toujours sur des plans de collecte de revenus, qui comprennent l’introduction en bourse d’un vaste fonds minier, mais on n’a plus entendu beaucoup parler du plan d’ « obligations du siècle » : l’émission prévue de 50 milliards de dollars dont il était question en 2018.

• Nigeria : Yemi Alade, Afropop Queen

L’une des meilleures chanteuses nigérianes n’en finit plus de gagner en popularité, grâce à sa maîtrise de la vidéo et à son attention portée aux fans du continent. Son single « Johnny » est le clip nigérian le plus regardé sur Youtube et elle est devenue la première star de la musique africaine à y avoir un million d’abonnés.

L’industrie nigériane est littéralement sous stéroïdes, vous devez dormir les yeux ouverts pour pouvoir attraper la prochaine vague

Après sa participation à l’album « Lion King » de Beyoncé, Alade a sorti en octobre 2019 « Woman of Steel », un album taillé pour les dancefloors. Elle l’a dit aux journalistes : « L’industrie nigériane est littéralement sous stéroïdes (…) Vous devez dormir les yeux ouverts pour pouvoir attraper la prochaine vague. »

• Nigeria : Zainab Ahmed, faire travailler l’argent

La ministre des Finances nigériane, Zainab Ahmed, le 13 avril à Washington, avec Christine Lagarde, alors directrice du FMI. © Jose Luis Magana/AP/SIPA

La ministre des Finances nigériane, Zainab Ahmed, le 13 avril à Washington, avec Christine Lagarde, alors directrice du FMI. © Jose Luis Magana/AP/SIPA

Alors que les décideurs rivalisent d’efforts pour influencer l’avenir économique du Nigeria, la ministre des Finances, Zainab Ahmed, n’a pas seulement été reconduite dans ses fonctions, elle a également repris les portefeuilles du Budget et de la Planification lorsque le président Muhammadu Buhari a combiné les deux ministères, faisant d’elle la « super-ministre » du gouvernement.

L’administration Buhari a pour objectif de stimuler la production nationale et d’aider le pays à faire face à la crise pétrolière en diversifiant les sources de recettes. Tout en pensant la coordination des politiques fiscales et monétaires, Zainab Ahmed – comptable de profession – a également participé à l’élaboration de programmes visant à introduire de nouvelles taxes et à élargir l’assiette fiscale en s’assurant que davantage de sociétés et de travailleurs paient leur juste part. Un vaste programme.

AFRIQUE CENTRALE

• Cameroun : Gaston Abe Abe, prisonnier d’opinion

Valsero, rappeur Camerounais. © AIMAY MÉNOBA POUR J.A.

Valsero, rappeur Camerounais. © AIMAY MÉNOBA POUR J.A.

Gaston Abe Abe, également connu sous le nom de Valsero, est le rappeur le plus engagé politiquement du Cameroun. Cela lui a valu plusieurs mois de prison aux côtés du chef de l’opposition Maurice Kamto en 2019 pour des accusations de « rébellion ».

Parlant au nom de la génération des années 1980, ces Camerounais qui ont obtenu des diplômes universitaires mais qui n’ont pas encore trouvé d’emploi, il est arrivé au-devant de la scène avec un tube intitulé « Ce pays tue les jeunes ». Influencé par les idées de l’agronome radical Bernard Njonga, Valsero – qui a été libéré en octobre – n’est pas prêt à renoncer à se battre pour ses idéaux.

• République démocratique du Congo : Joseph Kabila, la porte reste ouverte

Joseph Kabila, lors de l'investiture deFélix Tshisekedi, le 24 janvier 2019. © Jerome Delay/AP/SIPA

Joseph Kabila, lors de l'investiture deFélix Tshisekedi, le 24 janvier 2019. © Jerome Delay/AP/SIPA

Avec ses alliés à la tête du gouvernement, de l’Assemblée nationale et du Sénat, l’ancien président Joseph Kabila préparait à la fin de 2019 son retour politique. Ses partisans du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD) font déjà campagne pour les élections de 2023, dénigrant le président Félix Tshisekedi et affirmant que ses principaux projets gouvernementaux, comme la gratuité de l’enseignement de base, ont été lancés par Kabila lorsqu’il était au pouvoir.

À Lire RDC : Emmanuel Ramazani Shadary, ce dauphin de Joseph Kabila devenu poisson-pilote

Jusqu’à présent, la stratégie de Kabila pour rendre la vie difficile à Tshisekedi se poursuit. Le nouveau président a promis aux bailleurs qu’il balayerait la corruption issue de l’ancien régime, mais il ne peut faire grand-chose sans l’adhésion du clan Kabila.

• Congo : Martin M’beri, Monsieur le médiateur

Allié du président Denis Sassou Nguesso, M’beri a la lourde tâche de convaincre l’opposition – dont certains membres sont toujours en prison pour des chefs d’accusation controversés – que le gouvernement prend au sérieux les réformes en vue des élections prévues pour 2021.

L’ONU, représentée en Afrique centrale par son envoyé spécial François Louncény Fall, encourage l’opposition à donner une chance au dialogue. Les opposants veulent la réforme de la commission électorale, un plus grand respect des libertés d’expression et d’association et la consolidation de la paix dans la région du Pool – après l’accord de 2017 entre le gouvernement et les rebelles du Pasteur Ntumi.

• Centrafrique : Sani Yalo, conseiller de l’ombre

Sani Yalo sait rester influent : il a été conseiller des anciens présidents Ange-Félix Patassé, François Bozizé et Michel Djotodia – et il est un allié très proche de l’actuel président, Faustin-Archange Touadéra, bien qu’il ne joue aucun rôle officiel. Il soutient l’alliance récente de Bangui avec Moscou, a été l’un des principaux bailleurs de fonds de la campagne présidentielle de Touadéra en 2016, et a obtenu un siège au conseil d’administration du Bureau d’affrètement routier centrafricain, qui réglemente le transport terrestre de marchandises pour ce pays enclavé.

À Lire Centrafrique : Sani Yalo, l’incontournable « homme de l’ombre » de Faustin-Archange Touadéra

Le gouvernement équato-guinéen a accusé Yalo de jouer un rôle dans une tentative de coup d’État en 2017, mais celui-ci nie toute implication et a reçu la protection de Touadéra contre les émissaires de Malabo à la recherche de responsables.

• Gabon : Théophile Ogandaga, nouvel arrivant

Ogandaga a été nommé à la fin de 2019 à l’un des postes les plus puissants – et les plus précaires – de Libreville. Le nouveau directeur de cabinet du président Ali Bongo Ondimba remplace l’étoile montante Brice Laccruche Alihanga qui, comme Maixent Accrombessi avant lui, s’était bâti une réputation controversée.

Alors que l’économie est affaiblie par la crise pétrolière et que les querelles politiques internes sont alimentées par la convalescence d’Ali Bongo Ondimba, le technocrate qui a récemment travaillé chez Olam – la société singapourienne d’agrobusiness étroitement liée au gouvernement – est prêt à adopter une approche plus discrète que ses prédécesseurs pour devenir le nouveau gardien du palais présidentiel. Mais combien de temps durera-t-il et quel bilan obtiendra-t-il ?

• RDC : Vital Kamerhe, dans un brouillard de négociations

Vital Kamerhe, le directeur de cabinet de Félix Tshisekedi. © Robert Carrubba pour JA

Vital Kamerhe, le directeur de cabinet de Félix Tshisekedi. © Robert Carrubba pour JA

Le directeur de cabinet du président Félix Tshisekedi a la tâche ingrate d’essayer de mettre d’accord deux parties qui n’étaient pas destinés à travailler ensemble. Tshisekedi a remporté une présidentielle controversée en décembre 2018 mais a perdu les législatives, ce qui l’oblige à gouverner par coalition avec le parti de l’ancien président Joseph Kabila.

À Lire RDC – Vital Kamerhe : « Nous ferons tout pour maintenir l’alliance Tshisekedi-Kabila »

Presque toutes les décisions importantes du gouvernement, lesquelles exigent l’accord des pouvoirs exécutif et législatif, impliquent désormais une myriade de négociations et de marchandages, avec Kamerhe au centre de celles-ci. Moins d’un an après le début du mandat de Tshisekedi, le mariage de raison s’effilochait déjà au rythme des escarmouches entre les cadres des partis concernés. En 2020, les yeux seront tournés vers Kamerhe pour voir s’il sera capable de réunir tout le monde autour de la table ou s’il pourra dégager un avantage politique d’un conflit ouvert.

AFRIQUE DE L’EST

• Soudan du Sud : Anna Nimiriano, journaliste de guerre

Avec la censure, la violence, les intimidations et les menaces, le Sud-Soudan, en pleine guerre civile, n’est pas un endroit rêvé pour la liberté de la presse. Anna Nimiriano a affronté tous les dangers pour devenir l’une des principales journalistes du pays.

Parfois, quand on voit tant de choses qui tournent mal, on réalise qu’on ne peut rien faire d’autre que de les écrire

Elle a également défié les tristement célèbres agents de la sécurité nationale qui ont travaillé à étouffer le journalisme dans le pays, gagnant de nombreux prix internationaux pour son travail. La première rédactrice en chef du Sud-Soudan résume ainsi son engagement : « Parfois, quand on voit tant de choses qui tournent mal, on réalise qu’on ne peut rien faire d’autre que de les écrire. »

• Éthiopie : Birtukan Mideksa, Madame élections

L’opposante Birtukan Mideksa a été nommée à la tête du Bureau électoral nationalde l’Éthiopie le 22 novembre 2018. © Office of the Prime Minister – Ethiopia

L’opposante Birtukan Mideksa a été nommée à la tête du Bureau électoral nationalde l’Éthiopie le 22 novembre 2018. © Office of the Prime Minister – Ethiopia

L’opposante en exil devenu chef de la commission électorale est sous les feux de la rampe alors que le Premier ministre Abiy Ahmed se prépare à des élections qui changeront la donne en mai 2020. Ce dernier a promis qu’elles seraient libres et équitables, mais certains membres de la coalition au pouvoir ne sont pas enclins à prendre le risque d’une telle ouverture.

Les déplacements de population liés à une recrudescence des affrontements ethniques rendront également la tâche logistique de Birtukan beaucoup plus difficile, et le succès du scrutin sera une mesure clé de l’effort de réforme et de libéralisation d’Abiy.

• Tanzanie : Fatma Karume, défenseuse de l’État de droit

Fatma Karume insiste sur le fait qu’elle ne veut pas s’impliquer dans la politique, mais la bataille pour le contrôle de Zanzibar et les tactiques autoritaires du président John Magufuli pourraient la pousser dans cette direction.

À Lire Tanzanie : quand le pouvoir autoritaire de John Magufuli inquiète…

Après avoir énergiquement critiqué le manque d’équilibre des pouvoirs au sein du gouvernement Magufuli, la Haute Cour a suspendu temporairement en septembre cette ancienne présidente du Barreau du Tanganyika de l’exercice de la profession sur le continent. Dans sa réponse, elle a expliqué : « Il est probable que la défense des droits n’est plus le domaine où je suis censé être. Peut-être suis-je censée faire de la politique. » Fatma Karume vient d’une famille de responsables politiques, son père et son grand-père étaient tous deux présidents de Zanzibar.

• Éthiopie : Jawar Mohammed, Oromo d’influence

Le militant et propriétaire de médias Jawar Mohammed sera une figure clé des élections éthiopiennes de 2020. L’influence qu’il exerce sur la politique oromo aura un impact énorme sur les chances de succès du premier ministre Abiy Ahmed qui appartient lui aussi à l’ethnie Oromo, la plus importante d’Éthiopie. Leurs relations se sont tendues et Jawar a affirmé que le gouvernement avait tenté de l’arrêter en octobre, ce qui a provoqué une flambée de violences.

À Lire Éthiopie : guerre ouverte entre Abiy Ahmed et Jawar Mohammed, le héraut de la « révolution oromo »

Alors que le modèle éthiopien de fédéralisme ethnique est mis à rude épreuve par le programme de libéralisation d’Abiy, les élections de mai 2020 opposeront les partis à prisme ethnique au nouveau parti d’Abiy qui cherche lui à promouvoir l’unité éthiopienne.

• Kenya : Michael Joseph, patron occupé

L’année 2020 est cruciale pour le Kényan-Américain Michael Joseph qui dirige deux des plus importantes sociétés du Kenya. Il y a tout d’abord Safaricom, l’entreprise de télécommunications qu’il avait déjà transformée de 2000 à 2010, et dont il doit laisser les rênes à un nouveau PDG en avril 2019.

En parallèle, il est président du conseil d’administration de Kenya Airways, qui doit être nationalisée par le gouvernement. Une société qui est également à la recherche d’un nouveau directeur général pour piloter sa prochaine phase de croissance.

• Ouganda : Bobi Wine, chants de contestation

Bobi Wine, chanteur et opposant ougandais, à Paris le 11 juin 2019. © Damien Grenon pour JA

Bobi Wine, chanteur et opposant ougandais, à Paris le 11 juin 2019. © Damien Grenon pour JA

La plus grande épine dans le pied du président Yoweri Museveni est ce chanteur de 37 ans devenu politicien, Robert Kyagulanyi Ssentamu (alias Bobi Wine), qui a fait de la lutte pour les pauvres et les exclus son cheval de bataille. Âgé de 75 ans, Museveni pourrait se représenter en 2021, et Bobi Wine a l’intention de lui barrer le passage.

Le chanteur a été un critique efficace de la corruption et de l’hypocrisie du gouvernement, mais la création d’un parti politique, la formation d’alliances et l’organisation d’une campagne nationale efficace sont des défis d’un niveau supérieur. L’année 2020 montrera si Wine et ses alliés sont à la hauteur de leurs ambitions face à l’intimidation et à la brutalité des forces de sécurité.

AFRIQUE AUSTRALE

• Zambie : Kryticous Patrick Nshindano, un arbitre civil

Alors que le pays se prépare aux élections de 2021, le nouveau patron de la Commission électorale de Zambie aura un rôle clé à jouer pour réduire les tensions politiques. Le choix à ce poste de l’ancien directeur de l’ONG Société civile pour la réduction de la pauvreté a constitué une surprise tant le président Edgar Lungu est accusé par certains groupes de la société civile et de l’opposition d’user d’autoritarisme pour renforcer son emprise sur le pouvoir.

Hakainde Hichilema, le chef du Parti uni pour le développement national (opposition), accusé de trahison en raison de ses protestations contre la présidentielle de 2016, a salué la nomination de Nshindano. Mais il attend de voir comment la commission procédera à l’inscription sur les listes électorales, qui devraient inclure 50% d’électeurs en plus que lors des derniers scrutins.

• Zimbabwe : Kudakwashe Tagwirei, un trader dans la ligne de mire

Le PDG de Sakunda Holdings, Kudakwashe Tagwirei, entretient des rapports difficiles avec les autorités de Harare, mais il pourrait sortir de cette mauvaise passe. Il a été l’un des plus proches alliés commerciaux du président Emmerson Mnangagwa et par le biais d’accords opaques, Sakunda a financé le programme gouvernemental « Command Agriculture », un investissement clé à un moment où les investisseurs doutent que le slogan du gouvernement soit « ouvert aux affaires ».

Mais à la fin de 2019, une intervention du FMI – que Harare veut désespérément à ses côtés pour payer ses arriérés et débloquer de nouveaux prêts – a signalé que les paiements du gouvernement à Sakunda étaient suspects et dommageables pour les finances publiques. La Banque centrale a alors gelé les comptes de Sakunda, ce qui indique clairement que la relation de l’homme d’affaires avec le gouvernement traverse une période délicate.

• Mozambique : Manuel Chang, au milieu du gué

Manuel Chang, ancien ministre mozambicain des Finances,  au tribunal de Kempton Park, Johannesburg, le 2 janvier 2019. © P.Magakoe/AP/SIPA

Manuel Chang, ancien ministre mozambicain des Finances, au tribunal de Kempton Park, Johannesburg, le 2 janvier 2019. © P.Magakoe/AP/SIPA

L’ancien ministre des Finances du Mozambique est au centre de querelles juridiques sur les 2 milliards de dollars de prêts secrets du pays. Arrêté en Afrique du Sud en décembre 2018 en vertu d’un mandat d’arrêt américain, Chang attend maintenant que la cour décide s’il sera envoyé aux États-Unis ou au Mozambique, où le gouvernement de Maputo dit désormais vouloir le juger. Les avocats de Chang plaident pour cette deuxième option, s’attendant à plus de clémence de la justice mozambicaine.

Une chose est sûre : la saga des prêts secrets est loin d’être close. L’homme d’affaires libanais Jean Boustani – qui est jugé à New York pour son implication dans l’affaire – a accusé le président Filipe Nyusi d’avoir reçu des pots-de-vin. Lequel nie en bloc ces allégations.

• Afrique du Sud : Mkhuleko Hlengwa, vigie anti-corruption

Le jeune franc-tireur et star du Inkatha Freedom Party dirige le Comité permanent des comptes publics du Parlement, l’organe de surveillance du pouvoir législatif. Dès son entrée en fonction au seul comité non présidé par l’African National Congress (ANC, au pouvoir), il a expliqué ses objectifs : « Ce que nous ébranlerons, c’est la corruption, la mauvaise administration, la fraude et le mépris total de l’État de droit. »

À Lire Afrique du Sud : Cyril Ramaphosa, le caméléon

Mkhuleko Hlengwa prévoit de demander des comptes au président Cyril Ramaphosa, à ses ministres et à leurs directeurs de cabinet. Récemment, lui et le comité ont jeté leur dévolu sur la South African Airways et la Passenger Rail Agency of South Africa pour améliorer leur gestion et accroître leur transparence.

• Afrique du Sud : Sho Madjozi, solide comme John Cena

En commençant par rapper sur Instagram et en lançant son premier album « Limpopo Champions League » en 2018, Sho Madjozi est devenue populaire en Afrique du Sud, en Afrique de l’Est et aux États-Unis. Son tube ‘John Cena’ notamment, qui parle du catcheur américain, est devenu viral sur les réseaux sociaux. Elle est fière de son héritage Tsonga – un petit groupe ethnique sud-africain – et lui accorde une place de choix dans sa musique.

Malgré une xénophobie croissante en Afrique du Sud, elle chante en kiswahili et en tsonga, et les Sud-Africains adhèrent. Un nouvel album est prévu pour 2020. La rappeuse sud-africaine a récemment remporté le prix BET Awards’ Viewers’ Choice de la meilleure nouvelle performance internationale et le prix de l’artiste féminine de l’année des South African Music Awards.

• Angola : Vera Esperança dos Santos Daves, l’étoile montante de la finance

Cette ancienne banquière de 35 ans s’est hissée à l’un des postes les plus importants qui peuvent contribuer à redresser l’économie angolaise. Elle a transformé un emploi dans le secteur bancaire et quelques apparitions à la télévision en un siège à la Commission des marchés des capitaux et son ascension ne s’est pas arrêtée.

Elle est chargée de transformer les promesses de réforme du président João Lourenço en actions concrètes, supervisant un programme de privatisation massif qu’elle souhaite mettre en œuvre pour renforcer le rôle du secteur privé et réduire l’influence du pétrole sur l’économie. Mais loin de se concentrer uniquement sur l’argent, elle a également rejoint le bureau politique du parti au pouvoir.


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