Comores – Imani Younoussa : « Nous n’avons pas d’autre choix que la diversification »

Le gouverneur de la Banque centrale des Comores dresse le portrait de l’économie de l’archipel, entre besoins de financement, dépendances aux importations et aux dépenses publiques.

Imani Younoussa © Banque centrale des Comores

Imani Younoussa © Banque centrale des Comores

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Publié le 29 novembre 2019 Lecture : 2 minutes.

Un quartier de Moroni, aux Comores, le 2 juillet 2008 (Illustration) © Woodlouse/CC-BY-SA 2.0
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Comores : nouveaux horizons

Profitant du retour de la stabilité politique, le président Azali Assoumani, aisément réélu en avril, rencontre les investisseurs à Paris les 2 et 3 décembre. Objectif : les convaincre de miser sur l’archipel.

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Comment qualifiez-vous l’état actuel de l’économie comorienne ?

Elle connaît une grande période de stabilité, avec une croissance supérieure à 3,5 % ces dernières années. Elle ne dépassera pas les 2,4 % en 2019, puisque le passage du cyclone Kenneth en avril a eu un effet dévastateur sur nos cultures de rente, mais elle devrait repartir à la hausse dans les prochains mois, tirée par la consommation intérieure ainsi que par l’investissement public, très dynamique ces trois dernières années.

Nous devons développer la transformation de nos produits agricoles de rente et arrêter d’exporter notre girofle et notre vanille à l’état brut

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Mais pour atteindre l’émergence économique promise pour 2030, le pays doit aligner des taux compris chaque année entre 6 % et 8 %. Comment faire pour enregistrer une telle accélération ?

Il faut, au minimum, que nous puissions avancer deux fois plus vite si nous voulons être au rendez-vous fixé par le Plan Comores émergent (PCE). Pour doper notre croissance, nous n’avons pas d’autre choix que de diversifier notre économie, en développant notamment le secteur du tourisme et en professionnalisant celui de la pêche, comme ont su le faire les Seychelles, par exemple. Ces deux activités ne nécessitent pas forcément beaucoup d’investissements ou de technologies et peuvent avoir rapidement un effet sur notre économie.

Il nous faut également développer la transformation de nos produits agricoles de rente et arrêter d’exporter notre girofle et notre vanille à l’état brut. En plus de créer de la valeur ajoutée localement, cela nous permettra de rééquilibrer notre balance commerciale structurellement déficitaire.

Dans le même ordre d’idée, nous devons également réfléchir à la manière de produire localement certains biens que nous importons. C’est particulièrement vrai dans l’ameublement ou dans la filière avicole, cela permettrait de lutter efficacement contre un chômage qui concerne actuellement 22,5 % de notre jeunesse.

Actuellement, le risque élevé de non-­remboursement des crédits fait que les banques préfèrent garder leur liquidité plutôt que de prêter, même à 14 % d’intérêt

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Est-ce que la solution ne serait pas également de pousser les jeunes à créer leurs propres entreprises plutôt qu’à rejoindre une fonction publique déjà pléthorique ?

Oui, mais il faut pour cela qu’ils puissent avoir accès à des crédits à moyen ou à long terme, ce que notre place financière, malgré sa libéralisation en 2005, ne leur apporte pas aujourd’hui.

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Pour aider les banques à proposer de tels produits financiers, il faut réduire les risques de défaut de paiement en créant par exemple des fonds de garantie, qui n’existent pas aujourd’hui dans le pays. Il faut rassurer nos établissements bancaires si nous voulons les voir jouer leur rôle auprès du secteur privé.

Actuellement, le risque élevé de non-­remboursement des crédits fait que ceux-ci préfèrent garder leur liquidité plutôt que de prêter, même à 14 % d’intérêt, comme c’est actuellement le cas. Toutefois, la Banque centrale travaille déjà sur un certain nombre de réformes pour réduire le risque bancaire et faciliter l’octroi de crédits à tous les porteurs de projets bancables.

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