Ministre de la Justice de 2002 à 2004, puis de 2012 à 2013, Mohamed Charfi avait été viré sans ménagement pour avoir refusé de blanchir l’ex-ministre de l’Énergie, Chakib Khelil, des poursuites pour corruption engagées par… Belkacem Zeghmati. Depuis le 15 septembre, il est président de l’Autorité nationale indépendante des élections, instance chargée d’assurer le scrutin du 12 décembre. Sa mission ? Crédibiliser ce rendez-vous hautement inflammable.
Pour la première fois depuis l’avènement du pluralisme politique en 1989, le pouvoir se décharge de la mission d’organiser, de surveiller, de superviser le vote et d’annoncer les résultats. Sur le papier, c’est une réelle avancée démocratique tant ce processus échappe désormais à la mainmise du ministère de l’Intérieur, de l’administration locale – préfets et sous-préfets – , des services de renseignements et de la présidence.
Aucun scrutin organisé depuis les élections locales de juin 1990 n’a échappé au trafic de fichiers électoraux, à la fraude, au bourrage des urnes ou à la manipulation des résultats. Mission impossible pour Charfi ? Compliquée, du moins. L’accueil réservé à sa nomination le prouve.
Dès sa prise de fonctions, cet ancien magistrat réputé intègre qui a fait toute sa carrière au sein du département de la Justice a dû rappeler que, loin de faire partie de la issaba (vocable utilisé pour désigner l’ancien clan présidentiel), il l’a même dénoncée devant le Conseil supérieur de la magistrature. Charfi a aussi répété qu’il était opposé au 4e mandat de Bouteflika et qu’il a payé son insoumission au prix fort. Pas sûr que ces rappels suffisent à convaincre les électeurs de se rendre aux urnes en décembre.