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DJ Arafat © Camille Millerand pour JA

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DJ Arafat : ultimes secrets

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DJ Arafat, sa famille, ses « petits » et ses « Chinois »

Dans Abidjan, devenue ville morte pour l’occasion, les « Chinois », ses fans inconditionnels, s’apprêtent à faire leurs derniers adieux au roi du coupé-décalé.

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Mis à jour le 12 novembre 2019 à 15:35

Un fan de DJ Arafat le corps peint en blanc, le 30 août 2019 à Abidjan non loin du stade Houphouët-Boigny, lors des funérailles de l’artiste. © OLIVIER pour Jeune Afrique

DJ Arafat avait au moins deux familles : sa famille naturelle et la Chine. Charles Tabu, son manager à l’international, insiste sur sa proximité, jamais perdue, avec ses fans et la rue. « Beaucoup de personnalités comme Marc-Antoine Moreau, l’ancien directeur de Universal, lui avaient conseillé de créer son programme de télé-­réalité… Mais il n’en avait pas besoin : il avait ses live pour établir un contact permanent avec ses fans !

Des fans de DJ Arafat lors des funérailles de l'artiste le 30 août 2019, à Abidjan. © OLIVIER pour Jeune Afrique

Des fans de DJ Arafat lors des funérailles de l'artiste le 30 août 2019, à Abidjan. © OLIVIER pour Jeune Afrique

Une vie de rock star

Oui, il vivait comme une rock star, à 100 à l’heure, il pouvait prendre un whisky-Coca le matin, s’acheter des bolides, payer des tournées, prendre modèle sur les Congolais pour les sapes, manger des escargots de Bourgogne au Fouquet’s à Paris… Mais il n’a jamais oublié d’où il venait. » Quand il se promenait dans Abidjan, la star ne s’entourait jamais de gardes du corps.

Le fait qu’un gamin pauvre transcende son milieu social sans changer, sans devenir un bourgeois. Il est resté lui-même

Et il était même capable d’amener des stars avec lui dans des petites boîtes de Yopougon, son quartier de cœur… Comme MHD après un concert à l’hôtel du Golf il y a quelques années. Pour Moussa Soumbounou, ce qui fascinait chez Arafat, c’était justement cette loyauté et cette liberté : « Le fait qu’un gamin pauvre transcende son milieu social sans changer, sans devenir un bourgeois. Il ne se décoiffait pas quand il entrait dans mon bureau… Pareil chez les ministres. Il est resté lui-même. »

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Ce lien avec la rue passait aussi par des actes généreux. « Il y a des gamins qu’il appelait ses “petits”, j’en ai vu plus d’une dizaine chez lui, se souvient Charles Tabu. Il les nourrissait, les aidait, les faisait parfois venir en Europe… Mais il ne voulait pas créer de fondation, et ne tenait pas forcément à ce que les gens connaissent ses largesses. »

Apaisement

Avec sa famille naturelle, la relation était sans doute moins orageuse que ce qu’il confessait à longueur de live et d’entretiens. Son père (qu’il a accusé de l’avoir frappé lorsqu’il était enfant) était un ingénieur du son reconnu, notamment pour l’artiste Meiway, et a surtout été le premier manager de DJ Arafat. Sa mère, star sulfureuse connue sous le pseudonyme de Tina Glamour, était régulièrement en « clash » avec lui sur les réseaux.

Il n’avait pas de réels problèmes avec ses parents, il m’a toujours bien parlé de son père, de sa mère… il les aimait vraiment

Les fans en émoi, après l’annonce du décès de leur idole. © SANOGO / AFP

Les fans en émoi, après l’annonce du décès de leur idole. © SANOGO / AFP

Mais, à en croire son ami DJ Mix Premier, « il n’avait pas de réels problèmes avec ses parents, il m’a toujours bien parlé de son père, de sa mère… il les aimait vraiment ». Moussa Soumbounou confirme. « Ce qu’on veut faire croire sur sa relation violente à sa mère est faux. Clash ou pas, coups de poing ou pas, il l’aimait et lui envoyait de l’argent tous les mois. »

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Le DG de Universal Music Africa, comme d’autres proches, a surtout vu Arafat chercher l’apaisement auprès de sa dernière compagne, Carmen Sama. « Il m’avait confié qu’il voulait se poser, avoir une personne qui reste durablement près de lui… Et quelques semaines plus tard, il se mettait avec Carmen », se remémore Charles Tabu. Avec elle, il aura une deuxième petite fille, Rafna, dont il était « littéralement amoureux ». « Il n’arrêtait pas de m’envoyer des vidéos du bébé, il en était dingue ! » se souvient Moussa Soumbounou.

Il ne faut pas oublier qu’il a commencé très jeune, qu’il a connu d’innombrables clashs, qu’il a vécu à fond. Il était sans doute un peu fatigué. Et avec l’âge, il prenait aussi de la maturité

Ce recentrement sur le cercle familial répondait à un besoin de sérénité. « Il ne faut pas oublier qu’il a commencé très jeune, qu’il a connu d’innombrables clashs, qu’il a vécu à fond…, relève DJ Mix Premier. Il était sans doute un peu fatigué. Et avec l’âge, il prenait aussi de la maturité. À 33 ans, tu ne peux plus te comporter comme un ado. »