1. Enfant de Brooklyn
Fils d’un Juif hongrois rescapé des camps nazis et débarqué à New York en 1949, Reed Brody naît en 1953 dans le quartier de Brooklyn. Son père, Ervin, y enseigne la littérature slave, tandis que sa mère, Francesca, pacifiste et professeure d’art, l’élève et orne les murs de sa chambre de cartes du monde.
2. Procureur
Diplômé en droit de l’Université Columbia, il milite un temps contre la guerre du Vietnam, puis devient en 1980 substitut du procureur de New York. Il s’occupe de la protection des consommateurs face aux grandes entreprises et institutions financières. Figure montante du département de la Justice, il quitte pourtant son poste en 1984.
3. Grand manitou blanc
En 1999, Reed Brody se penche sur le cas du Tchad et aide les victimes à porter plainte au Sénégal contre Hissène Habré. Ce dernier est inculpé, mais Dakar refuse de le juger. En 2001, l’Américain découvre à N’Djamena les archives de la police politique du régime. Le procès ne s’ouvre cependant qu’en 2015. Condamné, l’ex-président tchadien voit en Reed Brody son bourreau, qu’il surnomme le « Grand manitou blanc ».

Hissène Habré lors de son procès à Dakar, le 20 juillet 2015. © Ibrahima Ndiaye/AP/SIPA
4. Périple sud-américain
Dès le milieu des années 1970, le juriste se passionne pour l’Amérique latine. Grand lecteur de l’Uruguayen Eduardo Galeano, il visite la Colombie, le Chili ou encore la Bolivie. Il se tourne, en 1984, vers le Nicaragua, où les Contras, soutenus par les États-Unis, combattent le pouvoir sandiniste.
5. Médiatique
L’ex-substitut enquête au Nicaragua pendant quatre mois sur les atrocités commises par les Contras. Son rapport, remis au Congrès, fait la une du New York Times. L’affaire met en première ligne le président Ronald Reagan, soutien des rebelles du Nicaragua, qui finit par qualifier l’avocat de « sympathisant sandiniste ».
6. Globe-trotter
De 1987 à 1991, Reed Brody codirige la Commission internationale de juristes à Genève. Il passe ensuite plusieurs années à défendre les droits humains au Salvador, au Guatemala, en Haïti ou encore en RD Congo. En 1998, il rejoint Human Rights Watch (HRW). Sous son impulsion, l’ONG se constitue partie civile lors du procès d’Augusto Pinochet, arrêté à Londres et accusé de génocide. L’immunité de l’ex-dictateur chilien est levée, mais celui-ci échappe à la justice.

Reed Brody, fervent militant pour l'organisation du procès d'Hissène Habré © Schalk van Zuydam/AP/SIPA
7. Tenace
Reed Brody enchaîne d’abord les échecs. Par exemple, en 1999, avec Mengistu Haïlé Mariam, contre lequel HRW dépose une plainte. Alors que le dictateur éthiopien s’aventure en Afrique du Sud, le gouvernement refuse de l’interpeller et le laisse partir. L’Américain se dit « ébranlé ».
8. Divorcé
L’avocat a été marié à la militante brésilienne des droits de l’homme Myriam Marques, avant de divorcer en 2012. Reed Brody vit aujourd’hui en couple avec la cinéaste espagnole Isabel Coixet, qui a consacré un documentaire au régime tchadien d’Hissène Habré.
9. Insatiable
Reed Brody a aujourd’hui pour cible l’ancien président gambien Yahya Jammeh, en exil en Guinée équatoriale. Il soutient trois Gambiennes accusant ce dernier de viol alors qu’il était au pouvoir. L’Américain espère, à terme, un procès.

Le président gambien Yahya Jammeh, le 30 juin 2011, devant le Centre de conférences de Sipopo à Malabo, en Guinée équatoriale, avant la session d'ouverture du 17ème Sommet de l'Union africaine. © Rebecca Blackwell/AP/SIPA
10. Dérangeant
L’avocat publie en 2011 Faut-il juger George W. Bush ? dans lequel il enquête sur la torture américaine, notamment à Guantánamo. Il milite pour un procès de l’ancien président et évoque même des procédures contre l’actuel président, Donald Trump. Il considère que la politique migratoire de ce dernier pourrait constituer un crime contre l’humanité.