Économie

Djibouti : Kadra Abdi Douksieh et Emely Ahmed Araita, deux pionnières en affaires

L’une excelle dans les nouvelles technologies, l’autre dans la mode. Toutes deux incarnent la stratégie de diversification de Djibouti.

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Mis à jour le 12 novembre 2019 à 15:56

Kadra Abdi Douksieh (à g.) et Emely Ahmed Araita. © Montage JA

• Kadra Abdi Douksieh, une patronne 2.0

Le métier de boulanger mène décidément à tout, même à Djibouti. Dès l’âge de 9 ans, Kadra Abdi Douksieh a commencé à vendre les pains pétris par son père. Jusqu’à « développer une vraie expertise entrepreneuriale », estime-t-elle. À 42 ans, elle se trouve à la tête de plusieurs compagnies à Djibouti, où elle est rentrée en 2005 après avoir étudié en Tunisie, puis en France, où elle s’est spécialisée dans l’e-commerce.

Kadra Abdi Doukzieh. © DR

Kadra Abdi Doukzieh. © DR

Bardée de diplômes et formée aux dernières technologies, elle a apporté à son pays d’origine son premier programme de data mining, qui permet l’extraction des données d’une clientèle pour mieux valoriser les services d’un opérateur. Elle se fait vite recruter par le premier d’entre eux, Djibouti Telecom, mais claque la porte après un an et demi. « La culture “entreprise publique” ne me convenait pas », affirme Kadra, qui a toujours voulu être sa propre patronne.

Djibouti Telecom propose 360 services qu’il lui faut valoriser

En 2012, elle lance NomadeCom, spécialisé dans les services à valeur ajoutée pour les télécommunications. Sa société travaille notamment pour son ancien employeur : « Djibouti Telecom propose 360 services qu’il lui faut valoriser », explique-t-elle. Mais sa grande histoire du moment, c’est sa plateforme de paiement électronique, lancée en 2017. Kadra Abdi Douksieh a créé, avec sa société mDJF, le premier porte-monnaie électronique de Djibouti. Pour l’instant, le service n’a attiré que quelques milliers d’utilisateurs réguliers, mais Kadra compte bien inverser cette tendance et remédier à ce « déficit de notoriété ».

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• Emely Ahmed Araita, une modèle tout-terrain

En octobre, la Vancouver Fashion Week accueillera les créations d’une styliste djiboutienne. Une première pour l’événement lui-même ainsi que pour Emely Ahmed Araita, encore peu habituée aux podiums. Cette trentenaire énergique, qui compte ouvrir un pop-up store à Djibouti dans la foulée, a appris son métier au Japon, où elle a rejoint son père, ambassadeur. Avant Tokyo, elle est également passée par la Malaisie. Ce qui ne l’a pas empêchée de conserver ses racines africaines.

Emely Ahmed Araita © DR

Emely Ahmed Araita © DR

Je voulais toucher toutes les femmes

C’est d’ailleurs pour ses sœurs du continent, qu’elle a pensé puis créé sa marque : Alça [« lune », en afar]. « Je voulais toucher toutes les femmes, avec des styles qui peuvent plaire à celles qui portent le voile comme à celles qui ne le portent pas », explique la modiste. En négociation pour lancer, d’ici à septembre, la production de sa première collection de prêt-à-porter, elle consacre également une large partie de son temps à des créations de haute couture.

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C’est ainsi qu’elle a été repérée, en juin 2018, par une galeriste japonaise qui lui a offert la possibilité d’exposer ses modèles à côté des œuvres de l’artiste local Tsunahisa Ogino. Depuis, les propositions de défilés se sont multipliées au Japon et ailleurs, jusqu’au Canada, donc. « J’ai prévu d’y présenter entre douze et seize créations », explique Emely. La modiste planche encore sur les modèles qu’elle compte montrer durant cet événement, qui pourrait bien donner un coup d’accélérateur à sa carrière.