Économie

Algérie : Malik Rebrab propulsé à la tête de Cevital

Depuis l’arrestation d’Issad Rebrab, le 22 avril, son fils, Malik Rebrab, a pris les rênes de Cevital, premier groupe privé algérien.

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Mis à jour le 12 novembre 2019 à 16:14

À la tête du pôle industriel depuis 2010, c’est Malik Rebrab qui avait en partie compensé l’absence de directeur général entre 2014 et 2017. ©Christophe Petit Tesson/MAXPPP

Le passage de relais n’était pas programmé dans l’immédiat. Issad Rebrab, 74 ans, fondateur de Cevital, n’a jamais officiellement désigné son successeur. Mais l’arrestation de la première fortune d’Algérie (3,4 milliards de dollars en 2019, selon Forbes) dans la nuit du 22 au 23 avril par les autorités de son pays a précipité son fils cadet, Malik, 47 ans, en première ligne. Pour les connaisseurs des arcanes du groupe privé algérien, la surprise n’est pas totale.

À la tête du pôle industriel depuis 2010, c’est lui qui avait en partie compensé l’absence de directeur général entre 2014 et 2017, avant que Saïd Benikene soit embauché. Ce dernier, débarqué en décembre 2018 à la suite de l’échec de la relance des aciéries Lucchini à Piombino, en Italie, n’a pas été remplacé, et la fonction est depuis assurée temporairement par le Roumain Radu Mavrodin, recruté l’an dernier pour gérer les ressources humaines de Cevital.

Éduqué en France comme ses frères et sœur, Malik Rebrab a étudié la finance à la London University. Diplômé, il a démarré sa carrière chez Xerox au Maroc, avant de rejoindre Loys & M comme trader, pour finalement intégrer le groupe familial en 1999. Quelques mois plus tard, il était nommé directeur général adjoint chargé du suivi de l’activité commerciale et de la production et même directeur général, en 2004, avant de se consacrer aux activités industrielles.

Issad Rebrab, entrepreneur algérien, PDG du groupe industriel Cevital, le 21 novembre 2012. © Bruno Levy pour Jeune Afrique

Issad Rebrab, entrepreneur algérien, PDG du groupe industriel Cevital, le 21 novembre 2012. © Bruno Levy pour Jeune Afrique

Issad Rebrab incarcéré

Issad Rebrab est accusé de « fausse déclaration concernant des mouvements de capitaux à destination et en provenance de l’étranger et d’importation d’équipements usagés après avoir bénéficié d’avantages fiscaux et bancaires ». Le dossier concerne la nouvelle filiale du groupe EvCon Algérie (fabrication de membranes et de stations de production d’eau ultrapure). L’an dernier, Issad Rebrab avait annoncé la création à Charleville-Mézières, en France, où il possède déjà plusieurs sites industriels (Brandt, Oxxo), d’une usine de fabrication d’équipements de traitement de l’eau.

Cette incarcération est intervenue alors que l’armée algérienne tente d’apaiser les millions de manifestants qui réclament depuis trois mois un changement de régime. Plusieurs hommes d’affaires, dont Ali Haddad, ex-président du Forum des chefs d’entreprises (FCE), ou les frères Kouninef, à la tête du géant du BTP KouGC, ont aussi été arrêtés. Contrairement à ces derniers, Issad Rebrab n’était pas identifié comme un proche de l’ancien chef de l’État, Abdelaziz Bouteflika, qui a démissionné le 2 avril. Ces dernières années, les conflits avec le pouvoir se sont même multipliés, en particulier autour de son projet d’usine de trituration d’huile à Béjaïa, bloqué depuis deux ans.


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Visites au parloir

Dans l’immédiat, Malik devra bien sûr gérer les nombreuses activités de Cevital, dont l’essentiel des bénéfices provient traditionnellement du raffinage du sucre et de l’huile. Mais il se consacrera surtout, en concertation avec ses frères et sœur – Omar, Salim, Yassine et Linda –, qui possèdent chacun 12,5 % de parts du groupe, à la situation de son père, dont la santé inquiète. Diabétique, ce dernier doit recevoir trois injections quotidiennes d’insuline.

La semaine dernière, la famille a décidé de se séparer de l’avocat Miloud Brahimi – pourtant choisi par Issad Rebrab lui-même –, jugé trop médiatique, au profit d’un collectif d’avocats, mené par Khaled Bergheul. Incarcéré à la prison d’El Harrach, à Alger, Issad Rebrab ne peut recevoir la visite de ses proches qu’une fois tous les quinze jours. À l’heure où nous écrivons ces lignes, il semble que la famille, qui opte pour l’instant pour la discrétion, hésite à donner une dimension politique à cette affaire, alors que d’autres acteurs privés visés par le nouveau pouvoir à Alger placent leurs espoirs de sortie de prison dans « un accord de médiation » pour « rembourser » l’État, comme le propose l’avocat d’Ali Haddad.