Toute ressemblance avec des faits réels n’est pas totalement fortuite. Dans Yao, il est question d’un célèbre acteur français, Seydou Tall (incarné par Omar Sy), invité à Dakar. Jusqu’ici donc, rien de très fantaisiste… Mais la star rencontre sur place un garçon de 13 ans, Yao (Lionel Basse), qui a parcouru près de 400 km pour lui demander un autographe. En cherchant à raccompagner l’adolescent chez ses parents, à Kanel, Seydou entame un voyage initiatique et mystique à la découverte de ses propres racines.
>>> À LIRE – Cinéma : Omar Sy à Dakar pour tourner « Toucouleur », son prochain film
Le road-movie imaginé par Philippe Godeau n’est pas très bavard, et peut même paraître léger dans son scénario. Les motivations de Seydou à bousculer son agenda pour prendre la tangente ne sont jamais clairement expliquées. La relation père-fils entre les deux personnages et même une love story qui tourne court sont tout juste esquissées. Mais l’essentiel n’est pas là si l’on considère que le vrai héros du film, c’est le Sénégal.

Yao, de Philippe Godeau (sortie en France le 23 janvier) © Yao, de Philippe Godeau (sortie en France le 23 janvier)
Philippe Godeau, à l’origine du projet, a longtemps séjourné, enfant et adolescent, au Mali, où son père travaillait dans les travaux publics. Pour Omar Sy, le lien au Sénégal est évident (son père est un Peul émigré de Bakel), même s’il avoue qu’il ne s’y était pas rendu depuis huit ans. Les deux hommes partageaient l’envie de montrer « une Afrique réelle ». De là un long-métrage qui évite soigneusement les clichés.
Juste miroir
« On aurait pu faire le film façon Club Med, en ramenant toutes nos équipes, remarque Philippe Godeau. On a voulu faire autrement, avec des techniciens et des acteurs locaux [Lionel Basse est un enfant de Saint-Louis] pour donner une image juste du Sénégal, sortir de la carte postale. »
Pour la première fois, le personnage est obligé de s’arrêter, de prendre du temps, comme les gens autour de lui, observe Omar Sy
Yao donne à voir la modernité et la tradition, la ville et la brousse, les autoroutes et les calèches. Il montre que les filles voilées, dans les villages reculés, portent aussi des jeans, font des selfies et s’enjaillent sur le dernier son à la mode. L’islam y est banalisé. Dans une des premières scènes du film, assez spectaculaire, tournée à Dakar, des hommes en prière, débordant dans les rues, immobilisent le taxi de Seydou. « Pour la première fois, le personnage est obligé de s’arrêter, de prendre du temps, comme les gens autour de lui », observe Omar Sy.
Ce miroir juste tendu au Sénégal ne devrait donc pas surprendre en Afrique de l’Ouest… C’est en revanche un film important pour corriger la vision des Occidentaux sur la région.