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Dans l’histoire ivoirienne, rarement l’incertitude aura été aussi grande à moins de deux ans de l’élection présidentielle. Aucun des trois grands partis ne s’est choisi de candidat. Pis, au sein de ces formations, aucun homme ni aucune femme ne semble à même d’incarner plus qu’un autre l’avenir de son pays. Un suspense finement orchestré ?
C’est ce qu’assurent certains des barons ivoiriens. « Tout est prévu, tout est pensé, tout est acté, mais vous le saurez en temps et en heure », souffle l’un. « Le candidat est choisi, mais donner son nom trop tôt, ce serait l’exposer », dit un autre, assurant qu’il s’agit de préserver l’heureux élu des boules puantes, des attaques ou même de tentatives d’empoisonnement. En ces temps brumeux, les soupçons et la paranoïa sont à leur comble.
Round d’observation
Si les vieux éléphants de la politique ivoirienne ont repris fermement les rênes de leur parti ces derniers mois, Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo tiennent leurs partisans et leurs adversaires dans le flou. Laissant courir les rumeurs sur leurs propres candidatures, les démentant dans le même temps, lâchant des noms de prétendants prétendument sérieux… se laissant un maximum de choix et empêchant quiconque d’y voir clair.
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« C’est le symptôme du passage des anciens aux jeunes, estime le professeur en sociologie politique Francis Akindès. Cette vieille génération, qui a succédé à Houphouët-Boigny, sait qu’il est l’heure de passer la main, mais elle ne veut pas s’y résigner, car elle refuse de se voir mourir. » Elle parvient ainsi à verrouiller le jeu politique et à terroriser les plus jeunes, à tel point que même les plus ambitieux – Guillaume Soro et Jean-Louis Billon en tête – n’osent tout à fait se dévoiler. Chacun s’observe, se jauge et attend de l’autre qu’il se découvre en premier.
Outre l’inquiétude et les frustrations, c’est l’opacité qui ainsi prévaut. Si les trois grands partis promettent de tenir leur congrès en 2019, aucun n’a dit comment il comptait désigner son candidat. « Le suspense est pire que la déception », estimait le grand poète écossais Robert Burns. Pour l’instant, les Ivoiriens sont tenus en haleine, mais gare à ne pas les lasser.
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