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Togo : la sortie de crise, c’est par où ?
Jeune Afrique : Le gouvernement estime que vous faites obstruction aux réformes institutionnelles. Qu’en est-il ?
Jean-Pierre Fabre : Vous imaginez que, après avoir organisé les manifestations contre le pouvoir auxquelles le monde a assisté, nous puissions accepter d’aller aux élections dans ces conditions d’opacité ? Non ! Nous ne lâcherons rien sur ce qui va concourir à l’équité et à la transparence des élections.
Ne risquez-vous pas de vous mettre à dos les chefs d’État médiateurs de la Cedeao ?
Non. C’est la Cedeao qui veut régler la crise togolaise à travers les législatives. Elle a donc le devoir de tout mettre en œuvre pour que les conditions de leur bon déroulement soient réunies. Et qu’il n’y ait pas de contestation. Le 30 juillet, nous avons eu une discussion franche et respectueuse avec Alassane Ouattara, mais nous sommes restés fermes sur nos positions : pas d’élections dans les conditions actuelles.
Nous exigeons 23 sièges de député à Lomé, contre 10 actuellement
Cela signifie-t-il que vous n’irez pas au scrutin du 20 décembre prochain ?
Quelle personne normale peut penser que ce scrutin se tiendra à cette date ? Nous ne sommes pas des idiots. Nous n’y participerons pas avec le mode de scrutin actuel [un seul tour] et avec ce découpage des circonscriptions. Imaginez-vous que je suis élu en ayant obtenu huit fois plus de voix que d’autres ! Nous exigeons 23 sièges de député à Lomé, contre 10 actuellement. Pour légitimer ce découpage inéquitable, ils disent s’appuyer sur l’histoire du pays. Mais certaines zones ne devraient pas être privilégiées. Il n’existe pas de discrimination positive en matière d’élections.
Je pense que les élections n’auront pas lieu avant juin ou juillet 2019. La Ceni ne pourra pas les organiser avant
Le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) assure qu’il peut tenir ce délai…
La Cedeao a des normes et je doute que la Ceni puisse réussir. Tout ce que nous contestons et qui est à l’origine de la crise doit être réglé. Sinon il n’y aura pas d’élections. Nous ne courons pas après des sièges, mais nous travaillons à l’ancrage de la démocratie et de l’État de droit dans le pays.
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Pourquoi excluez-vous l’Union des forces de changement (UFC) de Gilchrist Olympio des rangs de l’opposition au sein de la Ceni ?
Le pouvoir nous demande de céder à l’UFC un des sièges réservés à l’opposition, alors que ce parti a signé un accord de gouvernement. Nous ne lui accorderons jamais. Au sein de la Ceni, la loi prévoit huit membres issus de l’opposition parlementaire, extraparlementaire et de la société civile, ainsi que huit membres représentant le parti au pouvoir et ses alliés. Quant au dix-septième membre, nous exigeons qu’il soit un étranger, de préférence issu d’un pays membre de la Cedeao.
Ne craignez-vous pas de passer pour des fauteurs de troubles aux yeux de la Cedeao ?
Ils nous ont demandé de donner une liste au plus tard le 30 septembre. Nous avons tenu ce délai. Nous attendons la suite. Le reste ne nous regarde pas. S’agissant de la tenue des élections, je pense qu’elles n’auront pas lieu avant juin ou juillet 2019. La Ceni ne pourra pas les organiser avant.