[Tribune] Le cinéma français est-il vraiment raciste ?

De nombreuses actrices noires et métisses ont dénoncé lors du Festival de Cannes 2018 les propos racistes qu’elles entendent régulièrement dans l’exercice de leur métier.

Assa Sylla, à droite, actrice dans « Bande de filles », est l’une des femmes à avoir dénoncé le racisme au cinéma. Ici, lors des Césars 2015. © AP/SIPA

Assa Sylla, à droite, actrice dans « Bande de filles », est l’une des femmes à avoir dénoncé le racisme au cinéma. Ici, lors des Césars 2015. © AP/SIPA

Michel Bampély © DR

Publié le 15 juin 2018 Lecture : 2 minutes.

Le 16 mai, seize actrices noires et métisses ont défilé sur le tapis rouge du Festival de Cannes pour dénoncer les propos racistes et les plaisanteries douteuses qu’elles entendent régulièrement dans l’exercice de leur métier.

Elles en ont tiré Noire n’est pas mon métier, un ouvrage paru aux éditions du Seuil, dans lequel témoignent notamment Sonia Rolland, Miss France 2000, la comédienne Eye Haïdara, nommée aux césars pour son rôle dans Le Sens de la fête, ou encore Assa Sylla, révélée dans Bande de filles, avec Karidja Touré.

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Pas assez noir

Cette libération de la parole des actrices noires dans l’Hexagone sur un sujet jusqu’ici tabou va-t-elle inciter l’industrie cinématographique française, fondée comme toutes les autres industries culturelles sur des principes de rentabilité économique, à changer la représentation des Noirs à l’écran ? Rien n’est moins sûr. D’ailleurs, quinze jours seulement après le Festival de Cannes, un comédien afro-antillais bien connu racontait sur les réseaux sociaux que des producteurs lui ont expliqué à la sortie d’un casting que sa prestation était la plus convaincante, mais qu’il n’avait pas les traits suffisamment « négroïdes » pour obtenir le rôle.

Le cinéma français pratique l’« homéophilie », qui consiste à favoriser l’entre-soi

Le cinéma français est-il profondément raciste ? Il est avant tout « homéophile ». Ce terme renvoie à la pratique qui consiste à favoriser l’entre-soi et à orienter, de manière inconsciente, ses choix vers des personnes issues de son propre groupe ethnique.

>>> A LIRE – Racisme dans le cinéma : « Faire l’accent noir c’est l’une des requêtes principales »

Mâles blancs

Lorsque la comédienne Cate Blanchett déclare que « le cinéma est un milieu d’hommes », elle utilise subtilement une périphrase pour signifier que le cinéma est un milieu « de mâles blancs », une catégorie sociale que les mouvements d’émancipation féministes et des minorités ont réussi à « raciser ».

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De fait, seule l’instauration de quotas permettrait ici une digne égalité de traitement entre les professionnels du secteur cinématographique. La ministre française de la Culture, Françoise Nyssen, se dit favorable aux quotas pour assurer la parité entre femmes et hommes dans le monde du cinéma.

En ce qui concerne les populations noires issues de l’immigration postcoloniale, il ne fait aucun doute que seule une élite culturelle et économique choisie, conforme au savoir-être français, accédera à ce nouveau processus d’intégration par les quotas.

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