Tunisie : les génies du business 4.0

Du développement de solutions pour la finance à la création de jeux vidéo en passant par la conception d’objets connectés, les entreprises de services du numérique (ESN) tunisiennes se démarquent et marquent des points.

Les bureaux de Vermeg, aux Berges du Lac, à Tunis © Nicolas Fauqué/www.imagesdetunisie.com

Les bureaux de Vermeg, aux Berges du Lac, à Tunis © Nicolas Fauqué/www.imagesdetunisie.com

Publié le 29 mars 2018 Lecture : 4 minutes.

Une Tunisienne dépose son bulletin dans un bureau de vote, à La Marsa, banlieue de Tunis (Tunisie), le 21 décembre 2014. © Hassene Dridi/AP/SIPA
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Sommaire

L’économie tunisienne place une partie de ses plus sûrs espoirs de relance sous les bons auspices du numérique. Le secteur a contribué à 7,5 % du PIB en 2016 – mieux que le tourisme –, et son développement, amorcé dès le début des années 2000, ne semble pas près de s’arrêter. Avec des sociétés phares telles que Vermeg et Wevioo, mais aussi un tissu de PME et de start-up dont la dynamique est reconnue au niveau international, les entreprises de services du numérique (ex-SSII), à forte valeur ajoutée, couvrent 20 % des exportations du secteur des services. Soit plus de 1 milliard de dinars (plus de 406 millions d’euros) de chiffre d’affaires annuel en 2016, généré par 1 800 entreprises (dont 210 totalement exportatrices), qui emploient 100 000 personnes.

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La qualité des formations dispensées aux 12 000 ingénieurs issus chaque année des établissements publics et privés tunisiens fait du pays un réservoir de talents et un laboratoire de recherche et développement (R&D), mais aussi un pôle attractif pour l’externalisation ou la colocalisation (partenariat entre un privé tunisien et une entreprise étrangère) de services numériques, étant donné que les charges et le coût du travail y restent plus bas qu’en Europe.

Nous en sommes déjà à l’industrie numérique 4.0 !

Espérant renforcer le rôle de moteur du secteur pour l’économie et accélérer la constitution d’une plateforme technologique régionale axée sur le développement de systèmes et d’applications numériques pour la santé, l’éducation, l’e-gouvernement, l’État a engagé en 2016 un plan stratégique, Tunisie numérique 2020, avec à la clé la création de 95 000 emplois sur cinq ans. Fondé sur un partenariat public-privé et s’appuyant sur une infrastructure haut débit, ce plan, dont le coût s’élève à 5,5 milliards de dinars, risque, faute de moyens, de ne pas atteindre son objectif.

Des acteurs numériques de poids

Les entreprises privées, en revanche, ont le vent en poupe. « Nous en sommes déjà à l’industrie numérique 4.0 ! » lance Mehdi Tekaya, le président de Wevioo (ex-Oxia). Expert international en conseil, intégration et outsourcing, spécialisé en ingénierie applicative et intégration de progiciels finance, son groupe (créé en 1998) est devenu un acteur incontournable des stratégies de développement par l’innovation numérique, avec des filiales à Paris, Alger, Dubaï et, depuis janvier 2017, un bureau à Abidjan qui lui permet de renforcer sa présence en Afrique de l’Ouest.

Outre ses activités de conseil, le groupe tunisien conçoit notamment des applications et des services en robotique pour les PME, mais aussi des systèmes embarqués et des objets connectés pour ses clients européens (60 %), africains (25 %) et moyen-orientaux (15 %). Début février, le cabinet a été retenu par le ministère des Technologies de la communication pour assurer la mise en œuvre du plan Tunisie numérique 2020, en particulier sa composante e-gov ­(e-gouvernement) – un contrat de 511 000 dinars.

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Autre ESN de poids sur son créneau : Vermeg. Intégrateur de solutions et de services pour la banque et les assurances depuis plus de vingt ans, le groupe a développé une panoplie des plus pointues en matière de transformation numérique, avec l’objectif de devenir un leader mondial dans l’édition de solutions logicielles pour le secteur financier. Il a des bureaux dans cinq pays européens et emploie plus de 700 collaborateurs, dont 20 % en R&D.

L’acquisition de Lombard Risk portera le chiffre d’affaires de Vermeg à 100 millions d’euros

Fin février, Vermeg a franchi une étape clé dans sa stratégie en faisant l’acquisition de Lombard Risk, premier fournisseur mondial de solutions logicielles intégrées de reporting réglementaire et de gestion du collatéral. « Une opération qui portera le chiffre d’affaires de Vermeg à 100 millions d’euros [contre 54 millions en 2016] », assure Badreddine Ouali, le président et fondateur du groupe.

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Selon plusieurs sources au sein de l’Union européenne, Vermeg viendrait par ailleurs de remporter un appel d’offres de 50 millions d’euros pour la mise en place d’une solution logicielle exclusive destinée à l’ensemble des banques centrales de la zone euro.

Collectes de fonds

À côté de ces champions, une constellation de start-up tunisiennes brille également, avec ces derniers temps une prédilection pour l’univers des jeux, encore embryonnaire dans le pays mais dont le potentiel en matière de revenus et d’emplois est considérable. Ce créneau est principalement investi par de jeunes diplômés, habitués à la R&D et bien décidés à ce qu’elle soit rentable commercialement.

Parmi les jeunes PME les plus remarquées : PolySmart, fondée en 2014, et son « petit frère », le studio de création Nuked Cockroach, né en 2015, dont le « grand jeu », Veterans Online, en phase d’essai, est produit et sera distribué par PolySmart.

Après avoir déjà réussi à lever 2,2 millions de dinars, les fondateurs de PolySmart, Haroun Gharbi et Ahmed Cheikhrouhou, ont réalisé mi-2017 une nouvelle collecte de fonds de 1,5 million de dinars – la plus importante jamais effectuée au Maghreb dans l’industrie créative – grâce à la prise de participation de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) tunisienne. Ce qui leur a permis d’accélérer les dernières étapes de test du jeu avant son lancement, mais aussi d’ouvrir une antenne à Paris et une autre à Dubaï pour assurer la distribution et le marketing.

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