Robert Dussey : « Si le chômage des jeunes perdure, on court à la catastrophe »

Créer des emplois et améliorer les conditions de vie de la population ? Le gouvernement est dans les starting-blocks, comme l’explique le ministre des Affaires étrangères.

Le chef de la diplomatie, dans les locaux de Jeune Afrique, à Paris. © VINCENT FOURNIER/J.A.

Le chef de la diplomatie, dans les locaux de Jeune Afrique, à Paris. © VINCENT FOURNIER/J.A.

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Publié le 12 décembre 2015 Lecture : 3 minutes.

Togo, 5 ans pour tout changer © Àprésent
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Togo : 5 ans pour tout changer

Une décennie après son arrivée au pouvoir, Faure Gnassingbé entend donner la priorité au social au cours de son troisième mandat. Les défis ne manquent pas …

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Professeur de philosophie devenu conseiller diplomatique du président togolais, Robert Dussey (43 ans) dirige le portefeuille des Affaires étrangères, de la Coopération et de l’Intégration africaine depuis septembre 2013. À peine rentré du sommet sur la migration de La Valette (Malte), il prépare celui sur la sécurité et la sûreté maritimes, qui doit se tenir à Lomé en mars 2016.

Jeune Afrique : Selon la feuille de route du gouvernement, le quinquennat qui s’ouvre sera très social. Comment votre ministère compte-t-il y prendre part ?

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Robert Dussey : Ces dernières années, nous avons mis l’accent sur les réformes et sur la construction des infrastructures, mais nous sommes conscients qu’il n’y a pas que cela. La hausse de la croissance, dont le taux pourrait atteindre 6,6 % du PIB en 2016, ne se ressent pas encore sur le pouvoir d’achat des ménages. Ces prochaines années, nous souhaitons donc améliorer la vie des Togolais, leur apporter l’eau et l’électricité, faire en sorte que chacun puisse manger à sa faim… Nous espérons aussi pouvoir doter Lomé d’un centre hospitalier digne de ce nom et améliorer la couverture hospitalière du pays.

Comment la diaspora peut-elle mieux contribuer au développement du pays ? Et quels sont les objectifs de « Réussite Diaspora » ?

Sur 6 millions de Togolais, environ 2 millions vivent à l’étranger – 1,5 million en Afrique et 500 000 sur d’autres continents. Parmi eux, certains ont en effet des compétences dont notre pays pourrait bénéficier. Nous avons donc lancé un appel à candidatures pour qu’ils se manifestent. Un jury indépendant va sélectionner les meilleurs profils dans six catégories. Les candidats retenus seront présentés lors de la semaine de la diaspora, du 10 au 17 janvier. Dans le cadre d’un dispositif de codéveloppement, pour lequel nous avons le soutien du Pnud, de la Banque africaine de développement et de l’Union européenne, ceux qui voudront rentrer au Togo afin de monter un projet pourront bénéficier d’un financement pour faciliter leur retour et leur installation.

En six mois, plus de 1 780 Africains sont morts en Méditerranée

Le Togo s’apprête à accueillir un sommet sur la sécurité et la sûreté maritimes. Quels en sont les enjeux ?

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Le président Faure Gnassingbé s’est engagé pour la réussite de ce sommet, qui se tiendra en mars. Tout est fin prêt et, dans les jours qui viennent, nous en connaîtrons la date exacte. Cinq sujets seront abordés : la piraterie ; la traite des êtres humains, qui touche aussi à la question des migrants ; la pêche illégale ; la pollution marine ; ainsi que la contribution de la mer au développement du continent.

Nous mettrons un accent particulier sur la migration. En six mois, plus de 1 780 Africains sont morts en Méditerranée… Mi-novembre, lors du sommet de La Valette sur la migration, nous avons plaidé pour que les Africains qui prennent des risques sur les océans en quête d’un avenir meilleur en Europe soient mieux traités. Pendant des siècles, ce sont les Européens qui ont émigré. Le mouvement s’est aujourd’hui inversé. La migration ne devrait pas être traitée comme un problème. Dans notre perception, elle n’est pas négative.

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Estimez-vous que les dirigeants africains offrent à leurs jeunes un avenir suffisamment intéressant pour les dissuader de quitter leur pays ?

Ils font en général d’importants efforts pour retenir les jeunes, qui représentent la moitié de la population de la plupart de nos pays. Au Togo, nous savons qu’il est urgent de résoudre la question de leur employabilité, de trouver une meilleure adéquation entre formation et emploi, de faciliter la création de PME pourvoyeuses d’emplois, sinon nous ne pourrons pas les empêcher de vouloir partir. Et si le chômage des jeunes devait perdurer, alors nous irions vers une catastrophe. Regardez les rangs de Boko Haram et des Shebab : ils recrutent parmi les jeunes qui n’ont pas de travail… Je pense que nos dirigeants en sont conscients et font ce qu’ils peuvent dans un contexte économique qui ne nous est pas toujours favorable.

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