Beyoncé, Spike Lee, Toni Morrison… Les inspirations du mouvement Black Lives Matter
Le mouvement Black Lives Matter se nourrit de nombreuses références culturelles. Partagées sur les réseaux sociaux, les œuvres de Beyoncé, Toni Morrison ou Spike Lee sont devenues des symboles.
En seulement quatre minutes, les paroles et le clip de This is America, de Childish Gambino, dressent un sombre portrait de l’Amérique et de ses inégalités raciales. Truffée de messages plus ou moins explicites, la vidéo aux près de 700 millions de vues fait référence à plusieurs victimes noires tuées par la police et par les suprémacistes blancs.
La scène de gospel au cours de laquelle l’artiste fusille les membres d’une chorale, par exemple, fait clairement référence à la tuerie de Charleston en 2015. Au nom d’une « guerre entre les races », un Blanc avait abattu neuf membres de la communauté noire dans une église de Caroline du Sud.
Sortie en 2018, la chanson connaît une seconde vie : elle est devenue l’un des hymnes du mouvement Black Lives Matter sur le réseau social Tik Tok, où elle illustre des vidéos évoquant les violences policières.
Sula s’inscrit dans la longue liste des œuvres antiracistes de Toni Morrison, où les Noirs doivent lutter pour exister face à l’indifférence des Blancs. Elle tisse ici une histoire autour de l’amitié entre deux fillettes noires, sur fond de racisme, de traumatismes et de ségrégation dans l’Ohio des années 1920.
« Comme chacune avait compris depuis longtemps qu’elle n’était ni blanche ni mâle, que toute liberté et tout triomphe lui étaient interdits, elles avaient entrepris de créer autre chose qu’elles puissent devenir », écrit l’écrivaine américaine dans ce livre qui retrace le combat de toute une vie et de toute une communauté.
Le 25 mars 1965, plus de 25 000 personnes envahissent les rues de Montgomery. Leur revendication ? Obtenir le droit de vote, conformément au Civil Rights Act de 1964, qui met fin à la ségrégation envers les Africains-Américains et qui, dans l’État de l’Alabama, ne leur est toujours pas octroyé. Un mois plus tôt, la police a abattu un Noir qui protestait contre le fait que les Africains-Américains n’étaient pas inscrits sur les listes électorales.
La marche pacifiste, de Selma à Montgomery, est dirigée par le pasteur Martin Luther King. Quatre mois plus tard, en août 1965, le Voting Act Rights interdisant les discriminations raciales dans l’exercice du droit de vote sera signé. De célèbres clichés de cette marche circulent sur les réseaux sociaux et servent de modèle aux manifestations pacifistes antiracistes dont le monde est aujourd’hui témoin.
Il y a trente-deux ans, le célèbre groupe N.W.A entonnait Fuck tha Police, un classique du rap américain, devenu un symbole de la lutte contre le racisme et les violences policières. « Police think they have the authority to kill a minority » (« la police pense qu’elle a le droit de tuer une minorité »)… Les paroles de N.W.A résonnent aujourd’hui dans les manifestations aux États-Unis, au milieu des pancartes Black Lives Matter.
D’après les analystes d’Alpha Data, le titre aurait connu une progression de 272 % sur les plateformes de streaming audio entre le 27 mai et le 1er juin, au lendemain de la mort de George Floyd, asphyxié par un policier à Minneapolis.
Do the Right Thing, de Spike Lee (1989)
Plus que jamais d’actualité, Do the Right Thing s’inspire de la mort de Michael Griffin, renversé par une voiture alors qu’il était poursuivi par une douzaine d’hommes armés de battes de baseball. Le film célèbre la culture africaine-américaine tout en braquant les projecteurs sur les violences policières exercées à l’endroit de la communauté noire. Sur fond de tensions raciales, Spike Lee dépeint une bavure : un protagoniste est étranglé par un policier après une bagarre générale.
Le 1er juin, le réalisateur américain a diffusé sur son compte Twitter un montage mêlant cette séquence du film à des vidéos montrant le supplice d’Eric Garner et celui de George Floyd.
Ce cliché noir et blanc, très partagé sur les réseaux sociaux, date d’avril 2015. Il a été pris lors d’une manifestation, à Baltimore, provoquée par la mort de Freddie Gray après une interpellation. Devin Allen, qui souhaite devenir photographe, décide alors de couvrir l’événement par l’intermédiaire de son compte Instagram.
Son cliché deviendra la première couverture du magazine américain Time issue des réseaux sociaux. Relayée par plusieurs célébrités, dont la chanteuse Rihanna ou l’acteur Michael K. Williams, et par des médias comme BBC et CNN, cette image symbolique accompagne désormais le mouvement Black Lives Matter.
I Am Not Your Negro, de Raoul Peck et James Baldwin (2016)
— I Am Not Your Negro (@IAmNotYourNegro) May 2, 2017
En 1987, l’écrivain James Baldwin s’éteint en laissant un récit inachevé qui retrace les combats de Martin Luther King, de Malcolm X et de Medgar Evers. Il n’aura pu écrire que trente pages avant sa disparition. Le réalisateur haïtien Raoul Peck reprend alors le travail de l’écrivain, le retranscrit en images en y ajoutant archives et extraits d’émissions télévisées. I Am Not Your Negro (« je ne suis pas votre nègre ») relate la lourde histoire du racisme anti-Noirs dans une Amérique dominée par les Blancs.
Couronné par un césar en 2018, ce documentaire a inspiré les actions de Black Lives Matter. James Baldwin est d’ailleurs l’un des auteurs les plus cités sur le compte Twitter du mouvement, avec en étendard cette célèbre phrase : « Je ne suis pas un nègre, je suis un homme ».
« I break my chains all by myself/ Won’t let my freedom rot in hell » (« je brise mes chaînes moi-même, je ne laisserai pas ma liberté pourrir en enfer »). Ces paroles prononcées par Beyoncé dans le refrain de son titre Freedom, l’un des « hymnes » non officiels de Black Lives Matter, reflètent l’atmosphère de son album Lemonade, sorti en avril 2016. Un opus qui rend hommage à la femme noire et à la culture africaine-américaine, et qui dénonce également l’esclavagisme et les bavures policières.
Dans le clip de la chanson Formation, Beyoncé apparaît debout sur une voiture de police qui sombre dans l’eau. Dans le film qui a accompagné la sortie de cet album, et plus particulièrement dans le titre Forward, les mères d’Éric Garner, de Michael Brown et de Trayvon Martin posent avec des photos de leurs fils, dont la mort a été à l’origine du mouvement Black Lives Matter.
Femme, noire, lesbienne, militante, poétesse… Toutes les facettes de la personnalité d’Audre Lorde se retrouvent dans ses œuvres et dans ses luttes. Dans le recueil Sister Outsider, elle examine la question de l’identité « intersectionnelle » à travers les différentes oppressions qu’elle a subies au cours de sa vie : racisme, homophobie et sexisme.
Inscrits dans le mouvement des droits civiques en faveur des Africains-Américains, ses écrits explorent un large éventail de sujets, dont le féminisme blanc et la brutalité policière, ce qui lui vaut d’être le cinquième auteur le plus cité par Black Lives Matter.
Jeune Afrique
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