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Afrique du Sud: les médecins appellés à manifester en masse

Les médecins d’Afrique du Sud descendent dans la rue vendredi en une rare manifestation de masse contre le désarroi du secteur de la Santé publique, dont dépend 80% de la population.

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Mis à jour le 29 mai 2009 à 09:25

Afrique du Sud: les médecins appellés à manifester en masse © AFP

L’Association nationale des médecins (Sama) a appelé à la manifestation en espérant obtenir du gouvernement issu des élections du 22 avril qu’il tienne les engagements de la précédente administration.

La frustration des médecins du secteur public, qui réclament notamment une réévaluation de salaire de 50%, s’est traduite le mois dernier en une série de grèves considérées comme illégales, leur fonction étant considérée comme vitale au même titre que celle des soldats ou de la police.

Ils dénoncent des salaires ridicules – de l’ordre de 800 dollars pour les internes à quelque 1. 600 dollars pour les spécialistes – pour une charge de travail démesurée, qui les contraint à travailler jusqu’à 36 heures d’affilée sans compensation, avec des carences de médicaments et d’équipements.

L’Afrique du Sud compte 14. 000 médecins dans le secteur public, pour quelque 40 millions de patients, soit très loin du ratio recommandé par l’Office mondial de la Santé (OMS) de huit docteurs pour 10. 000 personnes. Selon le ministère de la Santé, 80% des 48 millions de Sud-Africains dépendent en effet du secteur public, incapables de payer les assurances médicales privées. En Afrique du Sud, 43% de la population vit avec moins de deux dollars par jour.

« Il est temps de faire connaître nos réclamations », a déclaré à l’AFP la présidente de la Sama, Denise White. « Il y a déjà eu des manifestations mais cette marche est l’étape suivante », a-t-elle ajouté.

Selon une étude indépendante, les médecins du secteur public perçoivent un salaire inférieur de 50 à 75% à ceux du privé, alors que leurs conditions de travail sont beaucoup plus difficiles.

« Lors de négociations initiales, l’Etat a offert une hausse pathétique de 5% », a souligné Mme White. « Cela n’a fait que mettre les docteurs plus en colère. « 

Soutenus par leurs collègues du privé, les médecins du public doivent défiler en portant un brassard noir, symbolisant « le deuil d’un système de santé mourant. « 

Une telle action est « extrêmement rare » puisqu’elle implique de quitter des malades qui n’ont souvent recours aux hôpitaux qu’en dernière extrémité, a souligné Thobile Mbengashe, directeur de l’organisme de recherche Health Systems Trust.

La confédération syndicale Cosatu a mis en garde le nouveau président, Jacob Zuma, contre la « bombe à retardement » que constitue selon elle le non respect d’engagements salariaux pris par le précédent gouvernement en juillet 2008.

Une grève massive du secteur public tout entier avait paralysé le pays un an plus tôt.

Le mois dernier, quelque 400 docteurs se sont mis en grève pour protester contre leurs conditions de travail, s’attirant des lettres d’avertissement du ministère de la Santé.

Mais « nous n’avons plus le choix », a souligné l’un des chefs de file de ce mouvement, Mpho Mohlala, lors d’un entretien avec l’AFP. « Nous ne pouvons pas offrir des soins de base aux patients. Vous pensez vraiment que l’on est encore en mesure d’opérer après un service de 36 heures? »

Face à de telles pressions sur les médecins, ces derniers fuient les hôpitaux publics. Comme le constate Mme Mohlala, « nous faisons face à un exode des médecins qui quittent le pays ou bien passent au privé. «