A quelques encablures de la commune de Loropéni (430 km au sud-ouest de Ouagadougou), se dressent, en pleine brousse, des murailles faites de blocs de pierre rouge et de moellons de latérite de six mètres de haut par endroits.
D’autres blocs, détachés de la bâtisse, jonchent le sol.
En Afrique de l’Ouest, « ce site est vraiment exceptionnel » souligne le professeur d’archéologie à l’Université de Ouagadougou, Jean-Baptiste Kiéthéga, quelques jours avant la réunion des experts de l’Unesco (22-30 juin à Séville, Espagne) qui pourraient le distinguer.
« Exceptionnel d’abord par ses dimensions » – plus de 1. 100 m2 de superficie – « mais également par les nombreuses constructions qu’on trouve à l’intérieur », dit-il. Exceptionnel également par son âge « car les fouilles archéologiques ont permis d’établir qu’il a commencé à être occupé au XIè siècle », selon l’archéologue.
Quand le Burkina Faso a tenté une première fois, il y a quatre ans, d’obtenir l’inscription de cet ensemble au Patrimoine mondial, le comité lui a demandé de « compléter » son dossier.
Des recherches complémentaires ont donc été entreprises l’an dernier par le laboratoire du Pr. Kiéthéga, appuyé par une demi-douzaine de chercheurs béninois, burkinabè, ivoiriens et togolais.
« Loropéni n’a pas fini de révéler tous ses mythes », relève M. Kithéga, mais on y a découvert des céramiques, des armes (flèches, lances), des outils aratoires.
Et « nous avons trouvé à proximité une mine d’or et une balance à peser l’or, donc il est évident que l’activité d’exploitation de l’or existait », ajoute-t-il.
L’ensemble avait été « découvert » en 1912 par le Français Henri Labouret, un administrateur colonial qui évoqua plus tard, dans un article, les « mystères des ruines du Lobi », du nom de l’ethnie majoritaire dans la région.
Aujourd’hui, les scientifiques attribuent les ruines aux autochtones, les Koulango, une petite tribu actuellement partagée entre le sud-ouest du Burkina et la région de Bouna au nord-ouest de la Côte d’Ivoire.
Les Koulango pratiquaient le commerce de l’or à travers la Boucle du Niger jusqu’à l’arrivée des colonisateurs au début du XIXe siècle.
Ils ont alors commencé à communiquer avec la côte maritime de l’ancienne Gold Coast (actuel Ghana) et de la Côte d’Ivoire.
Or « l’exploitation de l’or et le commerce entraînent de l’insécurité, d’où la nécessité d’imaginer des systèmes de défense », fait valoir M. Kiéthéga.
Le chercheur développe l’hypothèse selon laquelle « Loropéni est un système de défense conçu par ceux qui vivaient ici, pour se protéger de ceux qui allaient les attaquer ».
« Ils n’ont pas conçu ce site pour faire la guerre, ils l’ont fait pour se protéger », estime l’archéologue.
Encore très peu connues, les ruines sont menacées par l’érosion ou par l’expansion de la végétation. Mais elles pourraient être, une fois mises en valeur, un moteur pour le tourisme dans le sud-ouest de ce pays pauvre, dont les principales ressources sont le coton, l’élevage, l’or et la canne à sucre.
Le gouvernement burkinabè est déjà prêt à accorder 200. 000 dollars pour la réhabilitation de ce « bien culturel ».