Algérie : réactions mitigées après le lancement des réformes de Bouteflika

Lundi soir, le gouvernement algérien a donné son feu vert à une série de réformes politiques. Annoncées en avril par le président Bouteflika pour « démocratiser » le régime, elles sont jugées insuffisantes par une large partie de la presse et de l’opposition.

Les réformes d’Abdelaziz Bouteflika peinent à convaincre la presse et l’opposition.

Les réformes d’Abdelaziz Bouteflika peinent à convaincre la presse et l’opposition.

Publié le 13 septembre 2011 Lecture : 3 minutes.

Près de 24 heures. Jamais un conseil des ministres n’avait duré aussi longtemps en Algérie. Il faut dire que le président Bouteflika et son équipe gouvernementale étaient attendus au tournant. En avril, le chef de l’État avait solennellement pris la parole à la télévision nationale pour annoncer une série de réformes démocratiques. Sous l’influence des révolution tunisienne ou égyptienne, le régime veut éviter que la rue algérienne ne déborde une nouvelle fois.

Réactions mitigées

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Lundi soir, donc, après deux jours d’un conseil des ministres marathon dirigé par le président, le gouvernement algérien a officiellement annoncé le lancement des réformes tant attendues. Ouverture de l’audiovisuel au secteur privé, dépénalisation du délit de presse, nouvelle loi sur les partis politiques : à première vue, les changements programmés sont importants. Mais les réactions sont plus que mitigées.

« La montagne a accouchée d’une souris, analyse le quotidien El Watan. Rien de nouveau, ou presque. On constate que le président de la République et ses ministres n’ont pas révolutionné la législation algérienne en matière de pratique politique, de fonctionnement du mouvement associatif et de l’exercice médiatique ».

La révolution sera (seulement) audiovisuelle

Pour beaucoup, le seul changement d’envergure réside dans l’ouverture à la concurrence du secteur de l’audiovisuel, mettant ainsi un terme à un monopole d’État. Le texte prévoit également la création d’une autorité de régulation des médias audiovisuels. Selon le projet de loi, l’ouverture de l’audiovisuel est proposée sur la base d’une « convention qui sera conclue entre la société algérienne de droit privé concernée et une autorité de régulation de l’audiovisuel, validée par une autorisation délivrée par les pouvoirs publics ».

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Autre changement important à souligner : la dépénalisation du délit de presse, réclamée par les journalistes algériens depuis les années 1990. Pour le reste, rien de révolutionnaire. « Les avant-projets de lois sur les partis politiques et les associations n’apportent aucune nouveauté », souligne El Watan.

Du côté de l’opposition, même son de cloche. À travers un communiqué, le Front des forces focialistes (FFS) « exprime sa conviction que le processus de réformes engagé par le pouvoir algérien ne va pas dans la bonne direction. Il n’offre aucune garantie pour le pluralisme politique, la démocratie, les libertés et les droits de l’homme». Le plus vieux parti de l’opposition dénonce aussi « la persistance des logiques et des gestions sécuritaires en Algérie, appelle ses partenaires politiques à refuser les chantages à l’instabilité et à l’insécurité dans l’aire maghrébine comme il appelle à refuser les marchandages douteux en matière économique et énergétique ».

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Le Mouvement de la société pour la paix (MSP), qui fait pourtant partie de l’alliance présidentielle au pouvoir, a également émis des doutes sur les réformes politiques annoncées par le gouvernement. Son président Bouguerra Soltani craint que l’administration entrave la réalisation de ces réformes « par son hésitation et son incapacité à parfois s’adapter aux mutations qui s’opèrent dans la société ».

Un appel à "la révolution algérienne" sur Facebook

Outre les réformes, un autre phénomène agite actuellement l’agenda politique algérien. Depuis fin août, une page en arabe intitulée « La révolution algérienne du 17 septembre 2011 » est en ligne sur le réseau social Facebook. On peut y lire « Ensemble pour le peuple et pour la liberté sur la terre d’Algérie » ou encore « Révolution pour virer les voleurs de l’argent public, révolution pour renverser le régime militaire ». Début septembre, plusieurs sources ont également évoqué la circulation de tracts appelant à la révolte le 17 septembre dans plusieurs grandes villes du pays.

Les médias arabophones pro-gouvernementaux comme El-Chourouk ont rapidement fait campagne contre cette initiative. D’après eux, elle serait l’œuvre de complices de Bernard-Henri Lévy et de l’OTAN qui voudraient déstabiliser l’Algérie. Sur Facebook, de nombreuses pages « anti-révolution du 17 septembre » ont été créées.

Pour le moment, de gros doutes existent sur la crédibilité du « mouvement du 17 septembre ». Contrairement aux manifestations de janvier et février, personne n’a signé la page Facebook ni les tracts. Pour la plupart des journalistes et des activistes politiques, cette initiative anonyme est suspecte de manipulation. Une partie du mystère sera peut-être levé samedi prochain, jour programmé de « la révolution algérienne », selon Facebook.

 

 

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