« Nous avons un lieu, Accra, pour accueillir le secrétariat de la Zleca. Maintenant il nous faut un chef », glisse un ministre des Affaires étrangères, à quelques mètres de l’entrée du grand hall Nelson Mandela. Sous entendu : ce chef, l’Union africaine ne l’a pas encore, et elle est peut-être loin de parvenir à le trouver.
Réunies à huis-clos en conseil exécutif, les délégations ministérielles africaines ne se sont, pour l’instant, pas accordées sur le nom du futur secrétaire général de l’organisation chargée de la coordination de la mise en œuvre de l’accord.
Selon nos informations, il y avait pourtant l’embarras du choix. Quelque 120 candidatures auraient été déposées, avant que ne soit effectué un premier écrémage, retenant six noms. Après de nouvelles discussions, une nouvelle sélection est venue réduire la liste à trois : un candidat proposé par la RDC, un autre par le Nigeria et un dernier par l’Afrique du Sud. Exit, par exemple, la candidature camerounaise, qui se console en revanche d’avoir placé l’un de ses ressortissants au sein du futur Conseil de paix et de sécurité.
Hégémonie sud-africaine ?
Mais, depuis, le processus est bloqué. Et la tension est montée d’un cran. Plusieurs délégations ont en effet trouvé de mauvais goût que deux des trois candidatures restantes, en l’occurrence la Congolaise et la Nigériane, aient été proposées par des pays n’ayant pas encore ratifié le traité de la Zleca. « C’est effectivement étrange. Mais c’est le jeu : tout Africain peut se porter candidat à ce poste », philosophe un dirigeant d’agence de l’UA.
Les Nigérians ont fermé leurs frontières avec le Bénin et le Niger et maintenant ils veulent être champions du libre-échange
Selon cette logique, la candidature sud-africaine paraît donc avoir une longueur d’avance. « Le Nigeria n’avait qu’à ratifier le traité », confie un ministre. « Symboliquement, c’est compliqué pour le Nigeria. Ils ont fermé leurs frontières avec le Bénin et le Niger et maintenant ils veulent être champions du libre-échange… », poursuit un autre diplomate, dubitatif.
Seulement, tout n’est pas réglé en faveur de Pretoria. Certains pays membres redoutent de voir l’Afrique du Sud prendre trop d’importance sur la scène continentale. Celle-ci occupe déjà en 2020 la présidence tournante de l’Union africaine, avec Cyril Ramaphosa, et elle a récemment intégré la « troïka » sur le Sahara occidental.
Une rencontre Ramaphosa-Tshisekedi-Buhari ?
Les discussions devraient donc se poursuivre dans les prochains jours, cette fois entre chefs d’État. Les présidents sud-africain Cyril Ramaphosa, nigérian Muhamadu Buhari et congolais Félix Tshisekedi sont attendus à Addis-Abeba et doivent se rencontrer au plus tard dimanche, pour l’ouverture du sommet des chefs d’État.
Selon nos informations, le nom du secrétaire général pourrait être annoncé après ces rendez-vous de haut-niveau. Sauf surprise de dernière minute… « Il reste encore du temps », glisse un diplomate d’Afrique centrale, qui connaît parfaitement les méandres du siège de l’UA. Le secrétariat général de la zone de libre-échange doit en effet être opérationnel « d’ici mars », selon les textes de l’organisation panafricaine.
Un sommet extraordinaire de l’Union africaine (qui doit également aborder les questions de sécurité) sera organisé en mai, à Johannesburg, en Afrique du Sud, pour mettre définitivement en ordre de marche la zone de libre-échange. Selon le calendrier de l’UA, le démantèlement des tarifs douaniers doit en effet commencer au plus tard le 1er juillet 2020, afin de marquer le début des échanges « libres » à la même date.