L’avenir de l’opération anti-corruption gabonaise Scorpion va-t-il se jouer en France ? Le 21 janvier, deux des principaux accusés, l’ancien directeur de cabinet d’Ali Bongo Ondimba (ABO), Brice Laccruche Alihanga (BLA), et son frère Grégory ont déposé plainte devant la justice française au sujet de leur incarcération à la prison de Libreville, qu’ils jugent abusive.
Par l’intermédiaire de leurs avocats, Anges Kevin Nzigou et Dominique Inchauspé, les deux hommes, qui disposent tous deux de la nationalité française, ont déposé une « plainte avec constitution de partie civile contre X pour atteinte à la liberté individuelle, violences volontaires volontaires et menace de mort commises en bande organisée ».
« Les conditions de cette opération [Scorpion, NDLR] sont constitutives d’une détention arbitraire au sens du Code pénal français en raison du non-respect des règles de droit gabonais : aucun accès au dossier, dépassement des délais normaux de garde à vue, pas de débat avant l’incarcération, etc… », expliquent les avocats de la fratrie Laccruche Alihanga.
Nationalité française
Ceux-ci précisent que le « tribunal de Paris est compétent car MM. Brice et Grégory Laccruche sont de nationalité française, ainsi que plusieurs autres protagonistes de cette affaire, dont M. Noureddin Bongo Valentin ». Nommé coordinateur principal des affaires présidentielles, le fils d’Ali Bongo Ondimba est régulièrement accusé d’être le principal instigateur (et bénéficiaire) des coups de filet de novembre et décembre.
« Pourquoi cibler Noureddin Bongo Valentin ? Il n’a aucune fonction dans l’appareil judiciaire et n’est pas à l’origine des poursuites pénales qui touchent Brice et Grégory Laccruche », rétorque la présidence gabonaise, contactée par Jeune Afrique. Celle-ci conclut : « L’initiateur de l’opération Scorpion, c’est le chef de l’État Ali Bongo Ondimba, et pas son fils ».
Né le 1er juillet 1980 à Marseille (France) de Norbert Fargeon et Élizabeth Dupont, deux travailleurs français ayant émigré au Gabon pour travailler à la Société nationale des bois du Gabon (SNBG), Brice Laccruche Alihanga dispose, comme son frère Grégory, de passeports français et gabonais. Leur mère s’était remariée le 26 octobre 1984 à Libreville avec Louis André Laccruche Alihanga, directeur général de la SNBG, originaire de Franceville, dans le Haut-Ogooué.
Depuis peu, les conditions de détention de BLA se sont durcies à la prison de Libreville. S’il dispose depuis peu d’une cellule pour lui seul, le droit de visite lui a été récemment retiré, selon ses avocats. Cette mesure « courrait jusqu’au 26 janvier 2020 », a alerté Anges Kevin Nzigou, qui ajoute : « Cette énième violation des droits prouve que les détenus de l’opération Scorpion sont traités en marge de la loi ».