Dopage et corruption dans l’athlétisme : Lamine Diack jugé à Paris

L’ancien patron de la fédération internationale d’athlétisme doit s’expliquer devant les juges à Paris alors qu’il fait face à des accusations de corruption. Depuis son arrestation en France en novembre 2015, les affaires se sont multipliées et emmèneront le tribunal jusqu’en Russie.

Lamine Diack (Senegal), ancien athlete de haut niveau (saut en longueur), il est devenu president de la Federation internationale d’athetisme (IAAF) en 1999, puis mis en examen en 2015 pour corruption passive et blanchiment aggrave. Il lui est interdit de quitter le territoire français jusqu’a son proces, qui devrait s’ouvrir en 2019. A Paris, le 24.06.2019. Vincent Fournier/JA © Vincent Fournier/JA

Lamine Diack (Senegal), ancien athlete de haut niveau (saut en longueur), il est devenu president de la Federation internationale d’athetisme (IAAF) en 1999, puis mis en examen en 2015 pour corruption passive et blanchiment aggrave. Il lui est interdit de quitter le territoire français jusqu’a son proces, qui devrait s’ouvrir en 2019. A Paris, le 24.06.2019. Vincent Fournier/JA © Vincent Fournier/JA

Publié le 13 janvier 2020 Lecture : 3 minutes.

Lamine Diack à Pékin le 21 août 2015. © Kin Cheung/AP/SIPA
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Affaire Lamine Diack : corruption et dopage dans l’athlétisme

Du Sénégal à la Russie en passant par Paris, l’affaire Lamine Diack secoue le monde du sport. L’ancien patron de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) fait face à des accusations de corruption pour lesquelles il comparaît à Paris du 13 au 23 janvier. Retour sur les dessous d’un dossier hors normes, entre sport, dopage, business et politique.

Sommaire

Le scandale avait porté un rude coup à l’image de l’athlétisme en 2015: l’ancien patron de la fédération internationale (IAAF), Lamine Diack, est attendu lundi au tribunal de Paris pour être jugé avec son fils et quatre acteurs présumés d’un système de corruption voué à protéger des athlètes russes dopés.

A 86 ans, le Sénégalais, qui a régné de 1999 à 2015 sur l’IAAF, a rendez-vous avec les juges de la 32e chambre correctionnelle du tribunal de Paris, à 13h30, pour répondre des délits de corruption active et passive, abus de confiance et blanchiment en bande organisée. Il risque jusqu’à dix ans de prison et une lourde amende.

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L’affaire avait précipité la chute de ce cacique du sport mondial aux mille vies, ancien athlète et joueur de football avant d’entrer en politique (maire de Dakar 1978-1980, parlementaire de 1978 à 1993) puis de devenir le premier dirigeant non-européen de l’IAAF.

Affaires multiples

Depuis son arrestation à Paris en novembre 2015, les affaires se sont multipliées: la Russie a été accusée de dopage institutionnel et Lamine Diack est aussi mis en examen pour corruption, soupçonné d’avoir monnayé son influence dans les processus d’attribution des Jeux olympiques de Rio-2016 et Tokyo-2020 et des Mondiaux d’athlétisme 2015 à Pékin, ainsi que pour Doha, qui a obtenu les Mondiaux-2019 après un échec pour 2017. Des soupçons qu’il réfute.

À son procès, il est attendu avec l’un de ses anciens conseillers, l’avocat Habib Cissé, et l’ancien responsable du service antidopage de l’IAAF, Gabriel Dollé, jugés pour corruption passive.

Si Lamine Diack a interdiction de quitter le pays, la justice française n’a jamais pu approcher l’un des acteurs clé de l’affaire, son fils Papa Massata Diack, l’ancien puissant conseiller marketing de l’IAAF, réfugié à Dakar. Probablement absent, « PMD » entend néanmoins se défendre via ses avocats pendant les six demi-journées d’audience, étalées sur deux semaines.

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Devraient aussi manquer à l’appel l’ancien patron de la fédération russe d’athlétisme, Valentin Balakhnitchev, et l’ancien entraîneur national des courses de fond, Alexeï Melnikov, soupçonnés d’avoir soutiré des sommes à sept athlètes en échange de leur protection contre des sanctions, pour un total évalué à 3,45 millions d’euros.

Voyages à Moscou

Début des années 2010: l’arrivée du passeport biologique, qui permet de déceler des variations sanguines anormales, met la pression sur la Russie. En novembre 2011, l’IAAF dispose de 23 noms d’athlètes suspects.

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Mais Lamine Diack, Habib Cissé et Papa Massata Diack multiplient les voyages à Moscou et les dossiers disciplinaires traînent en longueur, permettant à plusieurs athlètes de participer aux JO de Londres-2012, et pour certains d’être médaillés, comme les marcheurs Sergey Kirdyapkin et Olga Kaniskina ou Yuliya Zaripova (3000 m steeple). Leurs titres seront retirés pour dopage.

Durant l’enquête, Lamine Diack a reconnu que les sanctions ont été échelonnées pour ne pas plomber l’image de la Russie, sur fond de négociations sur les droits télé et le sponsoring de la banque d’Etat VTB pour les Mondiaux de Moscou de 2013.

« Il fallait différer la suspension des athlètes russes pour obtenir le contrat VTB », a-t-il convenu.

Politique

L’ancien maire de Dakar a aussi concédé qu’il avait obtenu 1,5 million d’euros de la Russie pour soutenir l’opposition lors de la campagne électorale de 2012, face au président sortant, Abdoulaye Wade.

Mais pour ses avocats, les athlètes russes ont bien été sanctionnés (la plupart en 2014) et Lamine Diack cherchait avant tout à sauver l’IAAF de la faillite. Ils réfutent tout lien entre le jeu diplomatique de Moscou et les dossiers sportifs.

« Concomitance ne veut pas dire contrepartie », assurent William Bourdon et Simon Ndiaye.

L’enquête a permis de retrouver la trace d’un virement de 300 000 euros, provenant d’un compte singapourien associé à Papa Massata Diack, en faveur de la marathonienne Liliya Shobukhova, en guise de « remboursement » après sa suspension en 2014.

Lamine Diack est aussi jugé pour avoir permis à son fils de s’approprier d’importantes sommes dans les négociations avec les sponsors, en imposant ses sociétés comme intermédiaires, ou via des commissions « exorbitantes ». L’IAAF, rebaptisée World Athletics et présidée par Sebastian Coe, réclame 24,6 millions d’euros sur ce volet, sur un préjudice estimé à 41 millions.

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