Le char et l’olivier, une autre histoire de la Palestine est un documentaire historique habilement réalisé sur un sujet important mais qui laisse pourtant perplexe. En bref, il s’agit, à partir d’interviews d’historiens et de journalistes spécialisés, entrecoupées de documents audiovisuels et de témoignages de réfugiés palestiniens, de raconter comment a été « conçu » puis réalisé le projet sioniste de création d’un nouveau pays, Israël, peuplé essentiellement de juifs et occupant de la majorité des terres palestiniennes.
Moments-clés de l’histoire palestinienne
L’enquête commence au XIXème siècle, où l’on évoque l’ambition de Théodor Herzl de fonder un foyer juif, et se poursuit à l’époque des accords Skyles-Picot de 1916 et de la Déclaration Balfour de 1917, qui changent la carte de la région et le cours de l’histoire au Moyen-Orient. Elle se prolonge alors jusqu’aux lendemains de la Seconde guerre mondiale, où est créé, en mai 1948, l’État d’Israël, et, enfin, jusqu’à aujourd’hui où la question de la création décidée par l’ONU d’un État palestinien reste non résolue, de même que le sort des millions de réfugiés palestiniens à Gaza et dans les pays arabes.
L’aspect pédagogique du documentaire permet de bien faire comprendre quels ont été les moments-clés de l’histoire de cette terre connue sous le nom de Palestine, et les racines de la tragédie que vivent depuis désormais presque trois-quarts de siècle les anciens occupants non-juifs du territoire. Mais comme l’indique son titre, ce documentaire propose une « autre histoire » de la Palestine. En ce sens, elle n’entend évoquer le sujet qu’à partir d’un seul point de vue, celui des défenseurs de la cause palestinienne. Pourquoi pas, si le projet est clairement énoncé. Mais ce n’est pas vraiment le cas puisque tout ce qui est dit est présenté du début à la fin comme « la vérité », et non pas comme la vérité des militants pro-palestiniens.
Frustration
Certes, la quasi-totalité des propos des intervenants sont, semble-t-il, exacts et souvent présentés de manière intéressante. Mais jamais n’apparaît l’once d’une interrogation sur la possibilité d’entendre une autre interprétation de ces mêmes événements.
Surtout, le film fait l’impasse sur tous les aspects du sujet qui pourraient éclairer d’un autre jour l’histoire racontée. Aucune interrogation, par exemple, sur l’attitude pour le moins ambiguë, à maintes occasions, des États arabes vis-à-vis de la question palestinienne. Pas plus que sur la légitimité ou même simplement l’opportunité du recours au terrorisme pendant tout un temps par les combattants palestiniens. Ou encore sur les divisions entre les mouvements palestiniens et sur l’évolution parfois « acrobatique » de leur doctrine face à Israël et à propos de la simple question de son existence.
Il est évident que ces analyses et ces récits seraient plus convaincants si on évoquait les argument de ceux qui les contestent, ne serait-ce que pour les réfuter
Résultat : même quand on partage la plupart des analyses des intervenants et même quand on estime acceptables la plupart des récits historiques proposés, on est frustré comme l’est tout spectateur d’un film n’autorisant aucun recul et aucune réflexion sur le sujet. Il est évident que ces analyses et ces récits seraient plus convaincants si on évoquait les argument de ceux qui les contestent, ne serait-ce que pour les réfuter.
En fin de compte, ce film n’informera et ne convaincra que les convaincus. Qui trouveront sans doute dans son contenu de quoi conforter leurs certitudes et une « arme cinématographique » pour mener leur combat en faveur des Palestiniens. Mais une arme qui ne les aidera guère à débattre avec leurs éventuels contradicteurs, faute de connaître leurs arguments, qu’ils soient ou non fondés.