Après avoir été sous le feu des projecteurs sur la scène politique nationale lors de sa sortie du gouvernement, le parti du livre a provoqué quelques remous diplomatiques. En effet, un communiqué, dans lequel il qualifie l’intervention turque en Syrie « d’agression » et de « crime de guerre », n’a pas été du goût d’Ankara. L’ambassadeur turc au Maroc a dénoncé « une vague de désinformation » en faisant allusion, entre autres, au texte du PPS.
« Pour continuer à exister politiquement, le parti a besoin de créer l’événement, de faire du buzz. Mais c’est un terrain glissant », s’alarme une source proche des socialistes. En effet, les dérapages diplomatiques peuvent précipiter la chute de personnalités publiques, comme récemment celui de Salaheddine Mezouar, désormais ancien président de la CGEM, qui l’a appris à ses dépens après son commentaire « irresponsable » sur la situation en Algérie.
Alliance contre-nature avec le PJD
Pour apporter ses 18 sièges gagnés aux législatives de 2011 à la coalition dirigée par les islamistes du Parti de la justice et du développement (PJD), Nabil Benabdallah avait alors réussi à négocier quatre maroquins ministériels. Une aubaine pour le parti, qui sortait d’une coalition avec l’Istiqlal (allié historique au sein de la Koutla) avec deux petits départements seulement. Largement de quoi justifier par les camarades de l’ancien parti communiste cette alliance contre-nature avec les frères du parti islamiste…
Nabil Benabdallah a trouvé insultante l’offre de prendre le département de la Jeunesse et des Sports, alors qu’il contrôlait la Santé et l’Habitat
Huit ans plus tard, la formation – qui a perdu en poids électoral – a vu sa position dans le gouvernement se réduire au fil des ajustements ministériels. « Quand l’offre a été réduite à un seul ministère lors du dernier remaniement, le jeu n’en valait plus la chandelle pour les principaux dirigeants du parti, poursuit notre informateur. Nabil Benabdallah a trouvé insultante l’offre de prendre le département de la Jeunesse et des Sports, alors qu’il contrôlait deux secteurs sensibles que sont la Santé et l’Habitat. »
Entre-deux
En tournant la page de l’alliance avec le PJD, le parti du livre a l’ambition de se refaire une virginité dans les rangs de l’opposition. Un nouveau chapitre qui s’annonce déjà riche en péripéties. Ainsi, la décision du dernier bureau politique, réuni le 23 octobre, d’officialiser différentes sanctions contre des figures qui ont plaidé pour le maintien du PPS au gouvernement – notamment l’expulsion de l’ancien ministre de la Santé Anas Doukkali – n’a pas fait l’unanimité.
Le parti de Nabil Benabdallah devra aussi trouver la bonne formule pour se montrer crédible dans son nouveau rôle. « Concrètement, il sera appelé à dire ‘non’ à des projets sur lesquels ses membres avaient travaillé auparavant, explique notre source. C’est une démarche qui pourrait mettre les députés du PPS dans une situation de confusion politique. » Dans les communes où la formation compte, le jeu des alliances pourrait également se trouver affecté. « Mais surtout, les élus redoutent une perte des relais, voire des parapluies à Rabat. »
Ce chamboulement ne semble pourtant pas perturber les soutiens du secrétaire général, qui a regagné la confiance de ses camarades jusqu’en 2022 en étant récemment confirmé pour un troisième mandat. « Nos élus seront plus libres pour s’exprimer et contribuer à une opposition constructive, affirme un jeune du parti proche de Benabdallah. Nos instances auront plus de temps pour se consacrer à renforcer notre ancrage régional, comme en témoignent les dernières manifestations que nous avons organisées. »
Le PPS s’est effectivement lancé dans une série de congrès régionaux, avec parfois un renouvellement des instances. Objectif : recruter de nouvelles compétences pour renforcer les rangs d’ici les scrutins de 2021. Reste maintenant à voir si son offre politique peut encore séduire…