Début septembre, le président guinéen avait enjoint « tous les acteurs impliqués dans l’organisation des élections législatives à redoubler d’effort et d’ardeur », Alpha Condé leur fixant pour objectif « que ces élections se tiennent dans le courant de cette année ». Deux semaines plus tard, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), Salif Kebé, fixait la date au 28 décembre prochain.
Ce calendrier est-il tenable ? Si le président de la Ceni assure que oui, des doutes émergent jusqu’au sein de l’exécutif guinéen. Les retards accumulés dans le chronogramme que s’était fixé l’institution, tant sur le plan matériel que sur l’enrôlement des électeurs, font même craindre un possible report.
« Techniquement les législatives ne peuvent pas se tenir à la date du 28 décembre 2019. Un report serait préférable », estime même une source au sein d’un cabinet ministériel, qui a requis l’anonymat. « Les membres de la Ceni sont en retard sur le chronogramme qu’ils ont fixé », a confié à Jeune Afrique ce cadre de l’exécutif proche du dossier, qui s’inquiétait notamment, jeudi matin, du « manque d’environ un millier de kits électoraux sur les 4 000 commandés par la Ceni » à la société sud-coréenne Miru Systems.
Accumulation de retards
David Camara, président du comité de pilotage de la Ceni, se veut au contraire rassurant, et dément « tout retard de livraison ». Les fameux kits ont bel et bien été livrés, jeudi 10 octobre. « Les 4 004 kits ont été livrés et sont à ce jour assemblés. Dès samedi, nous débuterons l’installation du logiciel électoral sur les tablettes », a-t-il détaillé jeudi soir, à l’issue d’une réunion technique à la Ceni.
Ces kits comportent notamment une tablette par bureau de vote, pourvue d’un logiciel dédié permettant de prendre les empreintes des électeurs. Le but étant d’éviter que certains puissent voter plusieurs fois.
Selon le chronogramme de la Ceni, ils devaient être déployés sur l’ensemble du territoire le 5 octobre, dans le cadre de la campagne d’enrôlement des électeurs qui devait durer 25 jours au total. Le processus n’a cependant, pour le moment, pas démarré.
Autre retard, celui observé dans la campagne d’identification des électeurs, qui devaient se rendre, à partir du 30 septembre dernier, dans les Commissions administratives d’établissement et de révision des listes électorales (Caerles) pour se faire enregistrer.
Nettoyer le fichier électoral
Cette étape est d’autant plus cruciale que ces commissions ont la lourde tâche de collecter une série de données, « alphanumériques et biométriques », pour nettoyer le fichier électoral de ses doublons, électeurs fictifs et autres personnes dont le décès n’avait pas été enregistré. Ces législatives, qui devaient se tenir en septembre 2018, ont d’ailleurs été reportées en raison, justement, d’anomalies dans le fichier électoral. Il y aurait entre 1 et 3 millions d’électeurs fictifs, selon les évaluations avancées par les partisans de la mouvance présidentielle ou de l’opposition.
Ces identifications, qui devaient se terminer ce vendredi 11 octobre, sont terminées, assure David Camara. Une source au sein de la Ceni a cependant assuré à JA que seul « 60 à 70% du territoire » avait effectivement été couvert pour le moment.
« Nous avons cumulé du retard, mais nous maintenons notre chronogramme », martèle David Camara. « La Ceni va redoubler d’efforts et prolonger certains délais s’il le faut. Le 28 décembre, nous seront prêts », insiste encore le président du comité de pilotage de la Ceni.
En dernier recours, ce n’est cependant pas la Ceni qui peut trancher sur un éventuel report de l’élection. Elle propose une date au président guinéen, Alpha Condé l’avalisant, ou pas.