Le gouvernement a enfin été dévoilé lundi au petit matin, après sept longs mois d’attente et de divergences entre le camp du président de la République Félix Tshisekedi (Cap pour le changement – Cach), et celui de son prédécesseur Joseph Kabila (Front Commun pour le Congo – FCC), qui détient la majorité au Parlement et dans les Assemblées provinciales. Il comporte 66 membres, dont 5 vices-Premier ministres, 10 ministres d’État, 3 ministres délégués, 31 ministres et 17 vice-ministres.
Si ce premier exécutif de l’ère Félix Tshisekedi a surpris par sa composition avec près de 80 % des nouvelles figures, il étonne aussi par l’absence très remarquée de plusieurs alliés membres de Cach et des fidèles de Joseph Kabila. Manquent à l’appel : Tryphon Kin-Kiey Mulumba, Antipas Mbusa Nyamwisi et Francois Muamba pour le Cach, et Kalev Mutond, Didier Etumba, Aubin Minaku et Lambert Mende pour le FCC.
Un tableau révélateur des fortes divergences entre Félix Tshisekedi, qui prône la rupture, et Joseph Kabila, visiblement déterminé à prendre sa revanche contre ses anciens collaborateurs aujourd’hui ralliés à Felix Tshisekedi.
Les collaborateurs de Joseph Kabila faisant l’objet de sanctions de la part des États-Unis ou de l’Union européenne, ont été les premiers à faire les frais de la rupture prônée par Felix Tshisekedi. Jeune Afrique a réalisé le trombinoscope des grands absents.
• Kalev Mutond (FCC)
Kalev Mutond, ancien directeur de l’ANR © DR
À 61 ans, cet ancien administrateur général de l’Agence nationale de renseignement devait participer à ce gouvernement. Selon une source proche du FCC, Joseph Kabila le voyait même à un poste clé. Mais la seule volonté de Joseph Kabila n’a pas suffi car Félix Tshisekedi a mis son veto avec comme argument, la réputation de l’ancien maître espion de Kinshasa sanctionné par l’Union européenne et les États-Unis pour son implication dans la répression des manifestations et pour des violations des droits de l’homme entre 2014 et 2016.
• Didier Etumba (FCC)

Le général Didier Etumba, en septembre 2010 © Alain Wandimoyi/AP/Sipa
Ancien chef d’état-major général des forces armées de la RDC, il figurait parmi les négociateurs de l’accord de partage des postes entre FCC et Cach. Alors que son nom a été proposé comme ministre de la Défense, une source proche de la présidence assure que le chef de l’État Felix Tshisekedi n’a pas souhaité qu’il fasse parti du gouvernement. Comme lui, d’autres membres du FCC à l’instar de Jose Makila ancien vice Premier ministre des transports, de Néhémie Mwilanya, coordonnateur du FCC, ou encore Aubin Minaku, ancien secrétaire général de l’ancienne majorité présidentielle et ancien président de l’Assemblée nationale.
•Tryphon Kin-Kiey Mulumba (Cach)
Tryphon Kin-Kiey Mulumba à Paris le mercredi 3 octobre 2018. © François Grivelet pour JA.
Ancien porte-parole du gouvernement sous Mobutu, et plusieurs fois ministre sous Joseph Kabila et qui s’était désisté à la présidentielle de décembre 2018 au profit de Félix Tshisekedi, n’a pas été retenu. Sa nomination était très attendue et ne faisait presque aucun doute, ce dernier ayant été la deuxième personne à rejoindre officiellement Cach pour soutenir la candidature de Félix Tshisekedi. Une source proche des discussions a affirmé à Jeune Afrique que son nom avait été refusé par Joseph Kabila.
• Antipas Mbusa Nyamwisi
Lui aussi est un ancien collaborateur de Joseph Kabila. Antipas Mbusa Nyamwisi, démissionnaire de la coalition de l’opposition Lamuka, il avait soutenu la candidature de Martin Fayulu à la présidentielle de décembre 2018. Son profil avait pourtant séduit le président Tshisekedi au regard de son leadership dans le grand nord de la province du Nord Kivu où sévit l’épidémie d’Ebola et l’insécurité dû à l’activisme des groupes armés rebelles dont les ADF.
• François Muamba (Cach)

François Mwamba, coordonnateur du Mécanisme de la RDC de suivi de l'accord-cadre. © DR
Il était lui aussi très attendu. Ancien ministre du Budget, membre du Mouvement de Libération du Congo de Jean-Pierre Bemba, il est aux côtés de Félix Tshisekedi depuis les négociations pour la désignation d’un candidat commun de l’opposition. Il a également soutenu l’accord de Nairobi entre l’UNC, le parti de Vital Kamerhe, et l’UDPS de Félix Tshisekedi pour former la coalition Cap pour le Changement. Son nom aurait été refusé par Joseph Kabila.