Tunisie : le niqab interdit dans les institutions publiques « pour raisons de sécurité »

Une semaine après un double attentat suicide meurtrier perpétré à Tunis, le gouvernement tunisien a décidé le 5 juillet d’interdire « pour des raisons de sécurité » le port du niqab dans les institutions publiques.

Une femme portant le niqab dans les rues de Tunis, en janvier 2012. © Fethi Belaid/AFP

Une femme portant le niqab dans les rues de Tunis, en janvier 2012. © Fethi Belaid/AFP

Publié le 5 juillet 2019 Lecture : 2 minutes.

Voile intégral cachant visage et haut du corps, le niqab a été interdit dans les administrations et institutions « pour des raisons de sécurité », a indiqué la présidence du gouvernement.

La circulaire signée par le Premier ministre Youssef Chahed et adressée aux ministres, aux secrétaires d’État, aux préfets et aux responsables des institutions publiques, indique que « dans le cadre de la préservation de la sûreté publique (…), il faut prendre les mesures nécessaires pour interdire l’entrée aux locaux des institutions publiques (…) à toute personne ayant le visage couvert ».

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Le texte ne précise pas quand entrera en vigueur la décision, ni si elle est provisoire.

Seul le Parlement est habilité à interdire le port du niqab dans l’espace public, a précisé un conseiller à la présidence du gouvernement.

Cette décision intervient dans un climat sécuritaire tendu à la suite notamment d’un double attentat suicide perpétré le 27 juin à Tunis et visant la police. Revendiqué par le groupe jihadiste État islamique (EI), il a fait deux morts, un policier et un civil, et sept blessés.

Des rumeurs avaient circulé sur les réseaux sociaux sur le fait qu’un homme présenté par les autorités comme le « cerveau » du double attentat, et qui a déclenché une ceinture explosive mardi alors qu’il était pourchassé par la police, s’était caché sous un niqab. Cela a ensuite été démenti par le ministère de l’Intérieur.

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« Cette décision doit être temporaire »

La Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) a appelé à ce que cette interdiction reste « temporaire ». « Nous sommes pour la liberté de l’habit, mais aujourd’hui avec la situation actuelle et les menaces terroristes en Tunisie et dans toute la région nous trouvons des justifications à cette décision », a estimé Jamel Msallem, président de la LTDH.

Mais « cette décision doit être temporaire et ne doit pas durer après la reprise d’une situation sécuritaire normale en Tunisie », a-t-il ajouté.

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Le port du niqab fait l’objet d’un vif débat entre militants politiques séculiers et islamistes notamment. Cette tenue n’était pas tolérée sous le régime du président déchu Zine El Abidine Ben Ali, qui réprimait sans pitié toutes les formes d’islamisme, mais elle a connu un certain essor depuis la révolution de janvier 2011.

« Une liberté individuelle »

Pour Ilhem, une jeune Tunisienne, « ils ont le droit de l’interdire vu les évènements auxquels nous assistons actuellement, mais à la fin ça reste une liberté individuelle ».

« Je ne sais pas pourquoi il faut que la femme fasse des sacrifices à chaque fois qu’il y a des mesures sécuritaires à prendre », a de son côté déclaré Lina.

En 2012, l’université de la Manouba à Tunis avait été le théâtre de heurts entre salafistes soutenant le port du niqab pour les étudiantes et les partisans de son interdiction, imposée par le règlement de l’université.

En février 2014, le ministère de l’Intérieur avait autorisé la police à procéder à un « contrôle renforcé » des personnes portant ce voile, justifiant cette mesure par la lutte contre « le terrorisme », notamment « en raison du recours de suspects au niqab (…) pour se déguiser et fuir la justice ».

Après les attentats sanglants en 2015 ayant ciblé des forces de sécurité et des touristes, des voix se sont levées pour imposer l’interdiction du niqab dans le pays. En mars 2016, un bloc parlementaire avait proposé une loi interdisant de dissimuler le visage dans l’espace public, mais le Parlement ne s’était pas prononcé sur la question.

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