Économie

Binta Touré Ndoye : Oragroup va investir « 25 milliards F CFA pour soutenir sa croissance »

L’entrée d’Orabank à la Bourse régionale des valeurs mobilières a permis à Oragroup de lever 56,9 milliards de francs CFA, dont environ la moitié sera consacrée à la croissance et au renforcement de ses filiales. Binta Touré Ndoye, directrice générale du groupe, détaille la stratégie de l’entreprise.

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Par - Par Michée Dare
Mis à jour le 17 avril 2019 à 18:31

Façade de la banque Orabank, Abidjan, Côte d’Ivoire. Mars 2016 © Jacques Torregano pour JA

Dix heures, ce 16 avril. La cloche de la Bourse régionale des valeurs mobilières d’Abidjan retentit consacrant la première cotation d’Orabank, présent dans douze pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. À présent, 20% de son capital pourra être échangé sur la place financière ouest-africaine, soit 284,6 milliards de FCFA au moment de l’introduction.

L’opération, comprenant l’émission de 6 097 561 nouvelles actions et la cession de 7 785 445 actions existantes a permis de lever 56,92 milliards de francs CFA (86 millions d’euros). Emerging Capital Partners (ECP) reste l’actionnaire de référence avec plus de 50 % des parts.

L’action Oragroup est désormais la 46ème valeur côtée sur la BRMV, dont la capitalisation boursière atteignait 5154 milliards de FCFA, le mardi 16 avril 2019.

Pour Jeune Afrique,  Binta Touré Ndoye, directrice générale d’Oragroup détaille les objectifs du groupe et la stratégie de développement futur, notamment en Afrique centrale.


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Jeune Afrique : À quoi serviront les fonds levés ?

Binta Touré Ndoye : Sur les 56,92 milliards levés, nous prévoyons consacrer 25 milliards au soutien de la croissance et au renforcement de nos filiales. Le reste sera consacré à nos actionnaires existants, qui ont accepté de réduire leur contribution au capital au profit des nouveaux actionnaires.

Ainsi, par exemple, la part de notre actionnaire majoritaire, ECP, passe de 59% à 51%.

Quelles sont les raisons qui vous font penser que c’est le bon moment pour l’entrée en bourse d’Oragroup ? Pensez-vous que votre performance boursière sera meilleure qu’un groupe comme NSIA, dont le cours a fortement chuté depuis sa première cotation, en octobre 2017 ?

Nous avons à Oragroup un modèle d’affaires robuste et très diversifié. Notre bénéfice net a connu une croissance de 32% entre 2014 et 2017, contre une moyenne de 25% pour les autres banques du marché.

Aussi, notre total bilan a-t-il été multiplié par sept en dix ans. Notre diversification géographique et notre actionnariat solide nous permettent de véritablement créer des synergies et de la valeur au sein du groupe.

Notre modèle repose beaucoup sur l’harmonisation des pratiques au sein du groupe, une stratégie commerciale bien définie, ainsi que des réformes institutionnelles très profondes telles que l’optimisation des charges et l’accroissement de générations de revenus.

Notre système de gouvernance assure ainsi une vraie optimisation du fonctionnement de la holding, ainsi que de ses filiales. Enfin, grâce à ECP, notre actionnaire principal, nous avons tenu une trajectoire de croissance exemplaire.


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La digitalisation de vos services est-elle un chantier prioritaire ?

Elle est au cœur de notre stratégie de développement. Celle-ci s’appuie sur trois axes que sont l’inclusion financière, la digitalisation de nos offres et celle de nos processus internes.

L’inclusion financière nous permettrait une pénétration très rapide dans le segment des particuliers, qui se retrouvent pour une grande part dans la classe moyenne en plein essor dans nos pays et constituent un véritable vivier de nouveaux clients potentiels.

La digitalisation de nos offres a pour but d’avoir accès à la banque, sans se déplacer. Pour les particuliers, elle se décline par le mobile banking ou encore le e-wallet.

Par ailleurs, grâce à notre récent partenariat avec la société CRD, il sera possible à nos clients de réaliser des opérations telles que le paiement de factures depuis les guichets automatiques ou encore l’ouverture de comptes depuis les terminaux mobiles.

Les entreprises, quant à elles, pourront réaliser les opérations classiques, comme les transferts de fonds par exemple, sans se déplacer de leurs bureaux.

La digitalisation de nos offres nous permettent d’une part d’optimiser nos services et, d’autre part, de réduire nos coûts.


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Oragroup entend-t-il jouer un rôle dans le développement du secteur des nouvelles technologies, en particulier dans le financement de startups ?

En tant qu’institution bancaire, je pense que notre rôle est de financer l’économie. Nous sommes en effet convaincus que c’est en finançant l’économie – et notamment le secteur privé – que le continent va créer davantage de richesses et d’emplois.

Je tiens à préciser que notre portefeuille est constitué pour un tiers de de PME/PMI, dont une grande part sont des start-up. Nous finançons les start-up à travers plusieurs mécanismes, dont nos divers partenariats avec des fonds de garanties tels que l’African Guarantee Fund ou encore le FSA.

Cela nous permet de jouer pleinement notre rôle de financement de l’économie, tout en limitant les risques.


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Vous êtes présents exclusivement dans les pays francophones. La conquête de l’Afrique anglophone fait-elle partie de vos objectifs ?

Notre stratégie de développement insiste certes sur la diversification géographique de notre portefeuille. Cependant, elle se veut également cohérente. La robustesse de notre modèle d’affaires est en effet également rendue possible grâce à une cohérence dans nos investissements.

Nous sommes aujourd’hui présents dans douze pays francophones répartis entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. Ces pays qui partagent en commun une même culture des affaires.

Nous ne nous inscrivons donc pas dans une optique d’investissement, ni en Afrique de l’Est, ni en Afrique anglophone.

En revanche, nous comptons renforcer notre présence en Afrique centrale par l’implantation prochaine d’une représentation de notre groupe au Cameroun, qui s’impose comme la première économie de cette zone économique. Nous avons d’ores et déjà noué un partenariat avec la CCA, l’une des institutions de microfinance les plus importantes du pays, que nous accompagnons dans sa transformation en banque.