Politique

RDC : pourquoi Lamuka n’a pas condamné l’« accord secret de partage de pouvoir » entre Tshisekedi et Kabila

En amont de leurs travaux de discussions, la coalition Lamuka prévoyait entre autres de condamner le fait qu’un « accord secret de partage de pouvoir » ait eu lieu entre Félix Tshisekedi et Joseph Kabila, et de se positionner sur l’élection du nouveau président de la RDC. En désaccord sur ces points, ceux-ci n’ont finalement pas été ajoutés au communiqué final.

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Par - à Kinshasa
Mis à jour le 26 mars 2019 à 11:41

Félix Tshisekedi reçoit l’écharpe présidentielle de l’ex-président congolais, Joseph Kabila, le 24 janvier 2019, à Kinshasa. © Jerome Delay/AP/SIPA

Réunis pendant trois jours à Bruxelles du 21 au 23 mars pour des discussions censées aboutir à d’importantes résolutions, les leaders de la coalition Lamuka ont publié un communiqué final (en bas d’article) sur lequel certains passages du brouillon initialement prévu n’y figurent pas. La seule grande annonce étant la mutation de leur coalition d’une plateforme électorale en une plateforme politique, alors que leur positionnement vis-à-vis de leur ancien allié devenu président de la République, Félix Tshisekedi, était le plus attendu.

Dans le brouillon du communiqué, que Jeune Afrique a pu consulter (document ci-dessous), les leaders de Lamuka prévoyaient d’annoncer après les travaux qu’ils « condamnent le fait qu’au mépris de la vérité des urnes, un accord secret de partage de pouvoir a été conclu entre le président sortant et le candidat Félix Tshisekedi ».

Et d’ajouter qu’ils « prennent acte qu’en violation de la loi électorale, Monsieur Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo a été proclamé président de la République démocratique du Congo par la Ceni, validé et investi par la Cour constitutionnelle ».

Mais aucun des deux points n’a finalement été retenu.

Déclaration LAMUKA version amendée by Jeune Afrique on Scribd

Deux tendances opposées

Deux raisons expliquent ce revirement. D’une part, Moïse Katumbi, représenté les deux premiers jours par son conseiller politique et qui a finalement rejoint les discussions le dernier jour, a joué l’apaisement et s’est placé comme observateur face à « l’ami et frère » Félix Tshisekedi, ont indiqué des sources de Lamuka à Jeune Afrique.

D’autre part, l’aile dure pilotée par le candidat soutenu par la coalition, Martin Fayulu, qui continue de revendiquer la victoire à l’élection présidentielle, souhaitait avoir l’adhésion de tous pour son combat en faveur de la vérité des urnes. Finalement, pour afficher l’unité de la coalition, les six leaders réunis ont opté pour un communiqué d’équilibre, mais sans s’engager pour la poursuite du combat pour la vérité des urnes.


>>> À LIRE – RDC : Lamuka se distancie du combat pour la « vérité des urnes » de Martin Fayulu


Le communiqué final n’a ni condamné ni soutenu le président Félix Tshisekedi. Des ambiguïtés qui s’expliquent notamment par le fait que certains leaders souhaiteraient travailler avec le nouveau président de la République, à condition que ce dernier puisse « se défaire » du « mal » que représente Joseph Kabila, ont indiqué certains d’entre eux. La composition du gouvernement serait l’un des premiers tests. Félix Tshisekedi a d’ailleurs déjà lancé des signaux de collaboration avec ses anciens partenaires dans l’opposition. Moïse Katumbi a récupéré son passeport biométrique congolais, et les délégués de Tshisekedi ont déjà échangé avec certains leaders, dont Antipas Mbusa Nyamwisi.

Guerre de leadership

Si à l’issue des travaux, en conférence de presse, seuls Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi ont été autorisés à parler, Martin Fayulu s’est exprimé juste après en interviews. Il a revendiqué être le leader de Lamuka, alors qu’en conférence de presse Jean-Pierre Bemba déclarait que Martin Fayulu était simplement le candidat de Lamuka aux élections du 30 décembre 2018.

La prochaine réunion consacrée à la transformation de Lamuka en une plateforme politique devrait clarifier les choses avec la structuration de la plateforme.

Lamuka communiqué final by Jeune Afrique on Scribd