
Abdoulaye Wade, à Dakar, le jeudi 7 janvier 2019. © Cheick Berthe
L'ex-président Abdoulaye Wade est rentré jeudi au Sénégal, où il a réitéré son appel à empêcher l'élection du 24 février, « verrouillée » selon lui pour assurer la reconduction de son successeur Macky Sall. Un appel qui n'a, pour l'instant, rencontré que peu d'écho.
Le cortège de l’ancien président (2000-2012), qui réside en France, arrivé en jet privé après deux ans d’absence, a mis près de cinq heures pour rejoindre la permanence de son parti dans la soirée, après un trajet jalonné d’étapes en banlieue, acclamé à chaque fois par la foule de ses partisans.
Des meetings prévus dans tout le pays
Au cours d’une harangue de plus d’une heure en langue nationale wolof au siège de sa formation, le Parti démocratique sénégalais (PDS), Abdoulaye Wade, vêtu d’un boubou bleu et d’un châle blanc et coiffé d’un chèche rouge, a exhorté les quatre candidats en lice face au sortant à boycotter le scrutin.
Ne vous ridiculisez pas en participant à cette élection
“Je voudrais que les quatre candidats face à Macky Sall sachent qu’il s’est déjà proclamé vainqueur”, a-t-il affirmé. “Macky Sall a déjà son pourcentage, 55% ou 65%. Le sachant, ne vous ridiculisez pas en participant à cette élection”, leur a-t-il lancé.
Dans une vidéo diffusée mardi, il a appelé la population à s’« opposer à la tenue d’une élection entièrement fabriquée”, dénonçant l’invalidation des candidatures des deux principaux rivaux potentiels de Macky Sall, son fils Karim et le maire déchu de Dakar Khalifa Sall, tous deux frappés par des condamnations judiciaires.
Jeudi soir, il a annoncé un programme de “meetings et marches” dans tout le pays, avant, pendant et après le jour du scrutin, appelant à “brûler les cartes d’électeur et les bulletins de vote”, et les forces de l’ordre “à ne pas réprimer les manifestants et à ne pas leur jeter de grenades lacrymogènes”.
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Opposition et société civile sourds aux appels de Wade
Le pouvoir comme l’opposition ou la société civile sont pourtant restés jusqu’à présent sourds à la stratégie prônée par le dirigeant du PDS. “Wade seul contre tous” ou “Me Wade recalé” titraient jeudi les quotidiens.
Même parmi les militants venus l’attendre à l’aéroport avec des tee-shirts à l’effigie de son fils sur lesquels on pouvait lire : “Karim Wade président 2019”, certains pensaient que Gorgui (“le vieux”), selon son surnom affectueux, allait changer de discours.
Un des alliés de l’ancien chef de l’Etat, le député Mamadou Diop Decroix, a d’ailleurs préféré annoncer mercredi son ralliement au candidat Idrissa Seck, ex-Premier ministre d’Abdoulaye Wade, qui a recueilli ces derniers jours plusieurs soutiens de poids. Macky Sall, en campagne comme les quatre autres candidats, “ignore royalement Abdoulaye Wade”, a assuré son service de presse mercredi.
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La société civile, qui s’était mobilisée en 2012 contre un troisième mandat d’Abdoulaye Wade, a également adressé une fin de non-recevoir à cet appel, à l’image du mouvement citoyen Y’en a marre. “Dans tous les pays, s’il y a un boycott, c’est le parti au pouvoir qui en bénéficie”, a dit mercredi son coordonnateur Fadel Barro, appelant les Sénégalais à se rendre “massivement” aux urnes.
Plusieurs autres responsables de la société civile, dont ceux de la section sénégalaise d’Amnesty International et du Forum du justiciable, une ONG de défense des droits de l’Homme, ont rejeté cet appel au boycott.
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