Politique

Guinée : au moins un mort suite à la marche avortée de l’opposition à Conakry

La marche avortée de l’opposition guinéenne le 30 octobre a fait un mort et quinze blessés par balles, selon les organisateurs. La police évoque de son côté « la découverte de deux corps », et des enquêtes en cours afin de déterminer « les causes » de leur mort.

Par - à Conakry
Mis à jour le 31 octobre 2018 à 17:46

Des policiers interviennent à Conakry lors d’une manifestation de l’UFDG, en avril 2015 (photo d’illustration). © Youssouf Bah/AP/SIPA

La mesure de confinement de Cellou Dalein Diallo, chef de file de l’opposition et président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), employée par la police le 30 octobre, n’a pas empêché les affrontements entre forces de l’ordre et militants politiques dans la banlieue de Conakry. À Bambéto, l’un des points chauds du fief de l’opposition, une personne est décédée et quinze autres ont été blessées, selon les organisateurs. L’un d’eux serait dans un état critique, ont indiqué ces derniers. Il s’agirait de Tafsir Bah, un jeune de 11 ans, qui aurait été admis à l’hôpital de l’amitié sino-guinéenne de Kipé, en banlieue de Conakry.

De son côté, la direction de la police régionale de Conakry a fait état de « deux corps découverts à Bambéto » le 30 octobre, a indiqué le soir-même le commissaire Boubacar Kassé, le porte-parole de la police.

« Déterminer les causes et la nature de la mort de ces deux citoyens »

Le premier, Moussa Sow, est un élève de 7e année qui aurait été pris « en flagrant délit de vol de téléphone dans une concession à Bambéto dans la nuit du 29 au 30 octobre. Le défunt aurait été molesté avant d’être relâché. Ce jour (du) 30 octobre 2018, sur le chemin de l’école, le défunt a rendu l’âme à Bambéto ». Un décès qui pourrait donc ne pas être directement lié à la marche avortée. Le corps du second, un transporteur de 30 ans prénommé Mamadou Cellou Diallo, « a été découvert à Bambéto magasin aux environs de 13h avec des blessures au front », a indiqué le porte-parole de la police.

« Les enquêtes sont en cours », a affirmé le porte-parole de la police. « Deux réquisitions ont été délivrées par le commissariat central de Ratoma au médecin légiste de l’hôpital Ignace Deen afin de déterminer les causes et la nature de la mort de ces deux citoyens », a–t-il indiqué.

Mamadou Cellou Diallo, un transporteur de 30 ans qui faisait la navette entre Conakry et Labé, capitale régionale de la Moyenne-Guinée située à 431 km au nord du pays, a été touché « par une balle » au thorax, selon l’opposition. « Il rentrait d’un voyage à Labé vers 13h GMT, explique à Jeune Afrique Mamadou Siré Diallo, le neveu du défunt. Après le débarquement à la gare routière de Bambéto, il a raccompagné un de ses passagers chez lui. Sur le chemin du retour, il a vu les gens s’enfuir, pourchassés par les forces de l’ordre. Il est resté sur place et a mis ses mains en évidence. Un agent de sécurité, un gendarme selon les témoins, lui a tiré une balle au thorax ».

Vive émotion

Ce chauffeur, qui a initié en 2005 la conduite de motos-taxis dans la ville de Labé avec l’un de ses frères, venait d’être père d’un petit garçon, confie le neveu du défunt. Il avait également brièvement tenté l’aventure au Gabon avec son frère, avant de rentrer au pays démarrer une carrière de transporteur, il y a moins d’un an.

Sa mort, qui porte à 98 le nombre de victimes tombées lors des manifestations de rue organisées depuis l’arrivée au pouvoir du président Alpha Condé en 2010, a ému l’opinion guinéenne. « Des projets ? Il en avait certainement. Il aurait donné vie à une petite dynastie de Diallo. Mais ces rêves, il peut les renvoyer à un autre monde, à une autre vie, tout comme 97 Guinéens avant lui », s’est ainsi fendu dans un message la radio privée Espace FM, passé en boucle en plus d’une chanson appelant à la paix, au lieu de la populaire émission de talk-show « Les grandes gueules » du mercredi 31 octobre. Une manière de rendre hommage à Mamadou Cellou Diallo et aux précédentes victimes, mais aussi d’interpeller la justice guinéenne à faire la lumière sur ces morts.