Bénin : une nouvelle taxe sur les réseaux sociaux provoque la colère des internautes

Depuis ce mercredi 19 septembre, le gouvernement béninois applique une taxe sur les réseaux sociaux, qui fait flamber les prix de l’accès à internet. Une décision mal vécue à Cotonou et interprétée par la plupart des internautes comme une mesure de représailles contre les critiques du pouvoir.

Un homme vend des téléphone portable dans le quartier commercial de Ganhi à Cotonou, au Bénin, le 26 février 2016. © Gwenn Dubourthoumieu pour J.A.

Un homme vend des téléphone portable dans le quartier commercial de Ganhi à Cotonou, au Bénin, le 26 février 2016. © Gwenn Dubourthoumieu pour J.A.

Fiacre Vidjingninou

Publié le 20 septembre 2018 Lecture : 2 minutes.

Une journée difficile pour les internautes mobiles béninois. Le 19 septembre, l’opération de basculement vers la nouvelle tarification des services de connexion internet a privé la plupart des internautes de réseaux mobiles. « Les systèmes des deux opérateurs de téléphonie mobile, MTN et Moov, n’ont pas fonctionné pendant des heures », raconte un jeune développeur web.

Le 25 juillet, le gouvernement avait signé un décret instituant de nouvelles « contributions » sur la consommation des services de communication. Les services d’appels, de SMS et d’internet sont taxés à hauteur de 5 % de leur prix hors taxe, tandis qu’une contribution de 5 francs CFA (0,8 centime d’euro) par mégaoctet est prélevée pour l’accès à internet utilisant un service par contournement ou une plateforme de réseau social (application permettant de téléphoner par internet, sans avoir à utiliser du crédit mobile).

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Un gigaoctet 10 fois plus cher avec l’offre incluant les réseaux sociaux

Conséquence de cette dernière taxe, les opérateurs de téléphonie mobile ont mis en place deux types de forfait internet, incluant ou non un accès aux réseaux sociaux. Chez MTN, l’offre « sans réseaux sociaux » est en moyenne à 1,08 euro pour un gigaoctet de données. Le même gigaoctet est facturé 11,43 euros, soit plus de 10 fois plus cher, dans l’offre « avec réseaux sociaux ».

Le gouvernement justifie cette hausse par le manque à gagner des opérateurs, qui sont depuis un certain temps concurrencés sur leur cœur de métier par des services par contournement tels que Messenger, WhatsApp et Viber. Selon les autorités, cette concurrence fait baisser les montants des redevances que l’État devrait engranger.

« C’est une gageure. Comment s’en sortent les opérateurs téléphoniques des autres pays ? Seuls les Béninois utilisent-ils WhatsApp pour appeler ? Les raisons sont ailleurs, le gouvernement n’a pas de quoi financer son programme d’action », explique un web-activiste sous le couvert de l’anonymat.

Taxer les « transferts d’images qui critiquent le gouvernement »

Les arguments du gouvernement ne convainquent guère à Cotonou, surtout après que le ministre des Finances, Romuald Wadagni, a expliqué, lors d’un forum consacré à l’investissement le 28 août, que le coût de la connexion internet ne serait renchéri que pour ceux qui font un usage ludique de la connectivité ou qui effectuent des « transferts d’images qui critiquent le gouvernement ». Ces propos ont suscité une vague d’indignation sur les réseaux sociaux et dans l’opinion publique.

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Le président de la Fondation Kundi Africa, Kwame Sènou, dénonce l’impact économique de cette décision. Ayant récemment investi dans une plateforme connectant artisans et consommateurs, il trouve que « cette mesure vient sonner le glas d’un écosystème naissant où il fallait beaucoup de courage pour investir alors que le Bénin manque d’attractivité auprès du capital-risque. Les réseaux sociaux sont devenus tellement essentiels aux PME que nous ne pouvons comprendre cette mesure de la part d’un pays démocrate ».

L’Association des blogueurs du Bénin a lancé une campagne contestant la réforme dénommée avec le hashtag #TaxePasMesMo. Depuis, elle a demandé à ses membres et au public, en signe de protestation, de se désabonner de toutes les pages Facebook du gouvernement et des ministères. Une action qui ne semble visiblement pas encore faire reculer les autorités béninoises.

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