Économie

Edoh Kossi Amenounvé : « Être coté en Afrique est une protection pour les multinationales »

Alors que MTN se positionne en force sur les bourses de Lagos et Accra, Edoh Kossi Amenounvé, directeur général de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), basée à Abidjan, fait le point pour Jeune Afrique sur la situation des cotations des opérateurs de télécoms en Afrique de l’Ouest.

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Mis à jour le 25 juin 2018 à 18:09

Salle des marchés de la bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) , le 2 août 2012, Abidjan, Côte d’Ivoire. © Olivier pour JA

L’opérateur télécoms panafricain MTN met les bouchées doubles pour la cotation de ses filiales nigériane et ghanéenne à Lagos et à Accra, respectivement. La presse est-africaine évoque, pour sa part, une introduction en Bourse de MTN Uganda. Qu’en est-il en Afrique de l’Ouest francophone ? Jeune Afrique a interrogé le directeur général de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), basée à Abidjan et commune au huit pays de la zone Uemoa.

Jeune Afrique : La Bourse d’Abidjan ne compte que deux opérateurs télécoms (Sonatel et Onatel). Comment voyez-vous son évolution à moyen terme ?

Edoh Kossi Amenounvé : Nous souhaitons définitivement que d’autres opérateurs télécoms comme Orange Côte d’Ivoire, MTN Côte d’Ivoire et MTN Bénin, Sotelma etc. soient cotés à la BRVM.

Nous avons eu quelques échanges préliminaires avec certains d’entre eux et nous sommes prêts à aller plus loin. Le groupe MTN semble ouvert à l’idée, comme le montrent les introductions boursières en préparation au Nigeria Stock Exchange (Lagos) et au Ghana Stock Exchange (Accra).

Mais ces dernières ont été imposées par le régulateur nigérian, en échange d’une réduction de l’amende imposée à MTN, et au Ghana comme condition d’octroi d’une licence 4G. Appelez-vous les autorités publiques de la zone Uemoa à en faire de même ?

Pourquoi pas ? Mais je pense que c’est à MTN de tirer des enseignements de ce qui s’est passé au Nigeria et au Ghana et de prendre les devants. Avoir des actionnaires locaux peut constituer un appui, vis-à-vis de tout un ensemble d’évolutions régulatoires difficiles à anticiper.

Avoir des milliers d’actionnaires locaux, comme cela est le cas notamment de la Sonatel, peut décourager certaines velléités… Ceci ne concerne pas seulement MTN ou les opérateurs télécoms mais toutes les multinationales qui évoluent dans nos pays : avoir un ancrage local de son actionnariat est une protection.

Comment se porte le secteur télécoms à la BRVM ?

Très bien. Sonatel et Onatel représentent plus de 50% de la valeur des transactions réalisées sur notre marché. En ce qui concerne les valorisations, les choses pourraient être meilleures.

De quelle façon ?

Pendant dix à quinze ans, les performances des opérateurs télécoms ont été principalement portées par les anticipations sur l’évolution exponentielle du nombre d’abonnés. Ce facteur est moins valorisé aujourd’hui et je pense que le marché pourrait davantage prendre en compte les applications technologiques dans les différents secteurs d’activité et le décloisonnement qu’elles engendrent.

C’est ce qui permet aux opérateurs télécoms de faire de nouveaux métiers jadis réservés à acteurs traditionnels.  Le développement rapide du mobile money et l’évolution vers d’autres opérations bancaires ou d’assurance en sont la preuve. La vente de données a un également un bel avenir avec le développement de l’intelligence artificielle.