Kenya : « réconciliation » inattendue entre Uhuru Kenyatta et Raila Odinga, une véritable sortie de crise ?

Après des mois d’affrontements, le président kényan Uhuru Kenyatta et l’opposant Raila Odinga se sont rencontrés ce vendredi. Ils ont promis de mettre leurs différends derrière eux pour construire ensemble le futur de la nation kényane. Symbolique ou avantageuse pour les deux hommes, cette soudaine « réconciliation » interroge.

Rare image de Raila Odinga et Uhuru Kenyatta souriant ensemble, à Nairobi, le 24 février 2013. © Khalil Senosi/AP/SIPA

Rare image de Raila Odinga et Uhuru Kenyatta souriant ensemble, à Nairobi, le 24 février 2013. © Khalil Senosi/AP/SIPA

Publié le 9 mars 2018 Lecture : 2 minutes.

Hier ennemis, aujourd’hui « frères » ? À la surprise générale, le président kényan Uhuru Kenyatta et le chef de l’opposition Raila Odinga se sont serrés la main dans la matinée de ce vendredi 9 mars, tout sourire, au terme d’une réunion inattendue.

Depuis des mois, tout opposait en effet les deux hommes. Alors que Raila Odinga refusait de reconnaître la victoire de son rival lors de l’élection présidentielle d’octobre 2017, Uhuru Kenyatta, en position de force, rejetait jusqu’ici toute idée de dialogue avec l’opposition.

Pour que le pays s’unisse, ses leaders doivent s’unir », a déclaré Uhuru Kenyatta

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Une place pour Raila Odinga dans un nouveau « bureau » spécial ?

La tension était montée d’un cran fin janvier dernier, suite à la prestation de serment parallèle de Raila Odinga, qui avait alors affirmé être le « président du peuple ». Mais ce vendredi midi, tout semblait être oublié. Devant la presse, Uhuru Kenyatta a ainsi délivré un message d’unité : « Le Kenya est plus grand que les volontés individuelles. Pour que le pays s’unisse, ses leaders doivent s’unir », a-t-il déclaré.

Nous devons dépasser nos divergences », a souligné Raila Odinga

À côté de lui, le leader de l’opposition appelait à repenser le projet national : « Nous devons avoir le courage d’admettre que les réformes portées par la Constitution de 2010 n’ont pas porté leurs fruits […] et [nous devons, ndlr] dépasser nos divergences ».

>>> A LIRE – Raila Odinga : « La communauté internationale doit s’impliquer, sinon le Kenya va glisser vers une grave crise »

Les deux hommes assurent vouloir tourner la page des rivalités politiques violentes qu’a connu le Kenya depuis son indépendance et mettre un terme aux divisions ethniques du pays. Pour cela, un « programme », supervisé par un « bureau » spécial sera mis en place. Si le cadre du projet reste flou, il semble donner une place au leader de l’opposition même si cela ne se traduit pas nécessairement en un poste officiel au sein du gouvernement.

Raila Odinga, chef de l'opposition, le 30 janvier 2018 au Kenya. © Ben Curtis/AP/SIPA

Raila Odinga, chef de l'opposition, le 30 janvier 2018 au Kenya. © Ben Curtis/AP/SIPA

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Avantages

Selon Murithi Mutiga, chercheur à l’International Crisis Group, cette nouvelle « alliance » présente des avantages pour les deux partis : « Pour Uhuru Kenyatta, il s’agit de soigner son image et son héritage. Il semble également reconnaître qu’il ne peut mettre en place son programme économique ambitieux dans un pays si divisé et en proie à l’instabilité. Raila Odinga, quant à lui, peut encore une fois associer son nom à des réformes, comme il l’a fait au sein du gouvernement d’union nationale formé après les violences post-électorales de 2007-2008 ».

Cette alliance pourrait créer des tensions au sein des formations politiques des deux hommes

Cette nouvelle alliance pourrait en tout cas être le signe d’une sortie de crise, poursuit le chercheur, si de véritables mesures suivent cette poignée de main hautement symbolique. Mais elle pourrait créer des tensions au sein des formations politiques des deux hommes, en faisant par exemple de l’ombre à William Ruto, le vice-président, qui vise une victoire en 2022.

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Gouvernement et opposition ont en tout cas accédé aux demandes répétées de dialogue des diplomates américains, quelques heures seulement avant l’arrivée sur le sol kényan du secrétaire d’État Rex Tillerson, alors en pleine tournée africaine.

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