Depuis quelques mois, une autre guerre du Nord, plus feutrée, se joue à 1 000 km de Maroua, sous les ors de la République, à Yaoundé. Celle-ci a éclaté au grand jour le 11 juin, lorsque le président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yéguié Djibril (74 ans), a pointé du doigt, à l’occasion de la rentrée parlementaire, les complices de Boko Haram, "des fossoyeurs de la patrie" qui "sont parmi nous".
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Tout le monde a alors compris qu’il ciblait sans le nommer le vice-Premier ministre Amadou Ali (71 ans), un Kanouri dont certains voudraient croire qu’il a des liens avec le groupe jihadiste (qui a portant enlevé sa femme…). Entre ces deux barons du parti au pouvoir, issus du même département du Mayo-Sava (le plus touché par les incursions de Boko Haram), c’est une guerre de position qui se joue. Ali brigue le poste de Premier ministre, voire de vice-président si celui-ci devait être créé dans le cadre d’une éventuelle succession de Paul Biya. Or Cavaye sait qu’une telle promotion de son rival serait synonyme, pour lui, de défenestration.
"Il sauterait obligatoirement, pour des raisons d’équilibre régional", indique un député du Nord. Autre enjeu : la mainmise sur leur fief… et sur les négociations avec Boko Haram. Ce sont en effet des proches d’Ali (dont le député Abba Malla, un homme d’affaires) qui, à la demande de Biya, ont négocié les libérations d’otages depuis un an et demi. Un business juteux.