Cet ambitieux programme de nettoyage, lancé le jeudi 02 juin et estimé à 1 milliard de dollars, répond à une alerte lancée par l’ONU dès 2011, invitant le premier producteur de pétrole du continent africain à restaurer un environnement dégradé. C’est aussi l’une des revendications d’un nouveau groupe rebelle qui multiplie les attaques sur les plateformes off-shore et les oléoducs depuis le début de l’année.
Aucune raison officielle n’a été apportée à l’annulation de la visite du président Buhari, mais ce premier déplacement présidentiel dans ce bastion de l’opposition était considéré comme un premier pas vers un dialogue avec les « Vengeurs du Delta du Niger » (NDA), des terroristes économiques, selon l’armée.
Sur leur site internet, les NDA se décrivent comme des hors-la-loi « émérites ». Le nettoyage de l’environnement, détruit après des décennies d’extraction pétrolière, fait partie de leurs revendications, mais ils affichent également des velléités clairement indépendantistes pour les peuples du Delta.
Cette opération historique devrait durer entre 25 et 30 ans selon l’ONU.
La pollution dans le sud-est du Nigeria est au coeur d’un bras de fer juridique et politique depuis de nombreuses années.
En 1993, le géant Shell avait du quitter la région de l’Ogoniland, après un soulèvement de la population mené par l’environnementaliste Ken Saro-Wiwa. L’activiste avait été tué deux ans plus tard.
Shell a été condamné par une cour britannique en 2015 à payer des compensations aux agriculteurs et pêcheurs de l’Ogoniland qui ont perdu toutes leurs sources de revenus.
Les multinationales qui opèrent au Nigeria ont toujours assuré que la pollution était due aux sabotages des infrastructures et non à l’extraction de pétrole. Mais un représentant de Shell Nigeria, Osagie Okunbor, a affirmé jeudi son intention de prendre part au nettoyage de l’Ogoniland.
Cette opération historique, qui devrait durer entre 25 et 30 ans selon l’ONU, sera un premier pas pour calmer les rancoeurs des populations locales, sur lesquelles s’appuient les groupes rebelles.
Mais pour Ledum Mitee, ancien leader du Mouvement de Saro-Wiwa pour la Survie des peuples Ogoni (MOSOP), cet effort n’est pas suffisant.
Il doit y avoir une prise de conscience plus large pour répondre aux problèmes de négligence et de marginalisation, de sous-développement de la région et de son exploitation économique. C’est le coeur du problème, a-t-il confié à l’AFP. Voilà les véritables raisons de la militarisation de la région et de la recrudescence des violences.
Quelques jours avant d’annuler sa visite officielle, le président Buhari avait annoncé l’envoi de renforts militaires dans le Delta pour lutter contre les NDA, ce qui pourrait intensifier les hostilités et ainsi ramener de nouveaux sympathisants aux rebelles