Afrique du Sud : Jacob Zuma accusé d’être sous l’influence d’une riche famille d’industriels

Le président sud-africain Jacob Zuma se retrouve en position difficile après les révélations mercredi d’un membre de son gouvernement, Mcebisi Jonas. Ce dernier aurait selon lui été directement approché par une richissime et influente famille d’hommes d’affaires, qui lui aurait proposé le poste de ministre des Finances.

Le président sud-africain, Jacob Zuma, à Abuja, Nigeria, 29 mai 2015. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Le président sud-africain, Jacob Zuma, à Abuja, Nigeria, 29 mai 2015. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Publié le 16 mars 2016 Lecture : 3 minutes.

« Des membres de la famille Gupta [d’origine indienne, NDLR] m’ont proposé le poste de ministre des Finances pour remplacer le ministre d’alors (Nhlanhla) Nene », a ainsi déclaré Mcebisi Jonas, actuel vice-ministre des Finances, dans un communiqué, mercredi 16 mars.

Or l’empire Gupta, présent dans les mines, les médias, l’ingénierie ou encore l’informatique, est au cœur d’une vaste polémique depuis plusieurs semaines en Afrique du Sud, l’opposition l’accusant d’exercer une influence directe sur le président Jacob Zuma.

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Proposition de la famille Gupta

Mcebisi Jonas a affirmé avoir reçu la proposition des Gupta avant le limogeage surprise, en décembre, de Nhlanhla Nene, ministre des Finances respecté des marchés. Ce départ avait provoqué la chute vertigineuse de la devise nationale.

« J’ai rejeté » la proposition de la famille Gupta, a poursuivi Mcebisi Jonas dans son communiqué. Elle représentait « une moquerie de notre démocratie durement acquise et de la confiance que le peuple nous accorde. Personne d’autre que le président de la République ne peut nommer des ministres », a-t-il estimé.

Nhlanhla Nene avait finalement été remplacé par un député inexpérimenté, David van Rooyen. Mais devant la panique des marchés, le président Zuma avait dû faire volte-face et nommer dans l’urgence un nouveau ministre des Finances, Pravin Gordhan, qui avait déjà occupé ce poste de 2009 à 2014. En l’espace de quatre jours, l’Afrique du Sud avait eu trois ministres des Finances.

La famille nie cette version

L’empire Gupta a réagi immédiatement mercredi aux accusations de Mcebisi Jonas, les qualifiant de « totalement fausses », et a mis « au défi M. Jonas de présenter, sous serment devant un tribunal, un récit complet de la supposée réunion ».

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Les affirmations de Mcebisi  Jonas tombent toutefois à un moment délicat pour le chef de l’État, déjà sous forte pression, avec plusieurs ennuis judiciaires, de virulentes accusations de l’opposition qui demande son départ, et des dissensions dans son parti.

Jacob Zuma attend notamment une décision de justice pour savoir s’il doit rembourser ou non une partie des 246 millions de rands d’argent public (20 millions d’euros de l’époque) utilisés pour rénover sa résidence privée en pays zoulou.

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Une influence réelle ?

Jacob Zuma n’a jamais caché son amitié avec les Gupta, grande famille d’immigrés indiens, arrivés en Afrique du Sud dans les années 1990. Plusieurs membres du clan Zuma travaillent d’ailleurs pour eux. L’un des fils du président, Duduzane Zuma, dirige la société Sahara Computers appartenant aux Gupta. La troisième épouse du chef de l’État, Bongi Ngema, est également employée par l’empire.

Autre preuve de l’influence supposée des Gupta sur le gouvernement : Vytjie Mentor, une ancienne députée du parti du Congrès national africain (ANC) au pouvoir, a également affirmé lundi 14 mars s’être vu proposer le poste de ministre des Entreprises publiques, là encore, par l’empire Gupta.

La condition était que « j’abandonne la liaison aérienne de South African Airlines (compagnie aérienne para-publique) vers l’Inde et que je la leur donne », a-t-elle expliqué sur Facebook avant d’annuler son commentaire. « J’ai refusé, donc je ne suis pas devenue ministre », a-t-elle ajouté. « Le président (Zuma) était dans une autre pièce quand ils (les Gupta) m’ont offert ce poste à Saxonwold », le quartier huppé de Johannesburg qui abrite le quartier général des Gupta, a-t-elle encore affirmé.

Dans un communiqué mardi soir, le chef de l’Etat a assuré « ne pas se rappeler de Mme Mentor » et « n’être pas au courant des incidents supposés dans sa carrière dont elle aurait parlé dans les médias sociaux ». En 2011, la présidence avait déjà publié un communiqué démentant des accusations d’interférence de la famille Gupta dans le gouvernement Zuma.

Démocratie menacée ?

Les accusations lancées cette semaine « montrent que notre démocratie est menacée par une famille d’hommes d’affaires », a réagi mercredi Shadrack Gutto, président de l’Institut d’études pour la renaissance africaine à l’Université d’Afrique du Sud.

« La question est désormais de savoir si l’ANC a des dirigeants suffisamment courageux pour demander à Zuma de démissionner », a-t-il ajouté, alors que le président doit répondre jeudi aux questions des parlementaires.

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