Plusieurs films avaient pourtant suscité l’espoir de tourner la page. À commencer par « N.W.A Straight Outta Compton », véritable succès commercial aux États-Unis et qui comptait à son générique une pléiade d’acteurs africains-américains acclamés par la critique, ainsi que son réalisateur Felix Gary Gray (Friday, Le Negociateur, ou encore Be cool). Finalement, seuls ses scénaristes blancs ont décroché leur tickets pour cette cérémonie de remise des prix les plus prestigieux du cinéma mondial.

En 1988, la presse qualifie N.W.A de « groupe le plus dangereux du monde ». © DR
Plusieurs Africains-Américains sur la liste des ‘oscarisables’
Idem, pour Creed : l’héritage de Rocky Balboa. Michael Bakari Jordan n’a pas été choisi pour son personnage de jeune boxeur. La seule nomination pour le film revenant à Sylvester Stallone – la star du cinéma encore jamais honorée – pour le second rôle masculin.

Le comédien Michael B. Jordan. © Matt Sayles/AP/SIPA
Le Britannique Idris Elba, très applaudi pour son personnage de militaire qui exploite des enfants soldats dans Beasts of No Nation, a également été exclu des nominations.

Idris Elba dans Beasts of No Nation. © Netflix
Polémique sur les réseaux
Sur les réseaux sociaux, ce manque de diversité parmi les nominés fait polémique, le hashtag #OscarsSoWhite arrivant en tête des tendances. « Les Oscars sont tellement blancs que les Noirs n’arrivent même pas à être nommés pour les films sur les Noirs » se désole Joy Reid, auteur de Barack Obama, the Clintons, and the Racial Divide, sur Twitter :
#OscarsSoWhite black people can't even get nominated for the movies about black people... https://t.co/3ZM9y09R7b
— Joy Reid (@JoyAnnReid) January 14, 2016
« Il y avait plus de diversité en 1936 aux Jeux olympiques de Berlin », sous le régime nazi, ironise Richard Hine, romancier.
#OscarsSoWhite There was more diversity at the 1936 Berlin Olympics pic.twitter.com/3LocJcodPC
— Richard Hine (@richardhine) January 14, 2016
« Peut-être qu’ils refont #OscarsSoWhite parce qu’Hollywood adore les films à suite ? », suggère Jessica Goldstein, journaliste au Think Progress.
https://twitter.com/jessicagolds/status/687633135169847297
L’année dernière, le même scandale avait éclaté quand « Selma », la réalisatrice africaine-américaine du film sur Marthin Luther King, acclamée par la critique, n’avait pas été retenue dans sa catégorie, pas plus que les acteurs du films, notamment David Oyelowo pour sa puissante incarnation du pasteur.
A qui la faute ?
Certains dénoncent un préjugé de l’Académie des arts et sciences du cinéma, qui décerne les Oscars, encore composée à forte majorité d’hommes blancs relativement âgés, mais dont la présidente Cheryl Boone Isaacs est pourtant africaine-américaine. Pour beaucoup, c’est du côté des studios que le bât blesse. La grande majorité des décideurs sont « des hommes blancs qui tendent à faire des films qui leur plaisent à eux », note Tom Nunan, coproducteur de Collision qui a gagné l’Oscar du meilleur film en 2005.
Pour lui, il faut que les studios comprennent que les films avec des acteurs africains-américains ou issus de minorités « font de l’argent », signalant que, sur le plan de la diversité, la télévision est largement en avance par rapport au cinéma.
« Il y a eu 18 acteurs noirs nommés aux Emmys » – les prix de la télévision – rappelle le producteur. « Du coup l’industrie se sent très contente d’elle-même et puis les nominations aux Oscars arrivent et on se croirait dans les années 1950 », résume-t-il.